Asie septentrionale

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Ce premier épisode de notre série «  Doctrines de la Russie de Poutine  » tente de comprendre la figure et le rôle d’Aleksandr Prokhanov, écrivain nationaliste dont la carrière semble avoir pris un tournant avec l’invasion de l’Ukraine. Dans un texte traduit par Guillaume Lancereau et commenté par Marlène Laruelle, il fait la promotion d’un sursaut esthétique patriotique à la faveur du massacre — allant jusqu’à composer un «  opéra-rock  » joué dans la principale usine de tanks du pays.

Un village sans ciel, une guerre silencieuse, des hommes bi-dimensionnels. Dans une parabole aussi captivante que glaçante écrite en 2014, l’idéologue de Poutine Vladislav Sourkov se faisait étrangement prophétique sur le monde qui s’est ouvert avec l’invasion de l’Ukraine. Un commentaire signé Giuliano da Empoli, auteur du succès planétaire Le Mage du Kremlin qui ressort cette semaine en poche chez Gallimard.

Pour Vladimir Poutine, épaulé par le patriarche Kirill, les «  valeurs traditionnelles  » sont une priorité d’État. Dans cet article fouillé, Marina Simakova engage leur généalogie afin de saisir pourquoi elles sont devenues si centrales pour l’État russe contemporain, au point de déterminer autant sa politique intérieure qu’extérieure. Une lecture clef à deux semaines des célébrations du Noël orthodoxe.

Aujourd’hui, la Russie de Poutine connaît une grève exceptionnelle de ses avocats, en réaction aux violences qu’ils subissent dans l’exercice de leurs fonctions. Si celles-ci existent depuis des décennies, leur gravité et leur intensité n’ont fait qu’augmenter depuis le début de l’invasion russe de l’Ukraine. Deux pétitions signées par des centaines d’avocats protestent clairement contre cette situation. Guillaume Lancereau analyse ces textes qui sont d’une importance capitale pour saisir la manière dont l’État opère dans la Russie contemporaine.

Le 7 octobre 2006, Anna Politkovskaïa est assassinée dans le hall de son immeuble. Près de son corps, il y a un pistolet Makarov 9 mm, une arme fréquemment utilisée par les forces de sécurité russes. Le 7 octobre, c’est aussi l’anniversaire de Vladimir Poutine. Aujourd’hui, pendant qu’il célébrera avec ses proches, nous rendons hommage à la journaliste assassinée en publiant son dernier article, resté dans son ordinateur au moment de sa mort — introduit par Galia Ackerman, historienne et traductrice de l’œuvre de Politkovskaïa.

En promettant de les sortir de la misère pour quelques milliers de roubles, le régime russe arrive à aligner une génération de Russes pour mourir au front. Dans une chronique au cœur de cette classe invisible devenue chair à canon du Kremlin, Sergej Černyšov livre une clef qui va à l’opposé d’un discours dominant. Il nous aide à comprendre comment Poutine continue à mobiliser des masses.

Depuis quelques jours, de nouvelles vidéos de propagande affluent sur les réseaux sociaux. Leur but  ? Convaincre les jeunes hommes russes de se battre en Ukraine. En 2024, le budget de la défense deviendra le premier poste de dépense de la Russie, augmentant de 70  %. Alors que la prochaine manche de la guerre infinie de Poutine s’annonce particulièrement brutale, nous décodons les images, caricaturales, choquantes, parfois obscènes, mitraillées à une génération que le Kremlin veut envoyer mourir au front pour un mirage impérial.

À l’intérieur de la Fédération de Russie, contre le fantasme impérialiste poutinien, des minorités ethniques rêvent de reproduire les indépendances des ex-républiques socialistes soviétiques après la chute de l’URSS. En Kalmoukie, dans le Caucase, on mise sur la capitulation d’une Russie embourbée dans une guerre ingagnable en Ukraine pour penser un après fondé sur l’auto-détermination.

«  La politique étrangère russe a sa logique propre, son langage. Tant qu’on ne les comprend pas, on s’interdit de mettre en place une véritable politique d’endiguement.  » Dans cet entretien introduit par Guillaume Lancereau, Vjačeslav Morozov dissèque la mise à jour par Moscou de son document stratégique de référence et nous aide à fourbir une arme — l’intelligence de la guerre.