Sarajevo. Le 20 mai 2018, à Sarajevo (Bosnie-Herzégovine), le président turc effectue son premier meeting à l’étranger relatif aux élections présidentielles et législatives anticipées du 24 Juin prochain en Turquie (4). Cette intervention présente de multiples enjeux tant politiques que diplomatiques.

Alors que les pays européens comme l’Allemagne, l’Autriche ou les Pays-Bas ont fait part de leur réticence à l’idée d’accueillir les campagnes électorales turques sur leur territoire, le président turc a utilisé son influence sur la scène politique en Bosnie pour annoncer la tenue d’un meeting commun avec le SDA – principal parti bosniaque, musulman et proche de l’AKP – et son président Bakir Izetbegoviç, fils d’Alija Izetbegoviç, qui est à la tête de la présidence collégiale du pays et défend la politique d’Erdoğan (1). Cette intervention ne manque pas de soulever de vives critiques en Bosnie notamment de la part des délégués à la Chambre des représentants du parlement de Bosnie-Herzegovine.

A travers sa présence à Sarajevo, le président turc rappelle à l’Union Européenne l’influence politique que la Turquie peut jouer dans les Balkans trois jours seulement après le sommet UE-Balkans occidentaux à Sofia. En effet, cette région représente une zone d’intervention privilégiée pour la politique étrangère turque depuis plus de 10 ans (3) et ce n’est donc pas un hasard si Sarajevo a été choisie pour convaincre les 5 millions de turcs qui vivent en Europe et qui peuvent participer depuis 2013 au scrutin national (5 % du corps électoral total). La 6e assemblée générale de l’UETD (Union des Démocrates Turcs Européens) qui se tient pour la première fois en dehors de l’Allemagne (2) est la plateforme idéale pour s’adresser à la diaspora européenne pro-AKP majoritairement représentée en Allemagne, en Autriche, en France, en Belgique, aux Pays-Bas, et au Danemark. La réunion de l’UETD sert donc d’intermédiaire entre un président en campagne et la communauté turque européenne et elle se déroule en Bosnie où la Turquie a vu son influence grandir depuis que l’AKP est au pouvoir.

Perspectives :

  • Le 8 mai, le ministre des affaires étrangères Mevlüt Çavuşoğlu, a annoncé qu’après la Bosnie, il y aura au moins deux autres meetings électoraux supplémentaires en Europe, en France et en Angleterre. Les dates demeurent inconnues mais cette campagne électorale risque de soulever de nouvelles controverses et réticences sur le continent.

Sources  :

  1. Bosnian Leader, Europeans must understand Turkey better, Agence Anadolu, 17 Mai 2018.
  2. Interview du Président de l’UETD, Agence Anadolu, le 11 Mai 2018.
  3. MARCOU Jean, Tempête turque dans les Balkans, OVIPOT, 29/10/2013, mis à jour le 16/06/2015 .
  4. Erdoğan iddialı, Kılıçdaroğlu memnun, Milliyet, 9 Mai 2018.