La Russie a-t-elle repris l’initiative en Ukraine ?

La chute au profit de Moscou du village d’Avdiivka, dans l’oblast de Donetsk, a été annoncée samedi 17 février par le ministère de la Défense russe. Si ce succès tactique ne devrait pas conduire à un enfoncement significatif de la ligne de front dans l’oblast de Donetsk, il est néanmoins présenté comme une victoire symbolique importante par Moscou.

Depuis la prise d’Avdiivka, l’offensive russe s’est intensifiée sur la ligne de front, notamment à Robotyne, dans l’oblast de Zaporijia.

• Robotyne est un petit village de 3 km² qui ne comptait que quelques centaines d’habitants avant la guerre.
• Il est désormais perçu comme le haut-lieu de la contre-offensive ukrainienne de l’été-automne 2023 car c’est là où l’Ukraine a réussi à percer les premières lignes du dispositif défensif russe dans le sud du pays.
• Si Kiev n’a finalement pas été en mesure d’exploiter cette brèche, les forces ukrainiennes ont depuis conservé le contrôle du village.

Le ministère de la Défense britannique considère que les forces russes ont « très certainement intensifié leurs attaques terrestres sur l’axe de Robotyne »¹. Le porte-parole du groupe stratégique opérationnel ukrainien Tavriia, Dmytro Lykhovii, relevait quant à lui à Robotyne, la semaine dernière, une « concentration russe plus importante en taille » que celle ayant capturé Avdiivka le week-end dernier². Au-delà du village, l’objectif russe est la ville d’Orikhiv, située à une quinzaine de kilomètres au nord.

• Des victoires russes localisées à Avdiivka et potentiellement à Robotyne au cours des prochaines semaines ne sont pour l’heure pas susceptibles d’amorcer une dynamique plus large à l’échelle du front.
• Malgré les propos récents de l’ancien secrétaire à la Défense américain Robert Gates, qui a affirmé mercredi 21 février que la guerre n’était « plus dans une impasse […] les Russes ayant repris l’initiative », la Russie est elle aussi limitée par son industrie³.
• Dans son dernier rapport, l’Economist Intelligence Unit considère que malgré l’avantage considérable dont dispose la Russie sur le front, son niveau élevé de pertes ainsi que ses capacités limitées de production d’obus et de recrutement de main-d’oeuvre « l’empêcheront probablement de s’emparer d’une plus grande partie du territoire ukrainien » à court et moyen terme⁴.

Si la Russie ne semble pas avoir « repris l’initiative » au sens où elle apparaît capable de capitaliser sur des victoires tactiques, l’Ukraine a perdu 33 km² de territoire en janvier — et certainement plus depuis le début du mois de février — après une année 2023 marquée par un changement net quasi-nul du contrôle territorial.