Bruxelles. La Belgique souhaite renforcer sa coopération avec ses voisins (3), ce qui suppose une interopérabilité, assurée par des normes de l’OTAN mais qui est évidemment plus naturellement obtenue si les appareils sont identiques. Le F-35 a déjà été retenu par les Pays-Bas, le Danemark et la Norvège, mais le Rafale équipe la France et l’Eurofighter l’Allemagne (1). Le Royaume-Uni, quant à lui, combine l’Eurofighter et le F-35.

Bruxelles recherchait un avion multirôle (2) et qui suivra les évolutions technologiques futures, ce qui a constitué un handicap réel pour l’Eurofighter d’Airbus (4), dont les capacités air-sol sont limitées et les évolutions futures incertaines, l’Italie utilisant le F-35 pour ces missions et le Royaume-Uni cherchant tout simplement à remplacer l’Eurofighter par le Tempest.

La France, et son industriel Dassault, ont quant à eux dévié du cadre de la compétition avec leur offre centrée sur le Rafale, sur la forme comme sur le fond (une coopération plus approfondie se plaçant dans la perspective d’une Europe de la défense), se mettant probablement hors-compétition d’office.

Les programmes d’armement sont complexes, coûteux et s’étendent sur plusieurs décennies. Les coopérations entre États sont notamment recherchées pour partager les coûts de développement et réduire le prix unitaire des appareils et de leur maintenance. Le choix de la Belgique a donc des conséquences immédiates sur les pays mettant en oeuvre le Rafale ou l’Eurofighter. A plus long terme, elle soulève des questions sur la participation de la Belgique au programme franco-allemand SCAF (système de combat aérien du futur).

Mais ces choix sont également très politiques. Les dissensions politiques belges, entre partis et entre régions plus ou moins atlantistes ou européistes et plus ou moins proches des différents pays voisins de la Belgique, ont pesé dans le choix du F-35. Deux des avions en compétition, le Rafale et l’Eurofighter, sont issus d’un projet de coopération européen des années 1980, dont la France est sortie en 1985 pour développer seule le Rafale. On peut espérer que le SCAF ne connaisse pas le même destin, bien que des mesures aient été prises pour l’éviter (leadership donné à la France, afin de ne pas reproduire les problèmes de gouvernance rencontrés pour l’A400M, autre programme en coopération).

Perspectives :

  • Si le leadership du SCAF a été donné à la France, la répartition entre les différents industriels (Airbus, Dassault, Thales notamment) n’a pas encore été établie ; Airbus en particulier a pris des positions publiques (5), et tente de se prévaloir de l’appui de l’Allemagne.
  • Salon International de l’Aéronautique et de l’Espace 2019, Paris – Le Bourget (le pilotage français du SCAF a été annoncé à Berlin, au salon ILA 2018)
  • Le SCAF doit entrer en service vers 2040, au profit de la France et de l’Allemagne, qui sont ouvertes à la participation d’autres partenaires européens.

Sources :

  1. DSI Magazine, Thread Twitter renvoyant vers plusieurs articles, Réseau Multidisciplinaire d’Études Stratégiques, 2018.
  2. STRUYS Wally, HENROTIN Joseph, DUMOULIN André, Le remplacement des F-16 belges : une analyse exploratoire, 2014.
  3. MATTELEAR Alexander, Pourquoi le F-35 représente un choix stratégique pour la Belgique, La Libre, 2018.
  4. HENROTIN Joseph, Thread Twitter, 2018.
  5. CABIROL Michel, SCAF : une clarification s’impose entre la France et Airbus, La Tribune, 2018.

Benoît de Laitre