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Key Points
  • Le siège de Kiev se met en place, lentement. La progression des troupes russes correspond, pour comparaison, à la situation où, autour de Paris, la 39e Armée serait entre Mantes-la-Jolie et Chartres, la 41e stoppée devant Amiens et la 20e devant Reims. L’enveloppement de Kiev est donc encore loin d’être achevé, sans parler de son investissement.
  • Marioupol connaît un siège similaire à celui de Kharkiv. L’effort de jonction entre la 1ère ABG à Kharkiv et la 8e Armée à Louhansk s’est soldée par un échec.
  • Les problèmes de commandement et de réseau de transmissions montrent qu’on est loin de l’art opératif pourtant brillamment théorisé de l’école russe. L’arrivée de forces depuis toute la Russie témoigne une nouvelle fois de la sous-estimation initiale des moyens nécessaires.

La version d’hier est disponible ici. L’archive des analyses quotidiennes de Michel Goya est disponible à ce lien.

Situation générale

La situation générale reste inchangée par rapport à hier, à l’exception de la présence possible de forces russes à Poltava, ce qui signifierait que la 1ère ABG est à mi-chemin entre Kharkiv et le Dniepr. Si c’est le cas, elle menacerait ainsi d’encerclement les forces ukrainiennes présentes dans le Donbass.

En mer, il faut signaler la destruction de la frégate Hetman Sahaidachny, bâtiment principal de la flotte ukrainienne, dans le port de Mykolayiv situé entre Kherson et Odessa. L’origine de la destruction est inconnue mais ressemble à un sabotage.

Dans les airs, la situation demeure inchangée. La menace des batteries S300 imposant des restrictions d’emploi des forces aériennes russes (vol très basse altitude, moins efficace) plane toujours. Ainsi, plusieurs Interceptions de missiles russes sur Kiev par des batteries S300 ont été réussies.

Les pertes aériennes établies s’élèvent à ce jour à 2 hélicoptères Ka-52 et Mi-35, 1 avion de transport An-26, 1 chasseur Su-30 du côté russe et 1 avion de transport An-26, 1 avion d’attaque Su-25 et 1 chasseur Su-27 du côté ukrainien. Plusieurs chasseurs Mig-29 ont été détruits au sol et sont sans doute déjà inutilisables.

Zone Kiev

L’enveloppement de la capitale se poursuit. Les opérations russes sont très lentes, freinées par la résistance ukrainienne. Seule la 36e Armée est toujours au contact. Elle est également signalée à Jitomyr, à 70 km de Kiev. Les 41e et 20e armées sont toujours bloquées. Par comparaison, la progression des troupes russes correspond à la situation où, autour de Paris, la 39e Armée serait entre Mantes-la-Jolie et Chartres, la 41e stoppée devant Amiens et la 20e devant Reims. L’enveloppement de Kiev est donc encore loin d’être achevé, sans parler de son investissement.

Zone Kharkiv

Dans la deuxième ville du pays, les phases de bombardement et d’assaut se succèdent. La moitié de Kharkiv est aujourd’hui peut-être conquise. Des pointes offensives sont à confirmer hors de la ville en direction de Louhansk et de Poltava.

Zone Sud-Est

Marioupol connaît un siège similaire à celui de Kharkiv. L’effort de jonction entre la 1ère ABG à Kharkiv et la 8e Armée à Louhansk s’est soldée par un échec. Malgré la saisie de la centrale nucléaire, la 58e Armée n’enregistre qu’une faible progression vers Zaporijia.

Zone Sud-Ouest

La progression russe continue vers Mykolayiv, au nord de Kherson, avec peut-être une tentative d’assaut aérien.

Perspectives

Les normes opératives de combat urbain de ville sont défendues, avec une importante densité de forces, et varient selon la taille des cibles. Pour des villes de la taille de Kherson ou de Chernihiv, les combats se compteront en jours. Pour des agglomérations du type de Marioupol ou Kharkiv, en semaines. Pour Kiev, en mois.

Les normes de progression en terrain urbain sont plutôt soutenues. Les Russes sont pour l’instant en dessous de la norme de l’avancée des Américains à Falloujah en novembre 2004 (1 km/jour). Il s’agit donc d’un rythme rapide, mais il faut songer que la largeur de Kharkiv est de 10 kilomètres, celle de Kiev de 30.

Au plan de la gamme tactique, le rapport de forces sur les points de combat ne se mesure pas en volumes (équivalents, et jamais au-delà de 2 contre 1), mais en différence de niveaux de qualité de groupements tactiques, sur une échelle de 1 (nul) à 10 (ce qui se fait de mieux au monde).

Les compétences moyennes sont équivalentes, avec des variations fortes d’une unité à l’autre. La supériorité aérienne, d’artillerie et en densité blindée russe compense un manque moyen de motivation. Le terrain urbain et la motivation compensent le manque de moyens lourds du côté ukrainien.

Pour obtenir des victoires nettes, il faut au moins deux niveaux de qualité d’écart. Cela n’arrive que rarement, ce qui implique des combats souvent indécis, lents, et avec des pertes équivalentes – jusqu’ici, plutôt à l’avantage des Ukrainiens.

Il est logique que les meilleurs résultats obtenus par les Russes soient le fait des troupes d’élite (unités aéromobiles), mais aussi au prix d’une grande usure. Le général Suhovetsk, commandant de la 7e division d’assaut aérien a ainsi été tué, probablement à Kherson.

L’emploi des forces par les Russes ne cesse d’étonner. On note une dispersion des efforts – par exemple dans le Sud où les forces sont engagées simultanément sur trois axes – qui passe par un type d’engagement par GTIA isolés, avec des manœuvres simples et peu d’initiative, mais pas par brigades complètes coordonnées.

Les problèmes de commandement et de réseau de transmissions montrent qu’on est loin de l’art opératif pourtant brillamment théorisé de l’école russe. L’arrivée de forces depuis toute la Russie témoigne une nouvelle fois de la sous-estimation initiale des moyens nécessaires.