Jusqu’au 1er juin, la démocratie la plus peuplée au monde est appelée aux urnes. Comment le pouvoir autoritaire de Modi compte-t-il rester en place à la tête d’une puissance qui devient l’une des plus disputées au monde ? Pour suivre ce scrutin et ses implications, nous avons fait appel au spécialiste Christophe Jaffrelot pour nous aider à coordonner une série de publications ce printemps. Pour les suivre, pensez à vous abonner au Grand Continent
Il y a un mystère Modi. Comment le ministre en chef d’un État a-t-il pu à la fois mettre au point une méthode et un style de gouvernement pour asseoir son autorité au Gujarat puis les transposer — presque directement et avec les mêmes leviers d’action — à l’échelle nationale de l’Inde ? C’est l’histoire et les ressorts de ce changement d’échelle que nous présenterons dans cet article et qui sont au cœur de notre dernier ouvrage Gujarat Under Modi 1.
Moditva : les cinq piliers du laboratoire gujarati de Modi
La polarisation religieuse permettant de mobiliser la communauté hindoue — majoritaire — a été le premier pilier de la politique de Modi au Gujarat, qu’il devait transposer au niveau national après 2014. Cette approche n’était pas nouvelle dans l’État, mais elle a pris une ampleur sans précédent sous Modi. Alors que cette forme de polarisation avait traditionnellement été favorisée par des émeutes entre hindous et musulmans dès les années 1960, en 2002, elle a résulté d’un pogrom. Le fait que le BJP ait pu remporter les élections de l’État dans ce contexte très spécifique, alors qu’il avait enregistré plusieurs revers électoraux depuis 2000, a montré que la polarisation « fonctionnait » politiquement, comme l’avaient prévu les dirigeants du parti BJP dans l’État, les circonscriptions les plus touchées par les violences ayant aussi été celles où le parti l’emporta à travers l’État. Par la suite, cette polarisation est restée un facteur majeur de la stratégie du gouvernement mais sur un autre mode, aucune émeute majeure n’ayant eu lieu au Gujarat depuis 2002. C’est par une véritable politique de la peur que la polarisation entre hindous et musulmans a été entretenue : les exécutions extrajudiciaires de présumés terroristes islamiques soit disant soutenus par le Pakistan et accusés de viser le ministre en chef lui-même ont contribué à perpétuer la peur de l’« autre » et la stigmatisation des musulmans.
Sous la direction de Giuliano da Empoli.
Avec les contributions d’Anu Bradford, Josep Borrell, Julia Cagé, Javier Cercas, Dipesh Chakrabarty, Pierre Charbonnier, Aude Darnal, Jean-Yves Dormagen, Niall Ferguson, Timothy Garton Ash, Jean-Marc Jancovici, Paul Magnette, Hugo Micheron, Branko Milanovic, Nicholas Mulder, Vladislav Sourkov, Bruno Tertrais, Isabella Weber, Lea Ypi.
Après 2014, la polarisation est restée l’atout maître de Modi dans le cadre de la politique nationale. S’il y a eu peu d’épisodes de violence de masse — les émeutes de Delhi en 2020 étant les plus importantes — d’autres formes de violence, de basse intensité mais constantes, y compris le lynchage de musulmans, sont devenues la règle. En outre, la stigmatisation de l’« autre » s’est exprimée dans des campagnes récurrentes — contre le « Love Jihad », contre la conversion, au nom de la protection des vaches —, sans parler de la transformation du cadre juridique par le biais d’un amendement à la loi sur la citoyenneté — selon lequel les réfugiés musulmans du Bangladesh, du Pakistan et de l’Afghanistan ne peuvent prétendre à la citoyenneté indienne — ou des lois rendant les mariages interreligieux et les conversions presque impossibles.
La désinstitutionnalisation de l’État de droit a été le deuxième instrument de l’arsenal de Modi au Gujarat. C’était d’abord là l’effet induit des événements de 2002, mais c’est devenu une stratégie visant à renforcer le contrôle politique du chef du gouvernement sur l’appareil d’État. Ce processus s’est traduit par la communalisation des institutions de l’État : les policiers qui avaient pris part aux violences anti-musulmanes ont été récompensés, et le gouvernement a veillé à ce qu’aucune procédure judiciaire ne soit engagée à leur égard — tandis que les policiers qui avaient essayé de faire leur devoir ont été placardisés ou poursuivis sous un prétexte ou un autre, certains d’entre eux étant toujours en prison.
Mais l’État de droit a été mis à mal de bien d’autres manières et pour d’autres raisons sous Modi. Les groupes d’autodéfense nationalistes hindous, dont le Bajrang Dal, ont ainsi été autorisés à exercer des formes de police culturelle en recourant à l’intimidation et même à la violence physique à l’encontre de ceux qui s’opposaient aux nationalistes hindous et à leur vision du monde. Les musulmans ont été les premiers visés par les campagnes de lutte contre le « love jihad » ou le « land jihad », des militants nationalistes hindous veillant d’une part à ce que des hommes musulmans n’approchent pas de femmes hindoues qu’ils pourraient séduire et convertir et d’autre part à ce que des musulmans ne viennent pas s’installer dans des quartiers mixtes — aggravant ainsi les processus de ghettoïsation.
