Asie septentrionale

Long format

Nettoyer les confins, réprimer les ethnies, se débarrasser des «  éléments suspects  ».

Dans cette étude-cadre, premier épisode de notre série «  Violences impériales  », Juliette Cadiot dresse un panorama historique des répressions nationales en Union soviétique. Une xénophobie d’État bientôt érigé en dogme, dont la mémoire a conditionné le monde post-soviétique aujourd’hui en guerre contre la Russie de Poutine.

Un continuum de violences. Une chaîne de l’impunité.

La guerre impériale n’a pas repris — elle n’a tout simplement jamais cessé. Depuis le 24 février 2022, elle a, une fois de plus, changé de forme. Nous lançons aujourd’hui une série importante, co-dirigée par Juliette Cadiot et Céline Marangé (Mémorial France), qui ouvrira les pages de la revue à des spécialistes des violences d’empire de l’époque soviétique en montrant leurs échos dans le projet de Poutine.

La Russie est-elle vraiment en économie de guerre  ?

À y regarder de plus près, les ressources financières et industrielles de Moscou — mais aussi sa main-d’œuvre — sont loin d’être aussi illimitées que Poutine le prétend. Dans une étude chiffrée, le spécialiste des politiques de défense Pavel Luzin nous plonge au cœur d’une économie de l’armement largement en crise depuis l’invasion de l’Ukraine — et qui repose désormais sur des stocks de l’ère soviétique.

Ce premier épisode de notre série «  Doctrines de la Russie de Poutine  » tente de comprendre la figure et le rôle d’Aleksandr Prokhanov, écrivain nationaliste dont la carrière semble avoir pris un tournant avec l’invasion de l’Ukraine. Dans un texte traduit par Guillaume Lancereau et commenté par Marlène Laruelle, il fait la promotion d’un sursaut esthétique patriotique à la faveur du massacre — allant jusqu’à composer un «  opéra-rock  » joué dans la principale usine de tanks du pays.

Un village sans ciel, une guerre silencieuse, des hommes bi-dimensionnels. Dans une parabole aussi captivante que glaçante écrite en 2014, l’idéologue de Poutine Vladislav Sourkov se faisait étrangement prophétique sur le monde qui s’est ouvert avec l’invasion de l’Ukraine. Un commentaire signé Giuliano da Empoli, auteur du succès planétaire Le Mage du Kremlin qui ressort cette semaine en poche chez Gallimard.

Pour Vladimir Poutine, épaulé par le patriarche Kirill, les «  valeurs traditionnelles  » sont une priorité d’État. Dans cet article fouillé, Marina Simakova engage leur généalogie afin de saisir pourquoi elles sont devenues si centrales pour l’État russe contemporain, au point de déterminer autant sa politique intérieure qu’extérieure. Une lecture clef à deux semaines des célébrations du Noël orthodoxe.

Aujourd’hui, la Russie de Poutine connaît une grève exceptionnelle de ses avocats, en réaction aux violences qu’ils subissent dans l’exercice de leurs fonctions. Si celles-ci existent depuis des décennies, leur gravité et leur intensité n’ont fait qu’augmenter depuis le début de l’invasion russe de l’Ukraine. Deux pétitions signées par des centaines d’avocats protestent clairement contre cette situation. Guillaume Lancereau analyse ces textes qui sont d’une importance capitale pour saisir la manière dont l’État opère dans la Russie contemporaine.

Le 7 octobre 2006, Anna Politkovskaïa est assassinée dans le hall de son immeuble. Près de son corps, il y a un pistolet Makarov 9 mm, une arme fréquemment utilisée par les forces de sécurité russes. Le 7 octobre, c’est aussi l’anniversaire de Vladimir Poutine. Aujourd’hui, pendant qu’il célébrera avec ses proches, nous rendons hommage à la journaliste assassinée en publiant son dernier article, resté dans son ordinateur au moment de sa mort — introduit par Galia Ackerman, historienne et traductrice de l’œuvre de Politkovskaïa.

En promettant de les sortir de la misère pour quelques milliers de roubles, le régime russe arrive à aligner une génération de Russes pour mourir au front. Dans une chronique au cœur de cette classe invisible devenue chair à canon du Kremlin, Sergej Černyšov livre une clef qui va à l’opposé d’un discours dominant. Il nous aide à comprendre comment Poutine continue à mobiliser des masses.

Depuis quelques jours, de nouvelles vidéos de propagande affluent sur les réseaux sociaux. Leur but  ? Convaincre les jeunes hommes russes de se battre en Ukraine. En 2024, le budget de la défense deviendra le premier poste de dépense de la Russie, augmentant de 70  %. Alors que la prochaine manche de la guerre infinie de Poutine s’annonce particulièrement brutale, nous décodons les images, caricaturales, choquantes, parfois obscènes, mitraillées à une génération que le Kremlin veut envoyer mourir au front pour un mirage impérial.