Aujourd’hui, mardi 21 janvier, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a prononcé un discours particulièrement attendu à Davos. Elle a notamment déclaré que les règles du « jeu géopolitique » avaient changé, et que l’Union devait s’adapter à une nouvelle approche fondée sur les rapports de force.

  • Von der Leyen a déclaré : « Au cours des 25 dernières années, l’Europe a tiré parti de la croissance du commerce mondial pour stimuler sa propre croissance. Elle a également bénéficié de l’énergie bon marché de la Russie et a trop souvent externalisé sa propre sécurité. Mais cette époque est révolue ».
  • Dans ce contexte, l’Union devrait adapter son économie pour gagner en compétitivité, renforcer son activité sur les marchés des capitaux — ce qu’elle a qualifié d’impératif — et trouver un nouveau modèle énergétique. Concrètement, cela signifie accélérer le développement des énergies renouvelables, mais aussi, « dans certains pays », celui de l’énergie nucléaire.

La prise de parole intervient le lendemain de l’investiture de Donald Trump. Dans son discours prononcé hier au Capitole, le nouveau président américain a notamment promis de faire entrer les États-Unis dans un nouvel « Âge d’or », marqué par la souveraineté et l’identité américaine, ainsi que par les avancées technologiques.

  • Von der Leyen a déclaré que les deux blocs bénéficiaient d’une relation commerciale ouverte : « Le volume de nos échanges s’élève à 1 500 milliards d’euros, ce qui représente 30 % du commerce mondial », a-t-elle rappelé. Elle a souligné que les entreprises européennes emploient plus de 3,5 millions d’Américains, et que 1 million d’emplois supplémentaires dépendent des échanges commerciaux avec l’Europe.
  • Selon von der Leyen, l’Union est prête à s’engager rapidement et à négocier avec la nouvelle administration américaine, mais pas à n’importe quel prix : « Nous serons pragmatiques, mais nous resterons toujours fidèles à nos principes. Protéger nos intérêts et défendre nos valeurs : telle est la voie européenne ».

Von der Leyen ne s’était pas exprimée en public depuis qu’elle avait contracté une pneumonie « grave » en début d’année. 

  • En son absence, la Commission a tenté timidement de communiquer sa position sur les questions clefs soulevées par Trump, telles que le risque de l’imposition de droits de douane supplémentaires et les ambitions territoriales des États-Unis concernant le Groenland — qui appartient au Danemark.

Depuis que Donald Trump a remporté l’élection présidentielle en novembre, la présidente de la Commission n’a pas eu de communication directe avec lui. Lundi 20 janvier, son équipe a déclaré que des « tentatives » avaient eu lieu pour organiser une rencontre, sans toutefois donner de date précise.

  • Il est possible que Trump tente de mettre à l’écart les hauts responsables européens, notamment von der Leyen, dans sa manière de traiter l’Union européenne afin de négocier directement avec les États membres. Aucune des principales institutions de l’Union, y compris le président du Conseil européen, António Costa, et la haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Kaja Kallas, n’a eu de contact avec l’administration américaine.
  • Ce manque de communication marque un sérieux coup d’arrêt dans les relations entre Bruxelles et Washington. Von der Leyen bénéficiait d’un accès direct à la Maison-Blanche sous la précédente administration démocrate et son puissant chef de cabinet, Bjoern Seibert, travaillait en étroite collaboration avec Jake Sullivan, l’ancien conseiller à la Sécurité nationale. Cette relation s’est avérée essentielle dans l’élaboration des sanctions communes au début de l’invasion russe de l’Ukraine en 2022.
  • Dans un entretien paru dans la revue, l’ancien commissaire européen Thierry Breton a prévenu que l’équipe de von der Leyen risquait d’être ignorée par la nouvelle administration, ce qui placerait la Commission dans une position délicate.
  • La Première ministre italienne, Giorgia Meloni, est la dirigeante européenne ayant le plus communiqué avec le président Trump, aux côtés du hongrois Viktor Orbán. Elle est par ailleurs la seule dirigeante de l’Union à avoir été invitée à l’inauguration du président américain.
  • Interrogée sur le fait de savoir si von der Leyen et Meloni avaient coordonné leurs messages en prévision de la cérémonie, la principale porte-parole de la Commission, Paula Pinho, a déclaré le 20 janvier que les deux dirigeantes avaient « échangé, mais qu’il n’y avait pas de message particulier » à transmettre.

Dans son discours, von der Leyen a également défendu l’Accord de Paris (que le président Trump vient de quitter pour la deuxième fois) et le modèle commercial européen, fondé sur des règles, en soulignant l’accord récemment signé avec le Mexique et l’ouverture des négociations avec la Malaisie.

  • Concernant Pékin, von der Leyen a déclaré que l’Union poursuivra sa politique de « de-risking », tout en insistant sur le fait qu’il était temps « de poursuivre une relation plus équilibrée avec la Chine, dans un esprit d’équité et de réciprocité ».
  • Toutefois, en signe d’ouverture, von der Leyen a également assuré que les relations commerciales avec la Chine pourraient être étendues si Pékin respecte les conditions de réciprocité.