En outre, au lieu de renforcer des institutions clefs telles que la police et le système judiciaire, le gouvernement de l’État a laissé de nombreux postes vacants. La criminalité et la corruption sont donc restées à un niveau très élevé, et ces deux fléaux ont continué à frapper la police ainsi que les partis politiques, y compris le BJP, le gouvernement BJP détournant la loi lui-même en s’engageant dans des formes illicites de surveillance dont témoigne la mise sur écoute des leaders de l’opposition.
Après 2014, la désinstitutionnalisation de l’État de droit a été l’une des principales priorités du Premier ministre Modi, comme en témoigne la façon dont les policiers de son entourage au Gujarat l’ont suivi à Delhi, tandis que des officiers d’esprit indépendant ont été délogés de postes clefs au sein du Central Bureau of Investigation et d’autres institutions. Si le gouvernement Modi n’a pas modifié la procédure du Collegium utilisée pour sélectionner les juges de la Cour suprême, les avocats favorables au BJP — qui étaient parfois proches de Modi et d’Amit Shah au Gujarat — ont été promus au Centre, tandis que ceux qui n’étaient pas dignes de confiance aux yeux du gouvernement n’ont pas été nommés, même après que le Collegium les eut désignés à plusieurs reprises. Enfin, des techniques de surveillance ont été adoptées, comme au Gujarat, surtout après qu’Amit Shah devienne ministre de l’intérieur du gouvernement indien en 2019.
Un troisième trait caractéristique de la politique de Modi au Gujarat réside dans ses politiques économiques et sociales. Dans un État connu pour son dynamisme industriel, le monde des affaires ne pouvait être négligé — et Modi n’avait d’ailleurs pas l’intention de l’ignorer. Au contraire, il s’est employé à attirer les investisseurs. Sa politique à cet égard contrastait toutefois avec celle de ses prédécesseurs : au lieu de capitaliser sur l’esprit d’entrepreneuriat des Gujaratis qui avait donné naissance à un réseau dense de PME, il a promu des mégaprojets en courtisant les grandes entreprises indiennes, séduites par toutes sortes d’avantages et de concessions, dans les zones économiques spéciales (ZES) et en dehors de celles-ci – qu’il s’agisse de prêts à taux bonifié, d’exonération fiscale ou du prix des terrains. Modi lui-même a qualifié le Gujarat de « zone économique spéciale de l’Inde » 2. En retour, certains de ces hommes d’affaires, dont Gautam Adani, ont soutenu Modi dès 2002. On a alors assisté à la formation d’un capitalisme de connivence dont seules ont bénéficié quelques grandes entreprises prêtes à financer le BJP en échange d’un traitement de faveur.
Parallèlement, le gouvernement Modi a investi davantage dans les infrastructures (routes, ports, énergie) et la pétrochimie que dans les dépenses de développement, notamment la santé et de l’éducation. Ces secteurs de l’économie — l’énergie et la pétrochimie surtout — étaient hautement capitalistiques et ont donc créé peu d’emplois. Les inégalités se sont accrues en raison de la stagnation des revenus des urbains et, plus encore, dans les zones rurales où les cultures de rente — monopolisées par les grands exploitants — ont été encouragées, alors que les petits paysans étaient à la traîne.
Le troisième trait caractéristique du Gujarat était donc une économie politique fondée sur le capitalisme de connivence et la polarisation sociale. Ces deux formules s’appliquent à l’ensemble de l’Inde depuis 2014, suggérant que, contre toute attente, l’économie politique d’un État particulier pouvait être étendue à l’échelle d’un pays-continent. La politique économique suivie par l’actuel gouvernement indien est clairement favorable aux milieux d’affaires — comme en témoignent les mesures fiscales prises en leur faveur dès 2015 — et le capitalisme de connivence est plus que jamais à l’ordre du jour. Gautam Adani, qui a connu une ascension fulgurante dans le Gujarat de Modi, a ainsi poursuivi son ascension dans l’Inde de Modi.
De même, le fossé entre les riches et les pauvres s’est creusé, en partie parce que les villageois subissent de plein fouet les politiques gouvernementales, qu’il s’agisse des paysans sans terre — qui ne bénéficient pas autant du programme de garantie de l’emploi rural que sous Manmohan Singh — ou des agriculteurs — qui ne vendent pas leurs produits à des prix suffisamment rémunérateurs.
Les politiques de Modi en faveur des riches ont favorisé la classe moyenne au détriment non seulement de la paysannerie, mais aussi des citadins pauvres, tant au Gujarat que dans l’ensemble de l’Inde après 2014. La modernisation des villes — comme en témoigne la manière dont Ahmedabad a été transformée — reste à l’agenda, ainsi que le projet Central Vista à Delhi.
