Les BRICS, un groupe de cinq pays — Chine, Russie, Inde, Brésil et Afrique du Sud — créé en 2010 après l’arrivée de Pretoria, a connu sa première vague d’élargissement le 1er janvier 2024. À l’issue du sommet de Johannesburg d’août 2023, six pays ont formellement été invités à rejoindre le groupe : l’Argentine, l’Égypte, l’Éthiopie, l’Iran, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis.

  • Cette expansion est significative à bien des égards : le groupe représente désormais 45,5 % de la population mondiale, 43,34 % de la production globale de pétrole, 35,85 % du PIB mondial (en parité de pouvoir d’achat) et presque 25 % du total des exportations de biens.
  • La victoire de Javier Milei à l’élection présidentielle argentine de novembre a néanmoins ébranlé les plans du groupe.
  • Bien qu’officiellement invité, le nouveau gouvernement argentin a officiellement annoncé la semaine dernière sa décision de ne pas rejoindre les BRICS.

Dans un courrier adressé aux dirigeants des pays fondateurs du groupe, Milei a déclaré que le moment n’était pas « opportun » pour que l’Argentine rejoigne les BRICS1. À la place, le nouveau président paléolibertarien souhaite rouvrir les négociations d’adhésion à l’OCDE « le plus rapidement possible », après que ces dernières aient été gelées suite à l’arrivée au pouvoir d’Alberto Fernández en 20192.

En dépit de ce retournement de situation, les BRICS ont néanmoins doublé de taille au 1er janvier 2024, soulevant des questions quant à l’unité et à la gouvernance futures du groupe.

  • La cohésion des BRICS a jusqu’à présent mieux résisté que ce qui pouvait être anticipé malgré des contradictions majeures en termes de politique intérieure, des conflits frontaliers multiples et des objectifs divergents en matière de politique étrangère.
  • Tandis que Pékin souhaite supplanter la domination occidentale par la création d’un réseau d’alliances, New Delhi vise à réformer les infrastructures existantes3. La Russie de Poutine semble quant à elle vouloir re-devenir une puissance impériale.
  • Avec cet élargissement, le groupe devra désormais travailler à régler ou apaiser le conflit opposant l’Éthiopie à l’Égypte autour du Grand barrage de la Renaissance sur le Nil et trouver un équilibre avec les relations sécuritaires étroites entretenues par l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et l’Égypte avec les États-Unis.

Selon une étude publiée en décembre par trois chercheurs de l’université américaine Tufts, la convergence des politiques mises en place par les pays membres des BRICS dans les domaines identifiés comme des priorités en matière de coopération a considérablement augmenté depuis la création du groupe, passant de 13,7 % en 2009 à 50,7 % en 20214. Bien qu’imparfait, cet indicateur révèle néanmoins les capacités du groupe à fonctionner à 5 malgré les oppositions et rivalités existantes — qu’en sera-t-il à 10 ?

Sources
  1. « Milei says Argentina will not be joining Brics bloc in policy reversal », The Guardian, 29 décembre 2023.
  2. Jorgelina Do Rosario, « Argentina’s Milei formally seeks OECD accession talks », Reuters, 13 décembre 2023.
  3. Kate Mackenzie et Tim Sahay, « Grievance and Reform », Phenomenal World, 31 août 2023.
  4. Mihaela Papa, Zhen Han et Frank O’Donnell, « The dynamics of informal institutions and counter-hegemony : introducing a BRICS Convergence Index », European Journal of International Relations, Vol. 29, n°4, p.809-1065, décembre 2023.