Washington. Robert Lighthizer est le représentant au commerce dans l’administration Trump. Ce vétéran de la politique de 71 ans a servi le parti Républicain à diverses instances depuis la fin des années 70, tout en pratiquant le droit du commerce au sein du très influent cabinet d’avocat Skadden Arps1 .

Son métier d’avocat, notamment au service de l’industrie sidérurgique américaine et son engagement politique l’ont amené à défendre une vision volontiers protectionniste de la politique commerciale : selon lui, le protectionnisme est même une composante essentielle de l’ADN conservateur américain2 .

Contrairement à beaucoup de ses collègues républicains, farouchement favorables au libre commerce lorsque Trump n’était pas président, Robert Lighthizer défend depuis 2011 déjà une position sans concession face à la Chine3 .

Pourquoi faut-il retenir le nom de Robert Lighthizer ? Car il est la cheville ouvrière de la politique commerciale de Trump. Alors que Peter Navarro, le véhément conseiller au commerce auprès de Donald Trump, récolte l’attention et les interviews TV, c’est bien Robert Lighthizer qui mènera la délégation américaine lors des 90 jours de négociations décidés au G20 de Buenos Aires en décembre dernier afin de résoudre le conflit commercial sino-américain.

De plus, le représentant au commerce aurait  l’oreille du président américain et serait même pressenti comme futur chef du personnel du président4 . Il va donc jouer un rôle clé cette année à la fois dans les négociations sino-américaines, mais aussi et surtout dans la réforme en cours de l’OMC.

Robert Lighthizer a déjà  été le maître d’orchestre des négociations autour de la refonte du NAFTA (North American Free Trade Agreement) conclues en septembre dernier. Si cette refonte a été majoritairement cosmétique, deux dispositions inédites dans ce nouvel accord clarifient les ambitions du négociateur américain : l’une menace les constructeurs automobiles d’une taxation supérieure s’ils ne rapatrient pas les emplois sur le sol américain et l’autre rend plus difficile la possibilité d’accords bilatéraux avec la Chine5 .

Son attitude vis-à-vis l’OMC est ambivalente. D’un côté, il milite pour la liberté américaine de recourir à la Section 301 du Trade Act de 1974, c’est à dire pour  la possibilité donnée au président américain de modifier unilatéralement les accords commerciaux jugés injustes ou inefficaces. C’est tout à fait contre l’esprit multilatéral qui a présidé à la création de l’OMC. De l’autre, le rapport que son administration a publié en mars dernier pour justifier le recours à la section 3016 est la base d’une stratégie qui vise non pas à détruire l’institution, mais à la changer de l’intérieur en rétablissant la légitimité de l’action bilatérale et en démontrant l’échec de l’OMC à réguler des pratiques illicites chinoises.

Robert Lighthizer restera donc peut être discret cette année tout comme il pourrait aussi redéfinir les règles du commerce mondial et gagner une victoire aussi bien économique que symbolique sur le multilatéralisme hérité des années 1990. En ce sens, il est peut être le plus efficace des néo-nationalistes.

Perspectives :

  • Robert Lighthizer est le représentant au commerce dans l’administration de Donald Trump et va mener la délégation américaine dans les négociations sino-américaines.
  • Il est un partisan de longue date d’une approche bilatérale de la politique commerciale. Il est celui qui a fait le plus pour renforcer la position américaine face à la Chine.
  • Sa stratégie semble passer par la délégitimation de l’OMC, accusée d’inaction face aux pratiques frauduleuses de la Chine.

Sources :

  1. LIGHTHIZER Robert, The venerable history of protectionism, The New York Times, 6 mars 2008.
  2. LIGHTHIZER Robert, Donald Trump is no liberal on trade, Washington Times, 9 mai 2011.
  3. Office of the USTR, Findings of the investigation into China’s acts, policies, and practices related to technology transfer, intellectual property, and its innovation under section 301 of the trade act of 1974, 22 mars 2018.
  4. Office of the USTR, United States Trade Representative Robert E. Lighthizer.
  5. PETERSON Matt, The Making of a Trade Warrior, The Atlantic, 29 décembre 2018.
  6. TRUSH Glenn, As China Talks Begin, Trump’s Trade Negotiator Tries to Keep President From Wavering, The New York Times, 1er Janvier 2019.

Cyprien Batut