Le quatrième trait distinctif de la politique de Modi au Gujarat est probablement le plus évident : son style, qui s’est traduit par une forte personnalisation du pouvoir. L’une des raisons du succès politique de Modi réside en effet dans sa capacité à saturer la sphère publique en utilisant des moyens de communication sophistiqués et en maintenant un état de mobilisation politique quasi permanent. L’image et le message ainsi projetés ont permis au ministre en chef de se présenter comme l’incarnation du Gujarat face au pouvoir central et à la famille Nehru-Gandhi. Contrairement à la tradition de collégialité du BJP qu’avaient cultivée Vajpayee et Advani, Modi s’est progressivement emparé de tous les pouvoirs au sein du gouvernement et de son parti. Il s’est émancipé du RSS, son alma mater, en s’appuyant sur la bureaucratie — après avoir promu des fonctionnaires qui ont fini par faire partie du noyau dur de l’administration du Gujarat — et en s’adressant directement à la population.
D’un point de vue de théorie politique, le style de Modi au Gujarat s’apparente à du populisme. Modi a en effet eu recours à des techniques de mobilisation typiquement populistes en court-circuitant les corps intermédiaires — y compris son parti — pour s’adresser directement aux électeurs depuis la tribune, au moyen d’hologrammes ou sur les réseaux sociaux. Dans le même temps, son discours était également populiste dans la mesure où il se présentait comme une victime de l’establishment et comme le défenseur du peuple gujarati face à une élite basée à Delhi. Ce style n’était pas seulement populiste, mais aussi nationaliste, car les personnes qu’il prétendait représenter étaient les fils du sol — les hindous. Ses ennemis n’étaient pas seulement les dirigeants nationaux, mais aussi leurs représentants cosmopolites, notamment Sonia et Rahul Gandhi, à la tête de ce qu’il appelait « le sultanat de Delhi ». D’où le mot-valise « Moditva », qui condense sa relation personnelle avec le peuple et son idéologie nationaliste hindoue. C’est pourquoi le répertoire que Modi met au point au Gujarat après 2002 relève du national-populisme.
La continuité entre le style politique de Modi avant et après 2014 est frappante. Elle suggère que seuls des ajustements mineurs ont été nécessaires pour passer d’une stratégie menée à l’échelle de l’État à une autre, conduite à l’échelle nationale. Les moyens de communication sont restés les mêmes, ce qui a permis à Modi de s’adresser directement à « son » peuple. Au lieu de parler à 60 millions de Gujaratis, il parle désormais au nom de 1,3 milliard d’Indiens ; au lieu d’adopter le code vestimentaire des paysans du Saurashtra, comme il l’avait fait lors de sa campagne au Kathiawar, il change de costume en fonction de la province qu’il visite. Mais le langage du corps est le même ; le ton général aussi. Plus important encore, les cibles sont les mêmes, qu’il s’agisse du Pakistan et des islamistes — ou des musulmans — ou, sur la scène intérieure, du Congrès et de Nehru — sa bête noire — ainsi que des descendants de ce dernier.
Cette transposition est facilitée par les affinités du Gujarat avec le reste de l’Inde du Nord et de l’Ouest. Dans le Sud et l’Est, où Modi est beaucoup moins populaire, la culture politique dominante est moins propice au type d’hindutva qu’il a pu développer au Gujarat, une province dont l’identité (asmita) est enracinée dans l’hindouisme. Il est plus surprenant que Modi ait pu centraliser et personnaliser le pouvoir au niveau panindien, comme il l’avait fait au niveau de son État. Il a en effet réussi à marginaliser non seulement ses rivaux de la vieille garde du BJP — y compris son ancien mentor, L.K. Advani —, comme il l’avait fait avec Keshubhai Patel et ses collègues, mais aussi les dirigeants du RSS, y compris Mohan Bhagwat. Ces derniers ont pris conscience, à Nagpur comme auparavant à Ahmedabad, qu’ils avaient plus besoin de lui que lui n’avait besoin d’eux, dès lors qu’il avait mis en place sa propre structure de pouvoir parallèle — composée de consultants privés et de « mobilisateurs de votes » — et était devenu remarquablement populaire parmi les fantassins du nationalisme hindou, y compris les militants de base et les cadres intermédiaires du RSS.
Le cinquième pilier de ce laboratoire concerne les contextes sociaux et politiques qui ont rendu possible l’accession au pouvoir de Modi et l’impact de sa politique sur la société du Gujarat. Le BJP a commencé à se développer aux dépens du Congrès lorsque le parti a capitalisé sur le passage du Congrès au BJP des castes supérieures et surtout de la caste dominante que forment les Patels 3. Ce noyau de partisans — qui coïncide avec la classe moyenne du Gujarat — est resté fermement derrière le BJP dans les années 1990. Au cours de son premier mandat de ministre en chef, Modi a en outre réussi à attirer le vote d’une nouvelle catégorie sociale : la « néo classe moyenne ». Ce groupe en voie d’ascension sociale était principalement composé de personnes qui, comme lui, étaient issues des castes inférieures, avaient migré vers les centres urbains et souhaitaient bénéficier de la croissance économique de l’État.
