Violences impériales : l’actualité russe du passé soviétique

Un continuum de violences. Une chaîne de l’impunité. La guerre multiforme — armée, politique, symbolique et culturelle — menée par Poutine contre l’Ukraine rappelle d’autres périodes passées. Les peuples d’Europe centrale et orientale ayant fait l’expérience de l’impérialisme russe et des répressions soviétiques en conservent une mémoire vive, tandis que ceux d’Europe occidentale en ignorent souvent jusqu’à l’existence. 

Lancée l’occasion du deuxième anniversaire de l’invasion de l’Ukraine, rupture majeure dans l’histoire du continent européen depuis la fin de la guerre froide, cette nouvelle série dirigée par Juliette Cadiot et Céline Marangé (Mémorial France) se propose d’aider les seconds à mieux comprendre les premiers en s’appropriant les connaissances historiques nécessaires pour apprécier les enjeux contemporains et les perceptions qui découlent de ces violences de masse.

Déporter pour dominer : histoire et mémoire des déplacements forcés en Europe orientale

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Les « opérations nationales » de la Grande Terreur de 1937-1938

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L’Holodomor — l’extermination par la faim de 4 millions d’Ukrainiens — a façonné l’identité ukrainienne.

Mais elle n’est pas la seule famine de l’ère soviétique. Le règne de Staline a été marqué par les dernières grandes famines européennes, intentionnellement orchestrées pour certaines, oubliées pour la plupart. Dans une étude fouillée, Nicolas Werth fait le point et relève les dernières avancées de l’historiographie.

Soviétiser des espaces immenses, impossibles à parcourir.

Dans des travaux pionniers, Isabelle Oyahon a montré comment les famines intentionnelles et la sédentarisation forcée des nomades ont façonné brutalement l’Asie centrale. À partir du cas du Kazakhstan, elle dresse une vaste généalogie jusqu’à nos jours — et la longue absence de loi mémorielle sur cette histoire oubliée.

En 1988, 61 pays du Sud devaient à l’Union soviétique 150 milliards de dollars.

Pour promouvoir les intérêts russes en Afrique, les envoyés du Kremlin ont aujourd’hui une référence à faire valoir  : du Mozambique au Ghana, les liens économiques entre le continent africain et l’URSS ont été nourris. Entre recours massif au crédit et pression par le rouble, Elizabeth Banks nous replonge dans cette histoire trop méconnue.

Dans la plus pure tradition impérialiste, la Russie de Poutine a renoué avec un instrument privilégié de l’URSS  : la pratique de l’inversion accusatoire. La dénonciation de l’impérialisme occidental fonctionne dans les anciens pays colonisés — tout en occultant l’invasion et les crimes en Ukraine.
Dans un nouvel épisode de notre série «  Violences impériales  », Céline Marangé revient aux sources soviétiques de ce stratagème.

Pour asservir des populations, Staline avait une stratégie aussi simple que cynique  : défendre en apparence le principe de l’État-nation. Aujourd’hui, Poutine prétend que Russes et Ukrainiens constituent un même peuple pour aliéner Kiev. Nouvel épisode de notre série historique «  Violences impériales  : l’actualité russe du passé soviétique  ».

Dans les tranchées, sous les canons, on se bat aussi contre des mythes. En regroupant les régions de Donetsk et de Lougansk sous le terme artificiel et trompeur de «  Donbass  », la propagande soviétique avait assigné à ces terres un statut. Aujourd’hui, la Russie de Poutine veut à nouveau les accaparer.

Dans ce témoignage, l’historienne et activiste ukrainienne Olena Stiazhkina revient sur les formes de leur résistance.

Nettoyer les confins, réprimer les ethnies, se débarrasser des «  éléments suspects  ».

Dans cette étude-cadre, premier épisode de notre série «  Violences impériales  », Juliette Cadiot dresse un panorama historique des répressions nationales en Union soviétique. Une xénophobie d’État bientôt érigé en dogme, dont la mémoire a conditionné le monde post-soviétique aujourd’hui en guerre contre la Russie de Poutine.

Un continuum de violences. Une chaîne de l’impunité.

La guerre impériale n’a pas repris — elle n’a tout simplement jamais cessé. Depuis le 24 février 2022, elle a, une fois de plus, changé de forme. Nous lançons aujourd’hui une série importante, co-dirigée par Juliette Cadiot et Céline Marangé (Mémorial France), qui ouvrira les pages de la revue à des spécialistes des violences d’empire de l’époque soviétique en montrant leurs échos dans le projet de Poutine.