Madrid. Lors des élections régionales andalouses du 2 décembre 2018, la formation politique d’extrême droite Vox, née en 2013 et dirigée par Santiago Abascal, a récolté plus de 391 000 voix (10,9 pour cent), obtenant ainsi 12 députés (3). Alors qu’aucun sondage n’avait prédit de tels résultats, leur irruption dans le parlement régional a secoué le paysage politique espagnol. L’hécatombe du PSOE, qui dirigeait la Junte d’Andalousie seul ou en coalition depuis sa création en 1982, ouvre la possibilité aux partis de droite de former une coalition pour gouverner la communauté. Cependant un accord tripartite entre PP (20,75 pour cent), Ciudadanos (18,27 pour cent) et Vox semble encore difficile.

« La Reconquista – allusion à la reconquête des catholiques sur les musulmans entre les VIIIe et XVe siècles dans la péninsule Ibérique – commence en terre andalouse et va s’étendre à toute l’Espagne » a affirmé le représentant de Vox lors de la victoire. Les axes qui ont articulé le discours ce parti lors de la campagne sont très clairs : nationalisme espagnol, anti-indépendance, messages contre l’immigration, la loi de la mémoire historique et la loi contre la violence masculine ; en plus des éloges constants aux forces de sécurité et à l’armée (1). Le retour de ces thématiques, absentes de la vie politique espagnole depuis 1982, date à laquelle Blas Piñar, proche de l’idéologie franquiste a laissé son siège de député, semble une première pour la démocratie espagnole (3). Un tel retour inquiète une partie des Espagnols qui a décidé de manifester dès le lendemain des élections andalouses (2). Quand bien même il serait trop tôt pour parler d’une renaissance de l’extrême droite espagnole, Abascal s’est félicité de recevoir 1 000 demandes d’affiliation par jour depuis la victoire andalouse et, par conséquent, envisage de présenter des candidats aux élections des communautés de mai prochain, puis aux européennes et aux municipales des grandes villes espagnoles.

Vox complique tout calcul national et encourage la montée de l’extrême droite européenne. Alors que cette élection se présentait comme un premier test pour le gouvernement socialiste en place depuis juin 2018 après une motion de censure réussie contre le gouvernement populaire de Mariano Rajoy, la débâcle socialiste remet en cause l’augmentation de la popularité de Pedro Sanchez, chef du gouvernement. Le risque serait pour ce dernier que la tendance andalouse se confirme au niveau national, permettant ainsi au PP, à Ciudadanos et à Vox de gouverner en formant une coalition alliant leurs petits scores électoraux (2). S’agissant des élections européennes de mai 2019, Vox s’est déjà dit favorable à participer main dans la main avec des ultraconservateurs européens tels que le Premier ministre hongrois Viktor Orbán ou le Rassemblement National français (5).

Sources :

  1. AMÓN Ruben, Why Vox really is a far-right party, El País, le 5 décembre 2018.
  2. ARROYO Javier, MORA Antonio, Miles de personas protestan contra Vox en varias capitales andaluzas, El País, le 4 décembre 2018.
  3. L’Espagne se croyait “vaccinée” contre l’extrême droite, l’Andalousie lui donne tort, Courrier International, le 3 décembre 2018.
  4. Espagne : La fin de l’exception antifasciste, Politis, le 5 décembre 2018.
  5. SANHERMELANDO Juan, Los ultras europeos esperan a Vox con los brazos abiertos : « Seremos mucho más fuertes », El Español, le 9 décembre 2018.

Benjamin Frieyro