La stratégie politique de Modi reposait, on l’a vu, sur la polarisation sociale : non seulement la partie rurale de l’État était négligée mais les pauvres étaient aussi marginalisés — y compris dans les régions urbaines, de sorte que les villes devenaient « enfin bourgeoises ». Pendant ce temps, les groupes tels que les tribus et les anciens intouchables n’ont pas bénéficié du soutien de l’État auquel ils avaient droit, en partie parce que le gouvernement adhérait à une vision nationaliste hindoue de la société (et du système des castes en particulier). Dans les années 1980, les castes supérieures et les Patels se sont ralliés au mouvement nationaliste hindou afin de résister au programme en faveur des pauvres lancé par les dirigeants du Congrès de l’État et l’hindutva est devenue l’antidote à la discrimination positive, les castes inférieures étant fortement incitées à considérer le musulman comme « l’autre » et à serrer les rangs avec leurs coreligionnaires de l’élite sociale.
Comme dans le Gujarat post-Congrès, le BJP, dans l’Inde du XXIe siècle, a été l’instrument de la revanche des élites. Cette politique s’est appuyée non seulement sur un national-populisme hostile aux minorités, mais aussi sur la formation d’une nouvelle coalition sociale comprenant les castes supérieures et dominantes de la classe moyenne ainsi que la néo classe moyenne émergente issue des basses castes 4 (et souvent composée, paradoxalement, de bénéficiaires des réservations). Les Dalits et les Adivasis ont été les victimes des politiques mises en œuvre par le pouvoir, à commencer par la dilution de la discrimination positive liée aux privatisations qui réduisait le nombre de postes sous quota dans le secteur public.
De toutes les communautés, les musulmans ont toutefois été les plus discriminés, comme le montrent les politiques de l’État qui ont amplifié, et parfois même favorisé, leur marginalisation socio-économique et culturelle. Victimes d’exclusion sociale et de ghettoïsation, les musulmans — qui avaient déjà été durement touchés par la violence communautaire — sont devenus de facto des citoyens de seconde zone. Ce processus se déroule dans l’ensemble de l’Inde depuis 2014. Les musulmans sont directement visés par certaines mesures de l’État — y compris les lois post-2014 mentionnées ci-dessus — et, plus encore, par des groupes d’autodéfense qui, travaillant souvent main dans la main avec la police, sont largement responsables de la peur, du déclin socio-économique et de la ghettoïsation que les musulmans connaissent aujourd’hui dans toute l’Inde. Il convient de souligner ici une différence entre la situation qui prévalait au Gujarat sous Modi et l’état des choses en Inde aujourd’hui : alors que le BJP n’a pas pu attirer durablement de nombreux électeurs dalits et adivasis au Gujarat, il y est parvenu lors des élections de 2019 à la Lok Sabha, en partie grâce à l’aura nationale-populiste de Modi et en partie aussi grâce à des programmes en faveur des pauvres qui ont donné naissance à une nouvelle forme de welfarisme 5.
Les cinq piliers de la stratégie de Modi au Gujarat ont continué à fonctionner dans l’État après son accession au poste de premier ministre. En fait, il a littéralement téléguidé le BJP et l’État depuis New Delhi, comme en témoignent ses fréquentes visites — en particulier avant les élections de 2017 et de 2022 6 — et la manière dont les ministres en chef qui lui ont succédé ont été sélectionnés.
Les groupes plébéiens énumérés ci-dessus n’ont pas été ses seules victimes : les dissidents ont également été ciblés au Gujarat et le sont toujours. Les intellectuels — y compris les universitaires — et les journalistes en sont des exemples flagrants. La continuité, là encore, est frappante : la façon dont les universités du Gujarat, comme la Maharaja Sayajirao University à Baroda, ont été mises au pas après la nomination de nouveaux vice-chanceliers par Modi annonçait le traitement infligé aux universités centrales, comme l’université Jawaharlal Nehru, après que leurs vice-chanceliers ont également été changés.
Sous la direction de Giuliano da Empoli.
Avec les contributions d’Anu Bradford, Josep Borrell, Julia Cagé, Javier Cercas, Dipesh Chakrabarty, Pierre Charbonnier, Aude Darnal, Jean-Yves Dormagen, Niall Ferguson, Timothy Garton Ash, Jean-Marc Jancovici, Paul Magnette, Hugo Micheron, Branko Milanovic, Nicholas Mulder, Vladislav Sourkov, Bruno Tertrais, Isabella Weber, Lea Ypi.
Le Gujarat, creuset de l’autoritarisme électoral et d’un État plus profond
S’il y a une chose qui n’a pas pu être transposée du Gujarat à la scène nationale, c’est la centralisation du pouvoir entre les mains de quelques personnes à New Delhi.
