Giuseppe Dentice


Le sommet « historique » de Charm el-Cheikh entre l’Union européenne et la Ligue arabe aurait pu marquer une tentative de redéfinition des relations de force et des valeurs de coopération entre les deux rives de la Méditerranée. Malgré de timides tentatives pour placer la question des droits de l’homme en tant que facteur de développement social et de stabilisation politique au centre du débat, le sommet a mis davantage l’accent sur les questions de sécurité. Cependant, de nombreux problèmes restent sur la table, aux côtés de formules ambiguës qui doivent organiser le suivi concret des prochaines initiatives politiques touchant les deux rives de la Méditerranée.

Un an exactement après le tour asiatique de son père, le roi Salman, le prince héritier Mohammed bin Salman a tenu une série de réunions de haut niveau du 17 au 22 février dans certains des principaux pays de la région. Le Pakistan, la Chine et l’Inde ont été les étapes de ce tour très attendu dans les milieux diplomatiques et d’affaires. Son but était de redorer l’image internationale du prince et du royaume saoudien lui-même, marquée par les critiques féroces qui ont surgi au lendemain du meurtre de Jamal Khashoggi.

Abdelaziz Bouteflika, souffrant à 81 ans d’un grave problème de santé, a annoncé son intention de se présenter à nouveau aux élections présidentielles, briguant un 5ème mandat. La candidature du dirigeant algérien cache une série de problèmes chroniques (politiques, économiques et énergétiques). Ainsi, entre immobilisme apparent et nombreuses tentatives de définition d’une ère post-Bouteflika crédible, l’Algérie se heurte à une réalité face à laquelle on ne peut plus être aveugle.

Le voyage du pape François à Abou Dabi était un rendez-vous très attendu, non seulement en raison de sa forte charge morale et spirituelle, mais aussi et surtout en raison de ses innombrables implications géopolitiques  : du thème de la protection des chrétiens au Moyen-Orient aux relations avec l’Islam en passant par l’actualité de la région et la valeur que les Émirats eux-mêmes ont donné à cette rencontre historique. En particulier, ce dernier aspect pourrait attester d’un rôle accru d’Abou Dabi dans la dynamique politique régionale.

Après les voyages du Premier Ministre et du Ministre des Sports israélien en Oman et aux Emirats Arabes Unis en octobre dernier, Netanyahou s’est rendu au Tchad pour donner un nouvel élan aux relations entre Tel Aviv et les pays du continent africain. La mission du Premier ministre cache plus d’une signification (géo-)politique  : la nouvelle position internationale d’Israël, l’opposition du front africain pro-palestinien et une rapide marche vers une normalisation complète des rapports avec les pays arabo-sunnites, par stratégie anti-iranienne.

Du 8 au 15 janvier, le secrétaire d’État américain Mike Pompeo a effectué une mission au Moyen-Orient, dans les pays arabes sunnites alliés à Washington (Jordanie, Égypte, Émirats Arabes Unis, Qatar, Arabie saoudite, Oman et Koweït) dans laquelle se dessinent les intentions américaines dans cette région. Ainsi, dans un contexte de désaveu de la politique étrangère d’Obama et d’hostilité renouvelée à l’égard de l’Iran, Washington affiche sa volonté de définir une nouvelle stratégie cohérente avec les objectifs de Trump et de ses alliés du Proche-Orient.

Fin 2018, le roi Salman a annoncé un remaniement gouvernemental impliquant plusieurs personnalités, ministères et organes clefs de la complexe machine étatique saoudienne. Le Ministre des Affaires Étrangères, Adel al-Jubeir, est le premier à en avoir subi les conséquences  : il a été remplacé par Ibrahim al-Assaf, jusque-là Ministre de l’Économie. Le remaniement opéré par Riyad répond à une triple logique, visant à recréer un climat de confiance et de disponibilité au sein de l’élite du pays, aussi bien qu’avec les marchés financiers et la communauté internationale.

L’Égypte discute depuis longtemps de la possibilité de modifier certains paragraphes de sa Constitution, y compris ceux qui concernent la durée du mandat présidentiel. Selon la presse égyptienne, le service national de renseignement et le bureau du Président ont trouvé un accord pour d’éventuelles réformes afin que l’ancien maréchal reste longtemps au sommet de la République. De fait, cet épisode se présente comme un pas de plus vers l’institutionnalisation de l’autoritarisme à la sauce militaire.

