Numérique

Long format

Né des profondeurs d’algorithmes lointains, un nouveau régime structure l’espace public. Des messages différents, des moments différents, des cibles différentes  : à l’ère d’Internet et des réseaux, le règne des plateformes crée les conditions d’une polarisation politique et d’une ascension aux extrêmes. Comment retrouver une unité pour le débat, pour la délibération en démocratie  ? Une perspective signée Jean-Louis Missika et Henri Verdier.

Depuis le 11 septembre 2001, un arsenal juridique inédit par son ampleur entreprend d’institutionnaliser dans les démocraties libérales occidentales un édifice de surveillance généralisée fondé sur les nouvelles technologies numériques. Celles-ci donnent les moyens à des États affaiblis d’entrer à peu de frais dans une nouvelle ère  : celle de l’information totale au service d’une doctrine contre-insurrectionnelle dont les dispositifs — désormais automatisés — sont devenus invisibles.

La monnaie numérique chinoise est-elle sur le point de faire concurrence au dollar  ? Si la Chine de Xi Jinping ne pourra raisonnablement afficher cette ambition que dans un horizon de dix à trente ans, elle entend bien, à terme, faire de son e-yuan la monnaie de référence des transactions numériques — et l’utiliser comme un nouveau moyen d’exercer un contrôle sur sa population.

La crise que connaissent les actifs numériques depuis la chute de FTX est-elle le signe de la fin d’un effet de bulle ou augure-t-elle simplement d’une reconfiguration du marché  ? S’il faut relativiser son importance en termes quantitatifs, une leçon importante doit être retenue  : cet effondrement a touché en premier lieu une nouvelle génération d’investisseurs — les épargnants de demain.

De nouvelles luttes, de nouveaux fronts  : comment les technologies préparent-elles l’affrontement global de demain  ? Les alliances deviennent des instruments  ; les dépendances, des armes  : la puissance se transforme. La bataille que se livrent la Chine et les États-Unis pour des points nodaux ou des matériaux critiques renvoie à la possibilité de la guerre — tout court.

L’IA bouleverse profondément nos sociétés — à un rythme inédit. Une frénésie de l’innovation qui s’oppose à l’exigence de temps long du politique et complexifie l’élaboration de stratégies numériques durables. Afin de prendre la pleine mesure des transformations à l’œuvre, il faut s’armer d’outils appropriés qui restent largement à inventer alors que la quantification de l’état d’avancement de cette nouvelle technologie devient de plus en plus complexe du fait de sa géopolitisation croissante et des changements technologiques incessants qu’elle induit.

«  Je recommande de voter pour un Congrès républicain  » vient de déclarer le nouveau propriétaire de Twitter à ses quelques 114 millions d’abonnés. À l’ère Musk, que reflèteront vraiment les élections de mi-mandat qui se tiennent aujourd’hui aux États-Unis  ? Probablement un mélange d’aspirations politiques et de représentations, irriguées par des plateformes dont nous avons perdu collectivement le contrôle, et qui nous exposent en tant qu’individus. Dans ce riche entretien, Bernard Harcourt nous rappelle un impensé de l’ADN américain  : toute expression libre a un prix.

Qu’est-ce qui change lorsque tout change  ? Pour comprendre ce qu’il y a de nouveau avec l’essor des technologies, il faut s’extraire des débats sur la régulation de l’industrie et s’éveiller à la radicalité de son potentiel transformateur sur l’imaginaire. Derrière la dimension insaisissable de cette rupture, cette perspective essaye de trouver des points d’appui pour s’orienter dans ce grand glissement.

L’offre de rachat de Twitter par Elon Musk a provoqué de nombreuses réactions sur le risque que la concentration des moyens de communication fait peser sur nos démocraties. À travers une analyse historique de l’évolution de nos systèmes de contrôle et de gouvernance des monopoles, l’écrivain Barry Lynn propose dans cet entretien de repenser l’application des règles de la concurrence et plaide pour un réinvestissement dans nos capacités de production.