Par définition, à Gandhinagar, Modi ne pouvait pas concentrer le pouvoir au-delà de son État. C’est donc un domaine où il a innové après 2014. La façon dont il a décidé de la démonétisation en 2016 et du confinement lié au Covid-19 en 2020 sans consulter les ministres en chef reflète une concentration claire du pouvoir.
Cependant, l’affaiblissement de certaines des institutions clefs de la République indienne, lui, fait écho à la manière dont il s’est comporté au Gujarat : le parlement indien est devenu une simple chambre d’enregistrement depuis 2014, à l’instar de l’assemblée du Gujarat après son accession à la tête du gouvernement de l’État. Cet organe ne s’est pas réuni plus de 150 jours entre 2007 et 2012, soit 30 jours par an en moyenne, ce qui contraste fortement avec les années 1980 et 1990, au cours desquelles il se réunissait plus de 200 jours 7. Pour couronner le tout, comme le réseau d’ONG Gujarat Social Watch l’a mentionné dans une lettre de protestation adressée au gouverneur de l’État :
Dans l’assemblée du Gujarat, la plupart des rapports, comme ceux du contrôleur et vérificateur général de l’Inde, de la commission nationale des droits de l’homme, de la commission nationale de l’information, de la commission nationale de vigilance et plusieurs rapports d’enquête, ne sont déposés que le dernier jour. Ainsi, les questions appelant un débat ne sont pas discutées correctement au sein de l’assemblée, ce qui fait que le contenu de ces rapports n’est pas porté à la connaissance du public. 8
De plus, le poste de vice-président de l’assemblée — qui revenait traditionnellement à l’opposition — n’a pas été pourvu pendant 12 ans. Cet état de fait préfigurait la mise à l’écart du parlement indien après 2014. En tant que Premier ministre, Modi, qui ne se rend guère à la Lok Sabha et à la Rajya Sabha 9, a publié un nombre record d’ordonnances. Alors que celles-ci sont généralement utilisées par les gouvernements minoritaires ou de coalition, il y a eu recours plus fréquemment que n’importe lequel de ses prédécesseurs, bien qu’il bénéficie d’une majorité absolue à la Lok Sabha 10. Progressivement, la Lok Sabha et la Rajya Sabha ont cessé d’être des lieux de débat. Tout d’abord, le nombre de projets de loi renvoyés aux commissions parlementaires — le cœur délibératif du travail parlementaire — a considérablement diminué, passant de 68 (71 % du total) dans la 15e Lok Sabha à 24 (25 %) dans la 16e Lok Sabha 11 — et aucun en 2020 12.
Cette marginalisation de l’assemblée de l’État du Gujarat et du parlement indien s’inscrit dans une culture politique où les débats et même les élections sont considérés comme un facteur de division de la société et donc de la nation. Au Gujarat, cette vision de la politique et de la société s’est exprimée à travers le concept de « villages samaras » — i.e. « d’assimilation sociale ». Ces villages n’étaient pas invités à organiser des élections locales et il était censé n’y avoir « ni discussions, ni disputes, mais des décisions unanimes prises harmonieusement » 13. Ghanshyam Shah le souligne : « outre les incitations financières, le gouvernement a utilisé son appareil administratif pour faire pression sur les villages afin qu’ils acquièrent le statut de samaras. Les ONG pro-BJP ont été recrutées pour diffuser le message des samaras et aider à atteindre les « objectifs » […] La publicité électorale de 2009 du BJP était la suivante : « Pas de discussion, le vikas [développement] est le mantra du BJP. Le rashtravad [nationalisme] est le mahamantra du BJP » 14. Cette devise justifie les limitations au débat et même la suspension des élections pour nommer des dirigeants locaux, « au nom du développement ».
Une grande partie de la société du Gujarat n’a pas semblé s’inquiéter d’une telle approche antidémocratique. Une enquête réalisée en 2007 par le CSDS a révélé que 34 % des personnes interrogées — dont 37 % des électeurs du BJP — considéraient le « style de fonctionnement » de Modi comme « dictatorial ». Mais 48 % de ceux qui désapprouvaient ce style dictatorial étaient prêts à voter pour son parti —tandis que parmi ceux qui approuvaient ce style, 61 % étaient prêts à faire de même 15. Ces chiffres reflètent une prédilection marquée pour les formes non démocratiques de gouvernance, particulièrement évidente au sein de la classe moyenne 16 — un groupe surreprésenté parmi les partisans de Modi. La montée d’une culture politique illibérale au Gujarat a rendu Modi plus acceptable pour la société, alors que, selon Ashis Nandy, il remplissait tous les critères d’une personnalité autoritaire. En 2003, Nandy, qui avait interviewé Modi dans les années 1980, se souvenait déjà :
Modi, je n’ai aucun plaisir à le dire aux lecteurs, répondait pratiquement à tous les critères que les psychiatres, psychanalystes et psychologues ont établis après des années de travail empirique sur la personnalité autoritaire. Il présentait le même mélange de rigidité puritaine, de rétrécissement de la vie émotionnelle, d’utilisation massive de la défense de l’ego par le déni et la peur de ses propres passions, combinés à des fantasmes de violence — le tout dans la matrice d’une personnalité clairement paranoïaque et obsessionnelle. Je me souviens encore du ton froid et mesuré avec lequel il élaborait une théorie conspirationniste aux dimensions cosmiques contre l’Inde, qui dépeignait chaque musulman comme un traître présumé et un terroriste potentiel. 17
L’analyse de Nandy suggère que Modi était populaire au Gujarat, non seulement en raison de sa doctrine antimusulmane — qui attirait les Gujaratis de la classe moyenne en particulier, comme Nandy l’affirme par ailleurs — mais aussi en raison de sa personnalité autoritaire.
