Le Congrès américain ne votera probablement pas de nouveaux fonds pour Kiev d’ici la fin de l’année. Malgré les signaux positifs envoyés par le Sénat sur un potentiel accord entre Démocrates et Républicains — qui peut se résumer à des concessions sur la politique migratoire de l’administration en échange du déblocage de l’aide pour l’Ukraine —, la Chambre, dominée par le GOP, n’accepterait rien de moins qu’une transformation radicale de la politique frontalière de Biden1.

Au cours d’une conférence de presse donnée jeudi 14 décembre, Vladimir Poutine a déclaré sans ambiguïté que la guerre en Ukraine ne prendrait fin qu’avec une défaite militaire de Kiev.

  • Le président russe a répété son objectif de « dénazifier » et de « démilitariser » l’Ukraine, ce qui impliquerait la destitution de Volodymyr Zelensky et très certainement d’une partie au moins de l’administration ukrainienne2.
  • D’une manière assez inattendue, le président russe a indiqué qu’il y avait actuellement 617 000 soldats russes en Ukraine, dont « environ 244 000 qui ont été appelés à combattre aux côtés des forces militaires professionnelles ».
  • Poutine a également évacué l’éventualité d’une nouvelle vague de mobilisation — perçue comme impopulaire —, arguant que « 1 500 hommes étaient recrutés chaque jour ». Au total, 486 000 soldats auraient signé un contrat avec l’armée.

Ce rare épisode d’interaction avec des journalistes occidentaux et des citoyens russes fait suite à la divulgation par les services de renseignements américains d’estimation des pertes subies par la Russie depuis février 2022. Selon Washington, 315 000 combattants russes auraient été tués ou blessés en Ukraine depuis le lancement de l’invasion, soit 88 % des effectifs déployés au début de la guerre. L’armée russe aurait également perdu presque les deux tiers des chars d’assaut dont elle disposait avant l’invasion3.

  • L’évolution des dépenses militaires russes ainsi que le nouveau budget fédéral pour 2024-2026 voté en novembre reflète les objectifs que le Kremlin cherche à atteindre en Ukraine.
  • L’an prochain, les dépenses russes liées à la « défense nationale » devraient représenter 29 % du total des dépenses budgétaires (contre 10,4 % en 2021), soit 7,1 % du PIB.
  • Comme le note le chercheur au SIPRI Julian Cooper, l’augmentation des revenus du budget fédéral russe sur laquelle table le Kremlin pour 2024 est néanmoins « optimiste » et sera vulnérable à des « évolutions imprévisibles » (durcissement des sanctions sur le pétrole, réduction des exportations, etc.)4.

L’Ukraine dispose de moins de capacités domestiques de production de munitions et de matériel militaire, et repose ainsi plus largement sur l’assistance extérieure que la Russie. Malgré les importantes réserves dont cette dernière disposait avait février 2022, Moscou a néanmoins importé plus d’un million d’obus d’artillerie de Corée du Nord depuis la fin de l’été, témoignant des limites imposées par l’intensité des combats qui ne faiblit pas.

Sources
  1. Michelle Hackman, Siobhan Hughes et Lindsay Wise, « Biden, Democrats Offer Concessions in Border Talks, Move Toward Deal With GOP », The Wall Street Journal, 13 décembre 2023.
  2. Harriet Morris, « Putin says there will be no peace in Ukraine until Russia’s goals, still unchanged, are achieved », Associated Press, 14 décembre 2023.
  3. Julian E. Barnes, « Russia Has Suffered Staggeringly High Losses, U.S. Report Says », The New York Times, 12 décembre 2023.
  4. Julian Cooper, Another Budget For A Country At War : Military Expenditure In Russia’s Federal Budget For 2024 And Beyond, SIPRI, Décembre 2023.