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Préfet du Dicastère pour le développement humain intégral
Grand électeur bergoglien et jésuite, il se place résolument dans la continuité de François, ayant été le principal maître d'œuvre du pape en matière de justice sociale, de migrations et d’écologie.
Cardinal électeur
Il est né à Brno en Tchécoslovaquie ; sa famille maternelle, juive, se convertit au catholicisme, mais ne peut éviter la déportation : son grand-père maternel meurt au camp de Theresienstadt, et ses oncles à Auschwitz. Elle émigre au Canada en 1948, alors qu’il est âgé de deux ans. Il étudie à l’école secondaire Loyola à Montréal ; c’est tout naturellement, ensuite, qu’il rejoint en 1964 l’ordre des jésuites, et dans leurs institutions qu’il se forme : noviciat en Ontario, puis philosophie et lettres classiques à l’université Gonzaga de Spokane (Etat de Washington), et, après une année comme professeur dans une école secondaire jésuite, théologie au Regis College de Toronto. Il est ordonné prêtre le 9 juin 1973 pour la province jésuite du Haut-Canada ; il achève ses études en 1978, avec un doctorat en études interdisciplinaires de l’université de Chicago, sur les pensées de Marx et Feuerbach. En 1979, il fonde à Toronto le Forum jésuite pour la foi et la justice sociale, et le dirige jusqu’en 1989. Il est alors volontaire pour être envoyé au Salvador, pays qui connaît une situation instable, marqué par l’assassinat par l’armée de 6 jésuites critiques du pouvoir ; en 1991, il devient directeur de l’Institut des droits de l’homme et vice-recteur à l’action sociale de l’université de San Salvador, l’endroit même où ses prédécesseurs avaient été mitraillés. Entre 1992 et 2002, il occupe également des fonctions au secrétariat à la justice sociale et à l’écologie de la curie générale des jésuites, à Rome. En 2002, il est envoyé en Afrique, où il fonde l’African Jesuit AIDS Network (AJAN), le réseau jésuite africain sur le Sida, qu’il dirige jusqu’en 2010, intervenant dans 30 pays pour soutenir et accompagner les malades du Sida. Dans ce cadre, il considère que le préservatif ne peut constituer l’intégralité de la réponse à la pandémie en Afrique. Entre 2005 et 2010, il est professeur au Hekima University College de Nairobi (Kenya). Il devient également consulteur pour le Conseil pontifical justice et paix (2010-2016).
En 2016, François le nomme membre du Dicastère pour le développement humain intégral, et sous-secrétaire de la section pour les migrants et les réfugiés, qui, dans le cadre de sa réforme de la Curie, remplace un organisme autonome, le Conseil pontifical pour la pastorale des migrants et des personnes en déplacement (créé par Jean-Paul II en 1988). En raison de l’importance de ce sujet pour le pape François, cette nomination se révèle vite cruciale, et Michael Czerny, malgré sa place au second rang dans l’organigramme curial, apparaît comme un protégé de François : en mai 2019, il devient l’un des deux secrétaires spéciaux nommés par le pape lors du synode sur l’Amazonie. En octobre de la même année, il est créé cardinal, alors que cette dignité n’avait jamais été attribuée à un sous-secrétaire de section de la Curie. Alors simple monsignore, il doit être consacré évêque avant de recevoir la pourpre, en application du Code de droit canonique de 1983 : il reçoit la consécration épiscopale de François lui-même, le 4 octobre 2019, et devient archevêque titulaire de Beneventum. Membre de plusieurs autres dicastères de la Curie (Evangélisation, dialogue interreligieux, relations avec les Etats), il est nommé en janvier 2022 préfet par intérim du Dicastère pour le développement humain intégral, un des plus importants dans la nouvelle Curie de François, puis (juillet 2022) préfet de plein exercice pour un mandat de 5 ans, succédant au cardinal Peter Tukson. En mars de la même année, il est envoyé spécialement en Ukraine avec le cardinal Krajewski pour apporter de l’aide humanitaire du Saint-Siège, et peut-être mener des négociations parallèles.
Le cardinal Czerny est le principal maître d’œuvre des orientations bergogliennes en matière de justice sociale, de migrations et d’écologie. Vu comme un grand spécialiste de ces questions, lui-même immigré au Canada, il voit dans les migrations “l’un des phénomènes humains les plus importants et urgents de notre époque”. Il a plaidé la cause des migrants dans de nombreuses arènes internationales. C’est lui qui a commandé la sculpture d’un navire transportant des réfugiés sur la place Saint-Pierre, inaugurée en 2019. Il relie fortement les sujets migratoires à la préoccupation environnementale, la question des réfugiés climatiques devant selon lui se poser avec une acuité particulière. Il a beaucoup développé la réflexion ecclésiale autour de la notion d’éco-justice, et s’est fortement engagé en faveur de la transition énergétique. Il a eu des paroles fortes contre le gel de l’USAid par Donald Trump, et a condamné les expulsions de migrants clandestins. En théologie morale et discipline ecclésiastique, il est également progressiste, se prononçant pour la possibilité d’ordonner des femmes diaconesses. Grand électeur bergoglien et jésuite, il se place résolument dans la continuité de François.