Cette observation peut être transposée au niveau national. En 2017, le Pew Research Center a mené une enquête dans 34 pays pour mesurer les « attitudes pro-démocratiques » ainsi que « l’ouverture à des formes de gouvernance non démocratiques, y compris le règne d’experts, d’un dirigeant fort ou de l’armée » 18. Commentant les résultats, l’équipe de Pew a souligné que « le soutien au régime autocratique est plus élevé en Inde que dans tous les autres pays étudiés » et que l’Inde est « l’un des quatre pays où la moitié ou plus du public soutient le gouvernement par l’armée ». Une proportion encore plus importante — deux tiers — estime « qu’une bonne façon de gouverner le pays serait que des experts, et non des représentants élus, prennent des décisions en fonction de ce qu’ils pensent être le mieux pour la nation ». En effet, dans cette enquête, 55 % des Indiens interrogés soutiennent « un système de gouvernement dans lequel un dirigeant fort peut prendre des décisions sans interférence du parlement ou des tribunaux », tandis que 53 % soutiennent le régime militaire. Il est intéressant de noter que les partisans du parti nationaliste hindou, le BJP, étaient surreprésentés dans les trois groupes — ceux qui soutiennent le régime personnel, ce qui sont favorables à la gouvernance militaire et les partisans d’un régime technocratique 19.
La demande d’un leader fort est liée à un sentiment aigu de vulnérabilité 20. Selon l’enquête du Pew Research Center sur l’Inde, si « la criminalité occupe la première place sur la liste, 84 % des Indiens la considérant comme un très gros problème », le « terrorisme » vient immédiatement après pour 76 % des personnes interrogées — avant la corruption et le chômage 21. Cela correspond bien à l’idée selon laquelle Daech représenterait comme la principale menace à laquelle l’Inde serait confrontée pour 66 % des personnes interrogées, avant toute autre menace 22. La nécessité d’un État fort découle également de la volonté d’étouffer les problèmes et les conflits non résolus : en témoigne le fait qu’une « majorité de 63 % pense que le gouvernement devrait utiliser davantage la force militaire » au Cachemire 23. Ces résultats suggèrent que la politique de la peur et la stratégie de polarisation initiée par Modi au Gujarat et utilisée au niveau national expliquent en grande partie sa résilience politique et sa capacité à attirer des partisans dans l’ensemble de la société.
Cette fascination pour un leader fort a été favorisée par les techniques national-populistes mentionnées ci-dessus, mais elle a également résulté des relations que Modi a entretenues avec des dirigeants étrangers. Là encore, de manière contre-intuitive, le Gujarat a servi de rampe de lancement.
Les nombreux observateurs qui ont été étonnés, après 2014, par les voyages à l’étranger de Modi — qui a rencontré les hommes d’État les plus influents du monde sur le mode express et a acquis une image prestigieuse en retour — auraient pu anticiper cette évolution s’ils avaient suivi ses voyages à l’étranger alors qu’il était ministre en chef du Gujarat.
Non seulement Modi a alors visité de nombreux pays — bien qu’il ait été privé de visa pour l’Occident après 2005 en raison du pogrom auquel il avait présidé — mais il a orchestré une campagne de publicité systématique autour de ces voyages. Lorsqu’il s’est rendu en Chine, son site web comportait un langage qui allait devenir courant dans les médias grand public après 2014 :
La visite du ministre en chef, M. Narendra Modi, en Chine a été un grand succès. Le gouvernement de la République populaire de Chine et le Parti de la Communauté de Chine (PCC) au pouvoir ont accordé au ministre principal une importance sans précédent et un niveau de protocole très élevé, dépassant les normes établies. Des dispositions spéciales ont été prises pour l’accueil, l’escorte, les banquets, les visites, la sécurité et les réunions de haut niveau.
