Audit des mondes nouveaux

Le XXe siècle a été le grand chantier de la modernisation planétaire et de ses crises, avec une impressionnante accumulation de modèles achevés, tentés, ratés pour réaliser la nouveauté.

Alors que nous devons urgemment définir notre projet pour le monde nouveau de l’anthropocène, entre les inondations allemandes et les megafeux en Grèce, un audit s’impose.

Dans cette série nous avons préparé dix portraits de fond qui entremêlent textes et images pour vous présenter un cortège de grands architectes, banquiers ou urbanistes qui ont proposé – parfois d’une manière criminelle ou impossible, parfois d’une manière géniale et encore aujourd’hui indispensable – les infrastructures de leurs mondes nouveaux.

Mediobanca et la géopolitique financière : du Plan Marshall au Plan de Relance européen

Europe
Long format

La carrière de Beneduce, de postes de direction dans la finance à la présidence de l’Institut pour la Reconstruction Industrielle (IRI), offre un formidable exemple d’autonomie technocratique au sein même de l’État fasciste. L’étroite relation entre Beneduce et Mussolini ainsi que la distance que ce technocrate entretenait avec le parti fasciste posent des questions historiographiques majeures, qui présentent une mosaïque institutionnelle complexe du totalitarisme fasciste.

Alberto Beneduce est un personnage oublié de l’histoire politique italienne du début du XXe siècle. Réformateur technocrate influencé par le socialisme et le radicalisme, il est à l’origine d’un groupe de disciples qui a traversé l’État libéral, fasciste, ainsi que l’État républicain d’après-guerre, révélant un véritable «  système Beneduce  » d’organisation de la relation entre l’État et le marché. Première partie de son portrait.

La crise financière de 2008 a révélé l’insoutenabilité – jusqu’ici latente – du modèle capitaliste mondial tel qu’il a été construit après la Seconde Guerre mondiale. Le retrait progressif des investissements publics au profit du système financier privé a permis aux «  forces obscures du temps et de l’ignorance  » de s’installer, laissant place à l’incertitude, sacrifiant la confiance dans l’avenir et dans les marchés. Deuxième partie et fin de ce tour d’horizon du capitalisme dans le temps long.

L’ordre capitaliste mondial s’est construit dans le temps long, s’étoffant, se complexifiant à chaque guerre, crise ou krach boursier, glissant progressivement du rationnel au spéculatif. L’opposition entre une économie planifiée, centralisée à l’est et une décentralisée non-planifiée à l’ouest a eu pour effet de déphaser l’une par rapport à l’autre  : les leçons du dix-neuvième siècle ont influencé la pensée de l’Est  ; les leçons du vingtième siècle la pensée de l’Ouest.

Georgui Alexandrovitch Gradov est l’une des figures majeures de la pensée architecturale et urbanistique soviétique post-stalinienne. Personnage controversé, tour à tour théoricien, utopiste ou architecte pragmatique, partisan de l’adaptation de l’architecture aux défis modernes et aux innovations technologiques, acteur du renouvellement culturel et idéologique de la période du Dégel, il est aussi une figure éminemment politique.

De Madagascar à Nairobi en passant par Alger et Lagos, les grandes métropoles africaines sont toutes devenues des prototypes du concept récent de «  métropolisation  ». Olivier Vallée signe le deuxième article de notre série d’été consacrée au modernisme, dans lequel il dresse un tableau de l’architecture urbaine africaine non pas comme une tentative d’imitation de l’Occident, mais bien comme l’affirmation d’une recherche africaine résolument unique.

Il est possible de dresser un parallèle entre le héros du roman d’Ayn Rand The Fountainhead, Roark, paru dix-huit mois avant le procès de Nuremberg, et Albert Speer – bien qu’il est impossible que l’autrice se soit inspirée de ce dernier. Tous deux architectes, héritiers de la pensée philosophique et de la science du XIXe siècle, ils sont également partisans du «  triomphe de la volonté  ». Ils incarnent une certaine vision du futur  : un prototype de l’architecte du pouvoir, combinant une prétendue autorité intellectuelle et morale. Deuxième partie et fin du portrait de l’architecte Albert Speer.

Ce portrait de l’architecte nazi Albert Speer, signé par Vincenzo Latronico, est le premier de notre deuxième série d’été. À la lumière de peintures et de textes qui retracent l’itinéraire de Speer, l’auteur étudie son sujet à travers le prisme du modernisme, tant dans l’architecture caractéristique des rêves de grandeur du troisième Reich que du personnage lui-même  : tous deux partagent l’idéal impossible d’un triomphe de l’esprit sur la matière.