La nouvelle carte officielle de Pékin vivement condamnée par ses voisins

Le film américano-britannique Barbie, sorti en juillet, avait été interdit de diffusion au Vietnam en raison d’une scène comportant une carte représentant la ligne en neuf traits chinoise, marquant les revendications territoriales de Pékin en mer de Chine méridionale. Dans la « carte standard » 2023 publiée lundi 28 août par le ministère chinois des Ressources naturelles, la Chine a étendu ses revendications, passant de neuf à dix traits¹.

• La Cour permanente d’arbitrage de La Haye avait statué en 2016, à la suite d’une procédure lancée par les Philippines, que la Chine « ne dispose d’aucune base juridique pour revendiquer des droits historiques sur les ressources des zones maritimes situées à l’intérieur de la ligne en neuf traits »².
• Depuis le milieu du XXe siècle, la représentation des revendications chinoises en mer de Chine méridionale a été marquée par une inconsistance troublante.
• En 1945, la Chine — dirigée par le Kuomintang — utilisait une ligne en onze traits, dont deux ont été retirés en 1953, supprimant la partie englobant la baie de Beibu³. Cependant, depuis au moins 1984, un dixième trait figure sur les cartes officielles chinoises à l’est de Taïwan⁴.
• Malgré l’ajout d’un dixième trait, Pékin utilise parfois une carte à « seulement » neuf traits, notamment en 2009 lorsque la mission permanente de la Chine auprès des Nations unies ajouta en annexe une carte afin de protester contre des revendications de la Malaisie et du Vietnam concernant les limites du plateau continental⁵.

En addition de l’ajout — qui n’est pas une nouveauté en soi⁶ — d’un trait en mer des Philippines, Pékin a également marqué l’île Bolchoï Oussouriisk, située à la confluence de l’Amour et de l’Oussouri, comme relevant exclusivement du territoire chinois⁷. Depuis 2008, l’île est séparée en deux parties par la signature quatre ans auparavant à Pékin de l’Accord complémentaire sur la section orientale de la frontière entre la Chine et la Russie⁸.

Pékin a également réitéré ses prétentions territoriales en territoire indien.

• Sur la carte, l’État indien d’Arunachal Pradesh ainsi que le plateau d’Aksai Chin sont indiqués comme relevant du territoire chinois.
• Cette stratégie n’est pas nouvelle. Comme le soulignait Pierre Grosser, certains médias chinois font régulièrement disparaître de leurs cartes de l’Inde l’Arunachal Pradesh et le Cachemire.
• Dans un communiqué, le porte-parole officiel du ministère indien des Affaires extérieures, Arindam Bagchi, a déclaré que New Delhi « rejetait ces revendications car elles n’ont aucun fondement »⁹.

Au 31 août, l’Inde, Taïwan, la Malaisie, les Philippines et l’Indonésie ont protesté contre cette carte, dénonçant une tentative de légitimation des revendications territoriales chinoises qui ne reposent sur « aucun fondement en droit international »¹⁰. Selon plusieurs sources, Xi Jinping ne se déplacera pas à New Delhi pour le sommet du G20 des 9 et 10 septembre, et serait remplacé par son Premier ministre Li Qiang¹¹. Quelques jours seulement après avoir vanté la « coopération gagnant-gagnant » entre les pays des BRICS lors de son discours à Johannesburg, le président chinois continue d’exposer au grand jour les relations dégradées entre l’Inde et la Chine.