Cette visite a suscité un vif intérêt parmi les milieux d’affaires et industriels ainsi que parmi les dirigeants politiques chinois. Les Chinois, connus pour leur diligence, ont vu le développement global et la croissance spectaculaire du Gujarat, ainsi que le leadership de M. Narendra Modi, et veulent construire une relation forte et durable avec le Gujarat. 24
Modi a effectué une centaine de voyages entre 2003 et 2007, année où il s’est rendu en Chine, en Corée du Sud, au Japon et en Suisse 25, et l’année suivante au Kenya et en Ouganda. Mais il a aussi invité les premiers ministres et les présidents du monde entier au Gujarat, notamment à l’occasion du Vibrant Gujarat 26. En d’autres termes, sa transition de ministre en chef à premier ministre a été étonnamment cohérente du point de vue de son exposition internationale.
Narendra Modi incarne certes le type de l’homme fort — mais même les hommes forts peuvent perdre des élections.
Et Modi, comme les autres hommes forts d’aujourd’hui, a besoin d’organiser des élections non seulement pour cultiver la réputation internationale de l’Inde en tant que « plus grande démocratie du monde », mais aussi pour renouveler sa légitimité tous les cinq ans, en obtenant un nouveau mandat populaire. C’est le risque que doivent prendre tous les dirigeants populistes pour s’imposer face à des institutions non élues, y compris le pouvoir judiciaire 27. Les cinq piliers du modèle du Gujarat examinés ci-dessus, qui ont été transposés au niveau national, rendent la défaite électorale de Modi plutôt improbable, mais pas impossible.
Toutefois, l’un de ces piliers suggère que sa défaite pourrait ne pas faciliter le retour à la situation d’avant 2014. Il s’agit de la désinstutionnalisation de l’État, un processus qui va de pair avec la création d’un « État plus profond ». Ses principaux acteurs sont les activistes du Sangh Parivar, y compris les militants des groupes d’autodéfense comme le Bajrang Dal, qui assurent le maintien de l’ordre au niveau local avec la bénédiction des dirigeants politiques.
La police officielle est soit neutralisée, soit complice. Si le BJP perd le pouvoir, ces organisations, qui ont pénétré la société et pénétré davantage encore la société depuis 2014, pourraient continuer à régner en sous-main. Si leurs actes sont illégaux ils sont légitimés par le caractère sacré de leur cause — hindoue — et approuvés par la majorité de la population. Dès 2015, un militant déclarait :
Nous sommes en Hindoustan et peu importe le parti qui dirige le gouvernement. Dans un pays démocratique comme celui-ci, il y a bien d’autres moyens de faire avancer notre cause [que la capture du pouvoir]. La police sait très bien que nous ferons des piquets de grève, que nous organiserons des manifestations et que tout cela conduira à des émeutes. C’est pourquoi elle est obligée de coopérer avec nous. 28
Sous l’égide du gouvernement Modi, les nationalistes hindous ont pénétré la société gujaratie si profondément qu’ils en sont venus à former un État plus profond que l’État officiel, un système de contrôle bien ancré au niveau sociétal. Ce modus operandi a été reproduit au niveau national depuis 2014. Il rendrait difficile tout retour au statu quo ante, même si le BJP perdait les élections. Seul un mouvement de masse pourrait probablement contrer une telle osmose majoritaire avec la société 29.
Sources
- Cet article s’appuie sur mon ouvrage Gujarat Under Modi. Laboratory of Today’s India (Hurst, 2024) et en synthétise les principales conclusions. Mon principal objectif en écrivant ce livre — que j’ai commencé au début des années 2000 — était de rendre compte de la politique de Narendra Modi au Gujarat afin d’expliquer son ascension au pouvoir, et d’identifier les caractéristiques spécifiques de sa stratégie qui lui ont permis de gouverner l’État pendant un nombre d’années record. Il s’agissait en quelque sorte de faire la biographie politique d’un État indien à travers la personnalité et les actions de son dirigeant le plus résilient. Au fil du temps, mon objectif a évolué, car il est devenu important de comprendre comment le Gujarat avait été un site d’essai pour les nationalistes hindous, le creuset d’une nouvelle forme de politique hindutva qui allait se déployer au niveau national après 2014. Ce livre fait écho à celui que j’ai écrit en 2019, L’Inde de Modi. National-populisme et démocratie ethnique (Fayard) pour montrer que le premier ministre indien a reproduit depuis 2014 le modus operandi qu’il avait peaufiné en tant que ministre en chef. Cette conclusion est importante : jamais auparavant un leader régional n’avait été en mesure de redimensionner un répertoire politique assez complexe, enraciné dans un État particulier, et de le transposer à l’échelle de l’Inde. Les cinq parties du livre traitent des cinq piliers de la politique de Modi au Gujarat, qui devaient prévaloir par la suite à l’échelle de l’Inde.
- « Gujarat now India’s SEZ : Narendra Modi », Times of India, 6 septembre 2007.
- Les Patels constituent la caste dominante du Gujarat, c’est-à-dire, celle qui contrôle l’essentiel des terres et pèse d’un poids démographique considérable – d’autant plus que l’élite de cette caste est passé très tôt au commerce et a investi dans l’éducation, accédant ainsi aux responsabilités administratives et politiques, voire aux professions libérales.
