Washington. Le voyage du premier ministre italien Giuseppe Conte à Washington afin d’y rencontrer le président américain Donald Trump intervient à un moment crucial des relations transatlantiques. D’un point de vue européen, le premier ministre Conte, symbole d’un gouvernement ouvertement populiste, s’est rendu à la Maison-Blanche dans un esprit de continuité et de rupture. La rupture est évidente puisque l’Italie est la première puissance européenne gouvernée par un exécutif similaire à la vision du monde de Trump, notamment en ce qui concerne les migrants (4). Ce point de vue est souvent en contradiction avec celui, par exemple, de la chancelière allemande Angela Merkel ou du président français Emmanuel Macron. Conte avait donc l’intention de proposer Rome comme un pont idéologique entre les deux rives de l’Atlantique, un fait certainement bien accueilli par Trump qui a qualifié le Premier ministre italien de « nouvel ami » (3).

La continuité, d’autre part, est liée au fait que Rome, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, a considéré les États-Unis comme une référence dans sa politique étrangère, capable de lui assurer le soutien nécessaire à la poursuite de ses intérêts nationaux, surtout dans le théâtre européen et méditerranéen. En ce sens, la Libye a été l’une des principales questions au centre du sommet et une victoire pour l’Italie qui a obtenu le soutien des États-Unis sur sa position, en concurrence avec celle de Paris (1).

Pour sa part, Trump a cherché à profiter de l’occasion pour faire avancer son programme commercial. Une attention particulière a été accordée au secteur de l’énergie, où le président n’a pas rencontré de résistance de la part du premier ministre face à l’augmentation des importations européennes de gaz de schiste américain. Les points de convergence étaient également les sanctions contre la Russie, actuellement considérées comme définitives, et la construction du gazoduc transadriatique, qui réduirait la dépendance énergétique de l’Europe à l’égard de Moscou.

Perspectives :

  • La proximité idéologique actuelle entre les gouvernements des États-Unis et de l’Italie est un facteur important dans la propagation du populisme en Europe (2). En effet, le soutien de Trump au gouvernement Conte est à l’heure actuelle une condition nécessaire, quoique insuffisante, pour permettre à Rome de défendre ses intérêts sur la scène continentale et régionale, et donc de montrer aux forces politiques et à l’opinion publique étrangère la crédibilité du populisme dans la poursuite de ses objectifs.
  • Cependant, à long terme, le populisme comme ciment entre Rome et Washington n’influencera pas la continuité de la relation bilatérale, basée sur une solide alliance stratégique. Bien qu’avec la fin de la guerre froide le rôle des États-Unis en Europe ait diminué, l’Italie continuera à se tourner vers la puissance transatlantique pour affirmer sa voix sur la scène internationale, notamment comme un équilibre, si nécessaire, face au « moteur » franco-allemand de l’Union européenne.

Sources :

  1. FETOURI Mustafa, Italian-French competition over Libya pushing country toward more chaos, Al-Monitor, 26 juillet 2018.

2. MARCHETTI Silvia, Giuseppe Conte : Trump’s most useful friend in Europe, CNN, 30 juillet 2018.

3. Remarks by President Trump and Prime Minister Conte of Italy in Joint Press Conference, White House, 30 juillet 2018.

4. THOMAS Ken, Trump, Conte express alignment on immigration at White House, Associated Press, 30 juillet 2018.