- Depuis le début des années 2000, l’Union a signé plusieurs accords de libre-échange dits de nouvelle génération (ALE). Certains accords — que l’on nomme accords mixtes — ne sont toutefois entrés en vigueur que partiellement, comme celui du CETA avec le Canada, car ils n’ont pas encore été ratifiés par tous les Parlements nationaux et régionaux des États membres de l’Union.
- Alors que l’UE et l’Inde négocient depuis plusieurs années un nouvel accord de libre-échange, les discussions étaient au point mort depuis 2013, après avoir commencé dès 2006. Les négociations avaient notamment échoué sur la question de l’ouverture aux importations du marché indien de l’automobile et de l’alcool, mais aussi sur le statut des travailleurs qualifiés indiens désirant rejoindre l’Europe1.
- En mai 2021, alors que l’Inde subissait de plein fouet une nouvelle vague de Covid-19, les deux parties avaient relancé leur coopération pour aboutir à un accord. Mais ce sont surtout les voyages successifs de Von Der Leyen en Inde en avril et du Premier ministre indien Narendra Modi en Europe en mai dernier qui ont relancé le processus.
- Pour l’Union, le rapprochement avec l’Inde doit permettre de détourner celle-ci de la Russie, alors que New Delhi n’a pas voté pour condamner la Russie le 2 mars dernier à l’Assemblée générale de l’ONU, et que les importations indiennes de pétrole russe ont fortement augmenté depuis le début de l’année, atteignant plus de 800 000 barils par jour au mois de mai — ce qui représente environ 16 % des importations indiennes de pétrole.
- Mais pour les deux parties, il s’agit aussi de s’extraire d’une trop grande dépendance économique vis-à-vis de la Chine. Pékin est devenu le premier partenaire commercial de l’Union en 2020 — 585 milliards de dollars d’échanges, soit 31 milliards de plus que les États-Unis sur la même année —, mais l’Union est fortement déficitaire avec 181 milliards de dollars d’exportations de moins que celles de la Chine. Pékin est également l’un des premiers partenaires commerciaux de l’Inde, le marché chinois étant le troisième marché pour les exportations indiennes, et le premier pour les importations.
- L’Inde développe depuis le début de l’année une diplomatie commerciale intense visant à se détourner de la Chine. Outre ces négociations d’accord de libre-échange avec l’Union, l’Inde espère conclure un accord commercial avec le Royaume-Uni avant la fin de l’année 2022, et a déjà signé deux nouveaux accords commerciaux avec les Émirats arabes unis — quatrième partenaire commercial de l’Inde en 2020 — et l’Australie au début de l’année.
- Ce nouvel accord de libre-échange, qui doit être conclu avant la fin de l’année 2023, constituera également un test pour les nouvelles règles européennes liées au développement durable dans les accords commerciaux. Dans la nouvelle approche présentée le 23 juin dernier par Valdis Dombrovskis, le vice-président exécutif de la Commission, l’UE a dévoilé un nouveau mécanisme de mise en œuvre des chapitres présents dans les accords commerciaux portant sur le commerce et le développement durable (CDD). Ces nouveaux mécanismes prévoient notamment la mise en place de sanctions pour les partenaires commerciaux en cas de non-respect de l’Accord de Paris sur le climat ou bien des principes fondamentaux de l’OIT, et offrent également une place plus importante à la société civile2.
Sources
- Kiran Sharma, « India, EU resume free trade talks after near-decade freeze », Nikkei Asia, 27 juin 2022.
- János Allenbach-Ammann, « L’UE entend renforcer le respect des règles liées au développement durable dans les accords commerciaux », Euractiv, 23 juin 2022.