L’agenda de la visite aux États-Unis de Volodymyr Zelensky est particulièrement chargé : rencontres avec de nombreux chefs d’État et de gouvernement, discours devant l’Assemblée générale mercredi 25 septembre, deux réunions prévues jeudi 26 avec un groupe bipartisan d’élus du Congrès suivie d’un entretien avec Biden à la Maison-Blanche puis d’une rencontre bilatérale avec Kamala Harris.

Le principal nom qui manquait à cette liste était celui du candidat républicain Donald Trump, dont la campagne avait confirmé à l’Associated Press mardi 24 septembre qu’il ne s’entretiendrait pas avec Zelensky cette semaine1.

  • La dernière rencontre en personne entre Trump et Zelensky remonte à septembre 2019, à l’occasion de l’Assemblée générale des Nations unies. En juillet 2024, le président ukrainien avait appelé Trump pour la première fois en cinq ans suite à la tentative d’assasinat de Butler.
  • Le président américain avait déclaré en 2019 aux côtés de Zelensky : « Les États-Unis aident l’Ukraine, mais je pense que d’autres pays devraient l’aider beaucoup plus qu’ils ne le font actuellement […] l’Allemagne, la France, les pays de l’Union européenne devraient vraiment vous aider davantage ».
  • Le speaker républicain de la Chambre, Mike Johnson, a annoncé jeudi 26 septembre qu’il « n’a pas pu organiser de réunion avec Zelensky cette semaine » en raison d’un agenda chargé2.

Le président ukrainien et l’ex-président américain entretiennent une relation pour le moins délicate. C’est lors d’un appel téléphonique en juillet 2019 que Trump avait demandé à Volodymyr Zelensky d’ouvrir une enquête sur Joe Biden et son fils, Hunter, alors que celui-ci était en campagne pour sa réélection face au candidat démocrate3. Suite à cet appel, Trump a été visé par une (première) tentative de destitution pour abus de pouvoir et obstruction au Congrès.

Au cours des cinq dernières années, les deux hommes ont entretenu une relation cordiale de façade.

  • Zelensky a félicité Donald Trump suite à sa nomination par le GOP en juillet. Les deux hommes avaient alors convenu de « discuter lors d’une réunion personnelle des mesures à prendre pour que la paix soit juste et vraiment durable » — qui aurait vraisemblablement dû avoir lieu cette semaine aux États-Unis4.
  • Depuis l’invasion russe de 2022, le président ukrainien a pris soin de ne pas trop s’immiscer publiquement dans la vie politique américaine. Si l’élection de Kamala Harris constituerait le signal le plus positif pour l’avenir de l’assistance américaine à Kiev, la campagne est trop serrée pour brûler les ponts avec Trump en affichant un soutien trop prononcé à la candidate démocrate.
  • En amont de sa visite aux États-Unis, Zelensky semble avoir mis fin à cette retenue en attaquant directement Trump et son colistier J.D. Vance lors d’un entretien donné à la revue The New Yorker.
  • Le président ukrainien a notamment déclaré : « J’ai le sentiment que Trump ne sait pas vraiment comment arrêter la guerre, même s’il pense le savoir », et a qualifié Vance de « trop radical »5.

Ces déclarations ont suscité une réaction quasi-immédiate de Trump, qui a dénoncé les « petites calomnies mesquines » de Zelensky à son égard6. Le candidat républicain a également à nouveau qualifié mardi 24 septembre le président ukrainien de « meilleur vendeur sur Terre : chaque fois qu’il vient dans le pays, il repart avec 60 milliards de dollars. Il veut tellement qu’ils gagnent cette élection. Mais je ferai les choses différemment. Je vais travailler à la paix ».

Les Républicains ont également été irrités par la visite dimanche 22 septembre de Zelensky dans une usine de production d’obus à Scranton, en Pennsylvanie, aux côtés du gouverneur démocrate Josh Shapiro.

  • Mike Johnson a dénoncé « un événement de campagne partisan destiné à aider les démocrates et [qui] constitue clairement une ingérence électorale ».
  • Pour l’élu trumpiste Eric Schmitt, « l’idée qu’un dirigeant étranger se déplace à bord d’un C-17, en Pennsylvanie, en critiquant le président Trump, en critiquant J.D. Vance […]  semble tout simplement exagérée ».
  • Le sénateur républicain de Caroline du Sud, Lindsey Graham, qui soutient l’assistance militaire américaine à l’Ukraine, a quant à lui averti que les critiques adressées par Zelensky constituent « la plus grosse erreur qu’il ait jamais commise »7.

La campagne de Trump avait annoncé mardi 24 septembre que l’ex-président ne rencontrerait finalement pas Volodymyr Zelensky cette semaine, comme le suggérait une déclaration de responsables ukrainiens8. Trump est revenu sur les déclarations de sa campagne hier, jeudi 26 septembre, et a annoncé qu’une rencontre aurait bien lieu à New York aujourd’hui, vendredi 27.

Sources
  1. Adriana Gomez Licon, « Trump praises Russia’s military record in argument to stop funding Ukraine’s fight », Associated Press, 25 septembre 2024.
  2. Publication de Kateryna Lisunova (Voici of America) sur X (Twitter), 26 septembre 2024.
  3. La transcription annotée par le New York Times de l’appel entre Trump et Zelensky est accessible ici.
  4. Martha Raddatz et Meredith Delison, « Trump says he had a ‘very good phone call’ with Zelenskyy », ABC News, 20 juillet 2024.
  5. Joshua Yaffa, « Volodymyr Zelensky Has a Plan for Ukraine’s Victory », The New Yorker, 22 septembre 2024.
  6. Mario Parker et Daniel Flatley, « Trump Blasts Zelenskiy as Ukraine’s Aid Bid Hits Campaign Strife », Bloomberg, 25 septembre 2024.
  7. « GOP hawks wince at new Trump-Zelensky spat », Punchbowl News, 25 septembre 2024.
  8. Adriana Gomez Licon, « Trump praises Russia’s military record in argument to stop funding Ukraine’s fight », Associated Press, 25 septembre 2024.