Varsovie. Selon les résultats définitifs communiqués par la Commission électorale nationale le 14 octobre 2019, les élections au Sejm ont été remportées par le parti de Jaroslaw Kaczyński – Droit et Justice (PiS), qui détient actuellement une majorité parlementaire au parlement polonais, dirigeant le pays depuis les dernières élections de 2015. Le PiS a recueilli 43,59 % des voix (236 sièges). On retrouve à la deuxième place la Coalition Civique, avec 27,40 % (134 sièges). Arrive ensuite l’Alliance de la gauche démocrate (12,56 %). Derrière eux, la Coalition polonaise a obtenu 8,55 % tandis que la Confédération, parti d’extrême droite, en a obtenu 6,81 %. Au Sénat, le PiS a remporté 48 sièges, tandis que les partis de l’opposition en ont remporté 51.1

Le taux de participation s’est établi à 61 %, un nombre record de participants qui résulte de la consolidation des électeurs de droite et de centre-gauche. Cela démontre un engagement politique sans précédent des Polonais. 

Les résultats montrent que le PiS a gagné, ce qui comptait pour obtenir une majorité constitutionnelle au Sejm. Il a obtenu 1,2 million de voix de plus que lors des dernières élections européennes de mai 2019. De cette façon, la légitimité de son mandat a augmenté. Cependant, 1,7 million de voix supplémentaires ont été exprimées pour tous les partis d’opposition par rapport au PiS. Ce qui laisse Jarosław Kaczyński avec un pouvoir incomplet dans le pays, sans majorité au Sénat. Les résultats montrent également le retour de la gauche après quatre années d’absence du parlement. De manière inattendue, le résultat est également positif pour la Coalition polonaise, ménée par le Parti paysan, qui se transforme en parti central. On observe également l’entrée du parti d’extrême droite formant une coalition avec les nationalistes – la Confédération.

Le chef du PiS, Jarosław Kaczyński, a déclaré : « Nous avons une victoire, mais nous méritons plus. Malgré le puissant front contre nous, nous avons réussi à gagner ».2 Après l’annonce des résultats, Grzegorz Schetyna, chef de la Coalition Civique, a déclaré : « Nous allons travailler pour intégrer l’opposition. Il n’y aura pas de Budapest à Varsovie ».3 Les dirigeants de gauche ont également annoncé des succès. Robert Biedroń (Printemps) a annoncé en triomphe que la gauche polonaise revenait au Parlement. Adrian Zandberg (Ensemble) a ajouté que la gauche avait réussi à connecter trois générations et à montrer un visage différent de celui observé ces quatre dernières années dans la politique polonaise.

La victoire du PiS est liée à la politique sociale poursuivie par le gouvernement actuel sous les slogans « Bon moment pour PiS » et « Nous allons plus loin ». En outre, elle est appuyée par la situation économique, la vision de création d’un « Fort Etat-providence ». Tout cela rime avec l’efficacité du gouvernement et de ses politique. La victoire résulte également d’une campagne électorale bien menée, efficace, claire et cohérente. Adressé à l’électorat fidèle, qui a voté pour PiS depuis le début. Cependant, la campagne était structurée de manière à attirer de nouveaux électeurs, principalement parmi les jeunes. Le PiS en tant que seul parti a compris le besoin de renouveau générationnel, à la fois dans les rangs de son propre parti (il a attiré les hommes politiques talentueux, 35plus) et parmi l’électorat. Il a également réussi à gagner des électeurs dans la partie occidentale du pays, où la Coalition  Civique traditionnellement gagne.

Le PiS a également réussi à gagner chez les agriculteurs (56 % ont voté pour le parti).

Jarosław Kaczyński et son groupe veulent revenir à la puissance polonaise perdue, le mythe de la grandeur de la République polonaise d’il y a des siècles.

La réaction du président du Conseil hongrois Viktor Orban n’est pas anodine : du point de vue hongrois, des élections très importantes ont été organisées en Pologne, où le parti au pouvoir a remporté la majorité des mandats parlementaires et est en mesure de constituer un gouvernement tout seul.4 L’accent a souvent été mis sur le rapprochement entre la Pologne et la Hongrie. Un exemple symbolique de  ce rapprochement est le dévoilement du monument « Memento-Smolensk » (commémorant la catastrophe de Smolensk) à Budapest (Hongrie) en 2018 : « le destin de la Hongrie et de la Pologne est inextricablement lié. Ce n’est pas qu’une belle tradition, comme en témoignent les événements des huit dernières années. Les tragédies de Smolensk et de Katyn font partie du monde moderne, le monument est une promesse qu’après les élections, nous suivrons la voie de l’amitié polono-hongroise », déclarait Zsolt Nemeth, chef de la commission des affaires étrangères du Parlement hongrois, à cette occasion. Mateusz Morawiecki, le Premier ministre polonais et Jarosław Kaczyński le chef de PiS y étaient présents. 

La référence de Jarosław Kaczyński à la Turquie est également significative. Il a déclaré en 2014 : « Vous devez tout faire pour que la culture polonaise, unique et non imitative, se développe. Et vous devez renforcer les forces militaires. Tout doit être fait pour faire de la Pologne ce que la Turquie est aujourd’hui. On dit qu’elle est un pays sérieux ».5

La Hongrie a introduit l’autocratie suite aux démarches menées  par le gouvernement de Victor Orban, la Turquie s’est transformée de l’autocratie en dictature. La Pologne commence tout juste le même chemin.

Perspectives :

  • Le PiS a jusqu’a fin novembre pour former un gouvernement. La majorité parlementaire qui en résulte permet au parti de statuer de manière indépendante pendant les quatre prochaines années. Il voudrait introduire les changements annoncés pendant la campagne électorale. Ceci est une continuation des activités du mandat précédent. Pourtant le Sénat qui dans les mains de l’opposition constitue un obstacle.