Depuis la visite surprise à Moscou le 22 décembre du Premier ministre slovaque Robert Fico — le troisième dirigeant européen après Karl Nehammer et Viktor Orbán à s’être rendu en Russie depuis février 2022 —, un important mouvement de protestation a lieu dans le pays. En janvier, au moins 100 000 manifestants sont descendus dans les rues des grandes villes slovaques pour demander la démission de Fico en raison de ses positions pro-Poutine.

Le mouvement, soutenu notamment par l’initiative Mier Ukrajine (Paix pour l’Ukraine), a appelé à de nouvelles manifestations aujourd’hui, vendredi 7 février. Celles-ci devraient avoir lieu dans une trentaine de villes du pays ainsi que dans une dizaine de métropoles européennes.

  • C’est principalement les déclarations de Fico vis-à-vis de l’Ukraine qui ont suscité l’opposition de dizaines de milliers de Slovaques. Après l’expiration du contrat de transit du gaz russe via l’Ukraine le 31 décembre, qui coûterait 1,5 milliards d’euros à Bratislava selon Fico 1, ce dernier a qualifié Volodymyr Zelensky d’« ennemi » de l’Europe.
  • Déjà opposé à l’entrée de l’Ukraine dans l’Union et l’OTAN, le dirigeant slovaque menace d’opposer son veto aux décisions européennes en faveur de Kiev et de bloquer les transferts transfrontaliers d’électricité ainsi que les approvisionnements humanitaires du pays.

L’inclinaison de plus en plus pro-russe de Fico n’est pas du goût de l’opposition pro-européenne slovaque (qui a perdu les législatives et la présidentielle). Le leader du parti Slovaquie progressiste (RE), Michal Šimečka, a ainsi mené une délégation parlementaire à Kiev il y a quelques semaines. Fico, soutenu par le président Pellegrini, du même parti, l’a quant à lui accusé de préparer un coup d’État contre son gouvernement et de « faire la courbette à Zelensky ».

  • Après des rassemblements dès décembre suite au voyage de Fico à Moscou, des manifestations pro-européennes ont eu lieu le 24 janvier dernier, rassemblant 60 000 personnes à Bratislava et environ 40 000 dans d’autres villes, selon les organisateurs.
  • En amont du grand rassemblement prévu aujourd’hui, des lettres ouvertes se sont succédé, en particulier une signée par plusieurs centaines de psychiatres et psychologues dénonçant « l’instabilité émotionnelle » de Fico ainsi que ses actions antidémocratiques 2. Un courrier similaire avait appelé l’ancien dirigeant Vladimír Mečiar à quitter la vie politique en 1998.
  • Deux députés de la coalition de Fico ont été exclus fin janvier en raison de luttes intestines et une motion de censure devrait être soumise à un vote en mars 3. La coalition de Fico reste toutefois la première force au parlement.

Depuis l’été 2024, le parti de Fico, le Smer (suspendu en octobre 2023 de l’Alliance progressiste des socialistes et démocrates au Parlement européen aux côtés de son allié Hlas, fondé par Peter Pellegrini, suite à la formation d’une coalition de gouvernement avec le parti d’extrême droite SNS), est en baisse dans les sondages. C’est désormais le parti d’opposition Slovaquie progressiste (RE) qui est en tête des intentions de vote (24 %). Les prochaines élections devraient avoir lieu en 2027.

Sources
  1. Kate Abnett et Jan Lopatka, « Fico says Slovakia could withhold Ukraine aid over halted gas supply », Reuters, 9 janvier 2025.
  2. « Otvorený list psychiatrov a psychológov premiérovi Ficovi », Denník N, 18 janvier 2025.
  3. Alžbeta Múcsková, « Hlas-SD vyhodil Migaľa a Šalitroša zo strany. Podľa Šutaja Eštoka požadovali nové politické funkcie », TVnoviny.sk, 24 janvier 2025.