Luxembourg. Romano Pisciotti (citoyen italien) est poursuivi pénalement aux Etats-Unis. Lors d’un vol entre le Nigéria et l’Italie, il a fait escale en Allemagne où il a été arrêté, puis extradé vers les Etats-Unis (sur la base d’un accord liant l’UE aux Etats-Unis depuis 2010).

La Constitution allemande prévoit une interdiction d’extradition : en principe un citoyen allemand placé dans des circonstances similaires aurait bénéficié de cette protection, et l’extradition n’aurait pas eu lieu. M. Pisciotti considère qu’en refusant de lui faire profiter de cette protection, l’Allemagne l’a discriminé sur la base de sa nationalité, en violation du droit de l’UE.

L’affaire soulève deux questions, celle de la compétence de la Cour et la violation alléguée du principe de non-discrimination par l’Allemagne.

La Cour se considère compétente pour entendre ce litige, car M. Pisciotti, en faisant escale en Allemagne, a usé de son droit de libre circulation, ce qui permet à la CJUE d’établir sa juridiction.

La Cour déclare par la suite qu’en l’espèce, le droit de l’UE ne s’oppose pas à ce qu’une distinction soit établie par un État entre ses citoyens et des ressortissants d’autres Etats membres sur le fondement d’une norme constitutionnelle à condition que cette distinction soit objectivement justifiée et “proportionnée à l’objectif légitimement poursuivi”. En l’espèce, l’objectif est jugé légitime par la Cour : il s’agit d’éviter le risque d’impunité d’une personne ayant commis une infraction pénale. En outre, les autorités allemandes ont laissé l’opportunité à l’Italie d’émettre un mandat d’arrêt européen afin de récupérer M. Pisciotti. Les pouvoirs publics italiens n’ayant délibérément pas usé de ce droit, la procédure d’extradition était donc justifiée et proportionnée.

Perspectives :

  • L’arrêt apporte des clarifications sur les conditions d’application de l’accord entre l’Union Européenne et les Etats-Unis.
  • L’arrêt empêchera probablement le développement d’une pratique de « forum shopping » pour les citoyens européens poursuivis pénalement aux Etats-Unis, ceux-ci auraient pu être tentés de se faire arrêter sur le sol d’un Etat-Membre refusant l’extradition (comme l’Allemagne), dans le but de se prévaloir de cette protection par le truchement du droit européen.

Sources :