Ce texte a été publié originellement dans l’édition 62 de La Lettre du Lundi, la newsletter opérationnelle hebdomadaire du Grand Continent. Vous pouvez retrouver l’édition complète – dédiée entre autres aux résultats des élections a Istanbul, aux protestes à Hong Kong et à l’au Conseil européen du 20-21 juin – ici. Abonnez-vous ici.

Tripoli. L’attention médiatique internationale est capturée par l’escalade dans le Golfe. Pourtant on devrait s’intéresser à un autre dossier dont l’importance, comme souvent, est inversement proportionnelle à sa visibilité médiatique.

  • Depuis le 4 avril, l’Armée nationale libyenne du général Haftar a lancé une attaque contre Tripoli où siège un gouvernement reconnu par les Nations Unies et particulièrement soutenu en Europe par le gouvernement italien.1.
  • Selon des sources proches du dossier, Haftar se préparerait à lancer l’attaque finale, après avoir réussi à ouvrir un second front à Syrte, en affaiblissant les forces de Misrata qui défendent Tripoli.
  • En cas de succès de l’opération d’Haftar, la capitale devrait être transférée à Misrata, siège de la Banque centrale libyenne.

Le contexte géopolitique de cette crise souligne le refoulement géopolitique méditerranéen de l’Union. La carte du conflit est densément occupée par des intérêts qui s’expriment clairement 

  • Les Saoudiens et les Emirats-Arabes financent Haftar qui a réussi à se rapprocher à l’Egypte d’al-Sisi.2
  • La Russie de Poutine, entrepreneur du désordre en Méditerranée, voit de bon oeil cette alliance.
  • Pour la Turquie, l’avancée de Haftar vers la capitale complique les plans de devenir un médiateur important dans le conflit, un élément d’une stratégie de pénétration massive en Afrique qui passe aussi par l’endiguement des objectifs des acteurs du Golfe Persique.3
  • Enfin, et c’est essentiel, Donald Trump avait exprimé en avril son soutien personnel au général Haftar dans un appel où il a reconnu son rôle dans la lutte contre le terrorisme

Nota bene ? Les chancelleries européennes craignent l’ouverture d’une nouvelle crise migratoire : 43 113 réfugiées ou demandeurs d’asiles sont enregistrés sur les listes de l’UNHCR en Libye.4

Sources
  1. HASARD Christian, De la bataille de Tripoli au nouveau cycle de violence en Libye, Le Grand Continent, 10 avril 2019
  2. MUSINA Daniela, Libye : le risque d’une nouvelle escalade et le regard vigilant de Riyad, Le Grand Continent, 7 avril 2019
  3. ROSA Alessandro, L’avancée d’Haftar met en question le rôle de la Turquie en Libye, Le Grand Continent, 28 avril 2019
  4. UNHCR, Data on Libya, juin 2019