Cardinal Luis Antonio Tagle
Pro-préfet du Dicastère pour l’Évangélisation
Encore jeune pour un cardinal, le cardinal Tagle passe pour l’un des principaux, si ce n’est le principal papabile progressiste.
Papabile
© Associated Press
Pro-préfet du Dicastère pour l’Évangélisation
Encore jeune pour un cardinal, le cardinal Tagle passe pour l’un des principaux, si ce n’est le principal papabile progressiste.
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Né à Manille, dans une famille de la classe gouvernante, d’origine tagalog par son père, chinoise par sa mère, il entre, après ses études secondaires, au séminaire diocésain de Manille, et étudie dans une université jésuite, l’Ateneo de Manila ; il est ordonné prêtre le 27 février 1982 pour le diocèse d’Imus (île de Luçon), d’où est originaire son grand-père paternel ; de 1987 à 1991, il étudie à la Catholic University of America de Washington, dont il est docteur en théologie summa cum laude grâce à une thèse sur la collégialité épiscopale selon Vatican II et Paul VI. Après 1991, il est directeur spirituel, puis recteur de son séminaire diocésain d’Imus. En 1997, il est nommé membre de la Commission théologique internationale présidée par le cardinal Ratzinger pour y faire entendre une voix asiatique. Entre 1995 et 2002, il est impliqué dans le projet d’une monumentale Histoire de Vatican II à visée encyclopédique, piloté par l’université de Bologne : c’est ce que l’on appellera « l’École de Bologne », qui fait une lecture rupturiste du concile.
Entre 1998 et 2001, il est recteur de la cathédrale d’Imus, puis nommé évêque de ce diocèse et consacré le 12 décembre 2001 par l’archevêque de Manille, le cardinal Jaime Sin (1928-2005). Très actif dans les congrès eucharistiques et la communication en direction des jeunes, il est à son tour nommé archevêque de Manille, primat des Philippines, par Benoît XVI en 2011, et créé cardinal l’année suivante (cardinal-prêtre du titre de San Felice da Cantalice). Il a donc pris part au conclave de 2013. Il devient membre de très nombreuses congrégations ou conseils de la curie romaine (Famille, pastorale des Migrants, Instituts de Vie consacrée, Evanglisation), et, en 2014, président de Caritas International, gigantesque confédération mondiale des organismes caritatifs catholiques, succédant au cardinal Maradiaga, un intime de François. En décembre 2019, le pape le nomme préfet de la Congrégation pour l’Évangélisation des peuples, l’ancienne Propaganda Fide qui supervise toutes les activités de l’Église dans les pays de mission, à majorité non-chrétienne, valant à son puissant préfet le surnom de « pape rouge ». En 2020, il est élevé au rang de cardinal-évêque surnuméraire ; mais en 2022, en application de la nouvelle constitution Praedicate Evangelium qui réorganise la curie, il est rétrogradé au rang de pro-préfet du nouveau Dicastère pour l’Evangélisation, le pape lui-même devenant son préfet : ce faisant, François a appliqué à ce Dicastère, devenu le premier dans l’ordre protocolaire, les usages en vigueur pour le Saint-Office avant 1968.
Encore jeune pour un cardinal, très souriant, direct et simple, excellent communicant mais également intellectuel très solide, le cardinal Tagle passe pour l’un des principaux, si ce n’est le principal papabile progressiste. Sa ligne poursuivrait et accentuerait sans doute celle du pape François, dans l’attention portée à la justice sociale et la priorité accordée aux pauvres, aux migrants et aux exclus. Il a défendu l’accord secret entre le Vatican et la Chine ; il est résolument en faveur de la « conversion synodale » de l’Église, dont il fait figure de spécialiste en tant qu’expert de la collégialité. Il a approuvé la nécessité d’un débat sur le célibat des prêtres, et défend une attitude d’ouverture à l’égard des couples de même sexe.
Si François a d’abord fait progresser sa carrière, et l’a lui-même installé comme héritier potentiel, depuis, son étoile a beaucoup pâli : à la suite d’audits révélant des lacunes financières, il a dû se démettre en 2022 de la présidence de Caritas International, sous pression du pape. Cette mise à distance est susceptible de diviser les prélats progressistes, comme de lui redonner du lustre auprès des anti-bergogliens.