- Il convient de distinguer les basses castes des ex-intouchables (aussi appelés Dalits) car elles se situent bien au-dessus en termes de statut – et sous les castes dominantes.
- C. Jaffrelot, Modi’s India : Hindu Nationalism and the Rise of Ethnic Democracy, Princeton, NJ, Princeton University Press ; Chennai, Westland, 2021, pp. 112-48.
- Voir C. Jaffrelot et Mahesh Langa, » Gujarat 2022 elections : explaining BJP’s hegemony « , Studies in Indian Politics, 11, no. 1, 2023, pp. 118-33.
- « No. 1 CM has the lowest average Assembly sittings », Dainik Bhaskar, 19 juillet 2012 (dernier accès le 28 novembre 2013).
- « Gujarat Social Watch asks governor to ensure state Assembly becomes ‘meaningful’ for democracy », Counterview, 29 août 2013 (dernier accès le 28 novembre 2013).
- C. Jaffrelot et Vihang Jumle, « Bypassing parliament », Indian Express, 15 octobre 2020 (dernier accès le 16 octobre 2020) ; et P.B. Mehta, « Betrayal of procedure in parliament is not just about technicalities : deference to process builds trust », Indian Express, 22 septembre 2020 (dernier accès le 7 octobre 2020).
- Au cours de son premier mandat, le nombre d’ordonnances est passé de six par an sous Manmohan Singh à onze par an sous Modi. Voir la liste des ordonnances promulguées, texte des ordonnances centrales : Legislative References, Legislative Department, Ministry of Law and Justice, Government of India (dernier accès le 7 octobre 2020).
- V. Rodrigues, « Parliamentary scrutiny on the back burner », The Hindu, 26 septembre 2020 (dernier accès le 7 octobre 2020).
- Bills referred to committees’ for 15th, 16th, 17th Lok Sabha under all committees, Lok Sabha, Parliament of India (dernier accès le 3 oct. 2020).
- G. Shah, « Modi’s power play and mega-marketing in the 2009 Lok Sabha elections », dans J. Breman et G. Shah (eds.), Gujarat, Cradle and Harbinger of Identity Politics : India’s Injurious Frame of Communalism, New Delhi, Tulika Books, 2022, p. 270.
- Ibid.
- « Dictating the trend », Indian Express, 27 novembre 2007 (dernier accès le 28 novembre 2013).
- Patrick Heller et Leila Fernandes, « Hegemonic aspirations : new middle class politics and India’s democracy in comparative perspective », Critical Asian Studies, 38, no. 4 (2006), pp. 495-522.
- Ashis Nandy, « Obituary of a culture », Seminar, no. 513 (2002).
- R. Wike, K. Simmons, B. Stokes et J. Fetterolf, « Globally, broad support for representative and direct democracy » in Pew Research Center, Global Attitudes and Trends, 16 oct. 2017.
- Bruce Stokes, Dorothy Manevich et Hanyu Chwe, « The state of Indian democracy », in Pew Research Center, Global Attitudes and Trends, 15 novembre 2017 (dernier accès le 26 juin 2018).
- J’ai développé ce point dans C. Jaffrelot, « Populism against democracy or people against democracy ? », dans A. Dieckhoff et E. Massicard (eds.), Contemporary Populists in Power, New York, Palgrave, 2022, pp. 35-54.
- Bruce Stokes, Dorothy Manevich et Hanyu Chwe, « Indians satisfied with country’s direction but worry about crime, terrorism », in Pew Research Center, Global Attitudes and Trends, 15 novembre 2017.
- Bruce Stokes, Dorothy Manevich et Hanyu Chwe, « India and the world », dans Pew Research Center, Global Attitudes and Trends, 15 novembre 2017 (dernier accès le 26 juin 2018).
- Stokes, Manevich et Chwe, « India and the world ».
- « Gujarat chief minister Mr. Narendra Modi’s historic visit to the People’s Republic of China », Narendra Modi website, 13 novembre 2011.
- « Congress has a question : who paid for Narendra Modi’s chartered flights as Gujarat chief minister ? », Indian Express, 19 oct. 2017.
- J.K. Pathak, « Three eras of visits by foreign leaders to Gujarat », DeshGujarat, 19 avril 2022. À partir de 2003, Modi a organisé tous les deux ans un événement baptisé « Vibrant Gujarat » où les industriels indiens et étrangers étaient invités à faire part de leurs projets d’investissement dans l’État.
- Sur les compulsions électorales du populisme, voir Jaffrelot, « Populism against democracy or people against democracy ? », pp. 35-54.
- « Operation Juliet : busting the bogey of ‘love jihad’ », Cobrapost, 4 octobre 2015 (dernier accès le 9 avril 2018).
- Voir C. Jaffrelot, « Bajrang Dal and the making of the deeper state : in the name of faith and state », Indian Express, 5 juin 2023.