Selon le Financial Times, des physiciens américains du laboratoire national de Lawrence Livermore, en Californie, ont réussi à générer 2,5 mégajoules d’énergie en bombardant une pastille de plasma d’hydrogène avec le plus grand laser au monde, produisant lui-même seulement 2,1 mégajoules, réalisant ainsi un gain d’énergie de 120 %.

Ce résultat, qui revient à produire plus d’énergie à partir de la réaction de fusion qu’il n’en consomme, a été permis par un procédé appelé « fusion par confinement inertiel », résultant en un gain énergétique net.

  • Le laboratoire a confirmé qu’une « expérience réussie » avait eu lieu, sans pour autant confirmer les résultats, ces derniers faisant actuellement l’objet d’analyses.
  • Si le ministère américain de l’Énergie n’a pas souhaité commenter cette percée scientifique, un discours est prévu demain par la secrétaire d’État à l’Énergie Jennifer Granholm et par la sous-secrétaire d’État à la sécurité nucléaire, Jill Hruby, au laboratoire national Lawrence Livermore1.

Comment est-ce que cela fonctionne : le laser utilisé — National Ignition Facility (NIF) — projette des rayons ultra puissants dans une petite capsule contenant une pastille de combustible de fusion deutérium-tritium. La surface de la pastille chauffe, provoquant une implosion qui croque l’intérieur jusqu’à atteindre la fusion (dans le cas d’une réussite).

Depuis le milieu du XXème s., les physiciens cherchent à exploiter la réaction de fusion qui alimente elle-même le soleil afin de pouvoir fournir une alternative fiable aux combustibles fossiles et à l’énergie nucléaire conventionnelle. Si nous ne verrons probablement pas de centrales électriques à fusion avant plusieurs décennies au moins, cette percée est majeure dans la production, à terme, d’énergie décarbonée.

Celle-ci ne signifie toutefois pas pour autant qu’elle conduira directement à la génération de plus d’énergie qu’il n’en a été initialement injecté dans les lasers : 

  • les lasers NIF ont une efficacité inférieure à 1 %, ce qui signifie que le rendement devrait être 100 fois supérieur pour générer plus d’énergie de fusion que l’énergie réelle entrée dans l’installation ;
  • selon le physicien Gianluca Sarri, cité dans le New Scientist, « si 2,1 mégajoules d’énergie ont été produits par le laser, le NIF a probablement utilisé des dizaines de mégajoules du réseau électrique pour y parvenir »2 ;
  • l’opération utilise du tritium, un isotope de l’hydrogène rare et cher (environ 500 fois plus que l’or) dont l’approvisionnement à large échelle pour produire de l’énergie est plus qu’incertain.

Cette découverte majeure indique que nous pouvons obtenir la fusion nucléaire sur Terre — ce qui était jusqu’alors incertain —, mais ne constitue pas une solution énergétique d’avenir viable à ce stade. Elle sera toutefois présentée comme une réussite permise par l’investissement américain massif (public et privé) dans la recherche. L’Inflation Reduction Act, adopté le 12 août, injecte notamment près de 370 milliards de dollars dans des subventions pour les énergies à faible émission de carbone.

Sources
  1. Tom Wilson, « Fusion energy breakthrough by US scientists boosts clean power hopes », Financial Times, 11 décembre 2022.
  2. Matthew Sparkes, « Nuclear fusion : Has there been a breakthrough and what will it mean ? », New Scientist, 12 décembre 2022.