Londres/Bruxelles. Mercredi 29 janvier, le Parlement européen devrait entériner l’accord de retrait du Royaume-Uni lors d’un vote en plénière prévu à 18h. Faisant suite au vote en commission des affaires constitutionnelles (AFCO), compétente pour la préparation de l’approbation du Parlement en vertu de l’article 50 du TUE et conformément à l’article 88 du règlement intérieur du Parlement relatif au retrait de l’Union, cette validation devrait être sans surprise. Ce vote devrait ensuite être rapidement suivi par une procédure écrite du Conseil, ouvrant ainsi la voie au début de la période de transition le 1er février 2020, date à partir de laquelle l’accord de retrait du Royaume-Uni de l’UE aura force de traité international. 

Dès lors, plusieurs changements importants entreront successivement en vigueur, selon une logique en trois étapes. 1

Les changements institutionnels au 1er février 2020

Au 1er février 2020, les principaux changements seront d’ordre institutionnel, avec le retrait effectif du Royaume-Uni des organes de décision de l’UE. Aucun commissaire britannique n’ayant été désigné au sein de la Commission von der Leyen, l’impact sur la direction politique de l’exécutif européen devrait être moins fort que sur les autres institutions. Les ministres britanniques ne siégeront officiellement plus aux réunions du Conseil et le contingent britannique du Parlement européen sera vidé de ses membres, sept mois après le début de la neuvième législature.

En conséquence, l’hémicycle strasbourgeois passera de 751 à 705 députés. Des 73 sièges actuellement occupés par les députés britanniques, 27 seront redistribués entre 14 États membres, selon une règle de proportionnalité démographique visant à compenser le déséquilibre représentatif actuel. Les 46 autres sièges seront mis en réserve dans la perspective d’un élargissement de l’Union à de nouveaux membres ou de la création d’une circonscription transnationale.

Ainsi, s’agissant de l’architecture parlementaire post-Brexit, le premier groupe devrait rester le PPE avec 187 députés contre 182 aujourd’hui, toujours suivi par S&D qui comptera 148 eurodéputés contre 154 actuellement et Renew Europe qui devrait passer de 108 à 97 députés. En revanche, le quatrième groupe pourrait devenir I&D avec 76 eurodéputés contre 73 aujourd’hui, devançant les Verts qui compteraient 67 eurodéputés pour 74 à l’heure actuelle. Cette reconfiguration aura également un impact sur la composition des groupes politiques et d’éventuelles conséquences sur les configurations de majorité. 2

La nouvelle composition du Parlement devrait être annoncée lors de la session plénière du mois de février. Les nouveaux présidents ou vice-présidents des commissions parlementaires seront alors élus.

Pendant la période de transition, du 1er février au 31 décembre 2020

La période de transition est censée se terminer le 31 décembre 2020, sauf accord conjoint avant le 1er juillet 2020 du Royaume-Uni et de l’UE sur sa prolongation pour une durée d’un ou deux ans. Dans la mesure où les britanniques ont fermement exprimé leur souhait de ne pas prolonger cette période de transition, l’hypothèse de travail retenue par les services de la Commission européenne est fixée sur une échéance au 31 décembre.

Durant la période de transition, la relation entre le Royaume-Uni et l’UE restera identique à la situation actuelle, sans changements majeurs relatifs aux droits des citoyens, des entreprises ou encore concernant les questions liées aux frontières. Ainsi, le Royaume-Uni conservera un accès à l’Union douanière et au marché intérieur, l’acquis communautaire restera en vigueur et les décisions de la Cour de justice de l’Union européenne continueront à s’appliquer au Royaume-Uni. Les accords internationaux conclus par l’Union européenne auront toujours force de loi, notamment les accords commerciaux mais aussi les sanctions commerciales qui pourraient être décidées ultérieurement vis-à-vis de pays tiers. Les britanniques pourront négocier des accords commerciaux avec leurs futurs partenaires, mais leur application ne pourra avoir lieu qu’au terme de la période de transition.

Au niveau budgétaire, le Royaume-Uni continuera à bénéficier et contribuer au budget européen pendant la période de transition, soit, opportunément, jusqu’à la fin du cadre financier pluriannuel actuellement en vigueur. Ce sera notamment le cas pour les dépenses liées à des projets de très long terme.

Le Royaume-Uni continuera également à participer aux opérations de politique de sécurité et de défense commune dans lesquelles il est engagé, sans toutefois pouvoir assurer de commandement opérationnel, comme pour l’Opération Atalante dont l’état-major a été transféré à l’Espagne et la France.

Les conséquences économiques du Brexit sur les PIB des pays membres de l'Union européenne

Au terme de la période de transition, à partir du 1er janvier 2021

Après le 31 décembre 2020, la situation reste largement indéterminée au-delà d’un nombre restreint d’éléments clés actés dans l’accord de retrait comme la solution de dernier recours du protocole sur l’Irlande et l’Irlande du Nord ou la protection des citoyens de l’Union et des ressortissants britanniques qui résident dans un État autre que celui de leur nationalité. Les négociations à venir permettront de définir les modalités d’exécution d’un champ d’actions extrêmement large, allant de la définition des futures relations commerciales à la difficile question de la participation du Royaume-Uni aux activités de sécurité et de défense de l’UE. Au regard de ces nombreux enjeux, le timing pour la négociation et la ratification de la future relation entre l’UE et le Royaume-Uni semble serré.

Pour assurer cette négociation du côté européen, la taskforce de la Commission européenne pour les relations avec le Royaume-Uni restera sous la direction de Michel Barnier qui en coordonnera l’ensemble des activités en collaboration étroite avec les commissaires européens en fonction des dossiers. Les nouvelles responsabilités de Sabine Weyand, ancienne négociatrice en chef adjointe pour le Brexit et de Stéphanie Riso, ex-conseillère principale auprès de Michel Barnier – devenues respectivement directrice générale de la stratégique DG commerce et cheffe de cabinet adjointe de la présidente de la Commission – devraient permettre d’assurer continuité et cohérence à l’action de la Commission.

Une structure de coordination du Parlement européen présidée par David McAllister suivra également tous les aspects des négociations.

En cas d’échec des négociations au 31 décembre 2020, l’hypothèse du cliff edge serait à nouveau vraisemblable et se traduirait par le retour du Royaume-Uni aux règles de l’Organisation mondiale du commerce dans sa relation avec l’Union européenne à partir du 1er janvier 2021. 

Sources
  1. BLITZ James, BRUNDSEN Jim, HUGHES Laura, Brexit timeline : key dates in the UK’s divorce from the EU, Financial Times, 18 décembre 2019
  2. ZALAN Eszter, SANCHEZ NICOLAS Elena, Boost for Right in post-Brexit EU parliament, EU Observer, 15 janvier 2020