Le voyage diplomatique de l’’héritier du trône saoudien au Moyen-Orient était très attendu. Émirats arabes unis, Bahreïn, Égypte, Tunisie, Algérie et Mauritanie ont été les étapes effectuées par Mohammed bin Salman avant de repartir et de participer aux travaux du G20 à Buenos Aires, le 30 novembre. Une tournée importante destinée à réaffirmer les alliances et les amitiés aujourd’hui plus utiles que jamais pour Riyad, mais aussi à lever définitivement les ombres de l’affaire Khashoggi.

Les forces terrestres, navales et aériennes de l’Arabie saoudite, des Émirats arabes unis, du Koweït, du Bahreïn, de l’Égypte et de la Jordanie ont effectué les plus importants exercices militaires conjoints de l’histoire récente du Moyen-Orient. Un pas important vers ce que l’on appelle l’”OTAN arabe”, un projet politico-militaire (avec la participation directe des États-Unis et d’Israël) visant à combattre le terrorisme et à contenir l’influence iranienne dans la région. Mais au-delà des bonnes intentions, il y a encore trop d’obstacles à son succès.

Avec une annonce surprise, l’Émir du Qatar a autorisé un remaniement gouvernemental généralisé qui a également impliqué les principales sociétés holding de l’État, Qatar Petroleum et Qatar Investment Authority, les principales expressions du soft-power du Qatar. La décision a une double valeur stratégique  : mettre en œuvre des réformes internes et consolider l’image et la force du pays à l’extérieur, malgré le boycott arabe.

Les visites officielles de Benjamin Netanyahou au sultanat d’Oman et du ministre israélien des Sports Miri Regev aux Émirats Arabes Unis pourraient marquer le début de nouveaux équilibres dans les relations entre Tel Aviv et ses voisins arabes au Moyen-Orient. Ainsi, Israël et les monarchies du Golfe visent à définir une convergence tactique basée sur l’intérêt commun de limiter l’influence iranienne au Moyen-Orient. Une action importante mais non sans risques.

L’assassinat de Khashoggi a occulté la Future Investment Initiative (Fii) tant attendue, le Davos du désert qui, dans l’intention de son créateur, le prince héritier Mohammed bin Salman, devait donner une visibilité aux projets de diversification économique fournis par Vision 2030 de Riyad et relancer une stratégie efficace pour attirer des capitaux étrangers dans différents secteurs de son développement économique.

L’arrestation de Hisham Ashmawy est aujourd’hui l’un des principaux succès politiques du gouvernement et des institutions du Caire, engagés depuis longtemps dans une dure campagne antiterroriste qui a fait des milliers de victimes, civiles, militaires et terroristes, et qui a impliqué tout l’espace géographique de l’Égypte. Un succès émotionnel et médiatique qui peut ne pas correspondre à un impact militaire et politique équivalent dans la lutte contre le terrorisme en Egypte.

L’Arabie saoudite a une fois de plus ignoré les demandes de l’administration Trump de baisser le prix mondial du pétrole brut afin d’affaiblir l’Iran. Le rejet saoudien n’est cependant que le dernier d’une série de malentendus avec Washington sur divers dossiers de politique étrangère et du Moyen-Orient. Ces différences pourraient masquer des difficultés beaucoup plus profondes dans les relations historiques entre l’Arabie saoudite et les États-Unis.

Les problèmes de l’Arabie saoudite persistent. Après le report de l’introduction en bourse d’Aramco, la critique par le prince Ahmed bin Abdulaziz, frère du roi, des politiques actuelles a rendu publiques les tensions au sein de la famille régnante, ce qui pourrait affecter la réalisation déjà difficile de l’ambitieux programme de réformes de Mohammed Bin Salman.

L’attaque de deux pétroliers Aramco dans le détroit de Bab el- Mandeb a réchauffé l’atmosphère dans la région, ce qui a conduit l’Arabie saoudite à annoncer l’arrêt de tout transit dans la région. L’annonce, qui a déjà provoqué une augmentation du prix du pétrole, pourrait être un autre chapitre de l’affrontement pour l’hégémonie régionale avec l’Iran.