Un Green New Deal global depuis Washington : le monde de Jake Sullivan

Les États-Unis veulent toujours changer le monde. Après l’IRA et les contrôles à l'exportation, le plus influent conseiller de Biden vient-il d’annoncer au monde une stratégie géoéconomique positive ? Le discours prononcé par Jake Sullivan ce jeudi énonce en tout cas de manière claire le programme géopolitique le plus ambitieux de l’ère Biden — et promet de nouvelles propositions prochainement. Nous le traduisons et le commentons pour la première fois.

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Le Grand Continent
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© AP Photo/Efrem Lukatsky

Ce jeudi 27 avril, l’influent Conseiller national à la Sécurité des États-Unis, Jake Sullivan a présenté à la Brookings Institution sa vision du renouvellement de la stratégie économique américaine.

L’intention du discours de Sullivan est double. En premier lieu, il entend présenter les nouveaux relais de la prépondérance économique des États-Unis à l’échelle globale en cherchant notamment à justifier un investissement nouveau de l’État dans l’économie dans le but de libérer la puissance et l’ingéniosité des marchés privés. En d’autres termes, il explicite la voie américaine dans la guerre des capitalismes politiques à travers une nouvelle doctrine fondée sur l’intervention de l’État pour garantir que les entreprises protègent et renforcent les capacités nationales. 

Quelques références discrètes à l’histoire politique et industrielle des États-Unis — aux décisions prises après 1945 ou au Président Kennedy — ont aussi pour but d’inscrire cette nouvelle orientation stratégique dans le temps long. 

Dans un second temps, ce discours cherche à rassurer les alliés de Washington — tout particulièrement les Européens et les démocraties asiatiques — sur les conséquences de cette nouvelle stratégie : il s’agit « de travailler avec [leurs] partenaires pour s’assurer qu’ils renforcent eux aussi leurs capacités, leur résilience et leur inclusivité » — dans une référence à peine voilée aux réactions notamment européennes à l’Inflation Reduction Act.

Au total, l’architecte de la politique étrangère de Joe Biden dessine un monde structuré en cercles concentriques : au centre, on trouve une puissance américaine rénovée, aux fondations économiques bien assurées. Dans la périphérie immédiate évolueraient les alliés les plus proches des États-Unis dont les efforts, en matière de relance industrielle et écologique, seraient coordonnés avec ceux de Washington. Enfin, dans ce cadre rénové le « reste du monde » pourrait commercer et se développer. 

Cette ambitieuse doctrine renoue avec un imaginaire américain conquérant, dans lequel la prospérité du monde est arrimée à celle des États-Unis, dans un rapport de co-dépendance : « l’Amérique doit être au cœur d’un système financier international dynamique qui permette aux partenaires du monde entier de réduire la pauvreté et d’accroître la prospérité partagée ». C’est la première fois qu’un responsable américain à ce niveau assume aussi explicitement cette ligne.

Je tiens tout d’abord à vous remercier tous d’avoir accepté qu’un conseiller à la sécurité nationale parle d’économie.

Comme la plupart d’entre vous le savent, la secrétaire d’État Yellen a prononcé la semaine dernière un discours important sur notre politique économique à l’égard de la Chine. Aujourd’hui, j’aimerais m’attarder sur notre politique économique internationale au sens large, en particulier en ce qui concerne l’engagement fondamental du président Biden — en fait, les directives qu’il nous donne quotidiennement — d’intégrer plus profondément la politique intérieure et la politique étrangère.

La ligne de conduite de Joe Biden en politique étrangère, dans un arc cohérent qui va du retrait américain de Kaboul au soutien à Taïwan, a été théorisée en grande partie par Jake Sullivan à partir du concept de « politique étrangère pour les classes moyennes ». Ce discours marque cependant une inflexion : dans un monde dont les fondations — jetées par les États-Unis selon Sullivan — sont en train d’être cassées, la politique étrangère américaine doit à nouveau se projeter dans les affaires du monde — mais avec un solide ancrage dans les considérations de politique intérieure.

Après la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis ont conduit un monde fragmenté à construire un nouvel ordre économique international. Ils ont sorti des centaines de millions de personnes de la pauvreté. Ils ont soutenu des révolutions technologiques passionnantes ; cela a aidé les États-Unis et de nombreuses autres nations dans le monde à atteindre de nouveaux niveaux de prospérité.

Mais les dernières décennies ont révélé des fissures dans ces fondations ; une économie mondiale en mutation a laissé de nombreux travailleurs américains et leurs communautés à la traîne ; une crise financière a ébranlé la classe moyenne ; une pandémie a révélé la fragilité de nos chaînes d’approvisionnement ; le changement climatique menace des vies ; l’invasion de l’Ukraine par la Russie a mis en évidence les risques d’une dépendance excessive.

Ce moment exige donc que nous forgions un nouveau consensus.

Les quinze dernières années auraient définitivement ébranlé l’ordre qui était né après la Seconde Guerre mondiale. Tous ces facteurs ont fissuré les fondations de la prospérité globale et, partant, de l’hégémonie américaine, par ailleurs confrontée à l’émergence de la Chine comme rival global et à des phénomènes existentiels comme le changement climatique. Les vies directement « menacées » par le changement climatique renvoient aux calculs d’un chercheur rattaché aux équipes de la Maison-Blanche, R. Daniel Bressler, sur le lien entre les émissions de CO2 et la mortalité, commentés notamment par Andreas Malm dans nos pages.

C’est pourquoi les États-Unis, sous la houlette du président Biden, poursuivent une stratégie industrielle et d’innovation, tant au niveau national qu’avec des partenaires du monde entier ; une stratégie qui investit dans les sources de notre propre force économique et technologique, qui promeut des chaînes d’approvisionnement mondiales diversifiées et résilientes, qui fixe des normes élevées pour tout ce qui concerne le travail et l’environnement, les technologies de confiance et la bonne gouvernance, et qui déploie des capitaux pour fournir des biens publics tels que la santé.

L’idée qu’un « nouveau consensus de Washington », comme certains l’ont appelé, représente en quelque sorte l’Amérique seule, ou l’Amérique et l’Occident à l’exclusion des autres, est tout simplement erronée.

Cette stratégie permettra de construire un ordre économique mondial plus juste et plus durable, dans notre intérêt et dans celui des peuples du monde entier.

Aujourd’hui, je voudrais donc exposer ce que nous nous efforçons de faire. Je commencerai par définir les défis tels que nous les voyons — les défis auxquels nous sommes confrontés. Pour les relever, nous avons dû revoir certaines vieilles hypothèses. Je décrirai ensuite, étape par étape, la manière dont notre approche est adaptée pour relever ces défis.

Lorsque le président Biden est entré en fonction il y a plus de deux ans, le pays était confronté, de notre point de vue, à quatre défis fondamentaux.

Tout d’abord, la base industrielle de l’Amérique avait été vidée de sa substance.

La vision de l’investissement public qui avait dynamisé le projet américain dans les années d’après-guerre — et en fait pendant une grande partie de notre histoire — s’était estompée. Elle avait cédé la place à un ensemble d’idées qui prônaient la réduction des impôts et la déréglementation, la privatisation au détriment de l’action publique et la libéralisation des échanges comme une fin en soi.

Toutes ces politiques reposaient sur un postulat : les marchés allouent toujours le capital de manière productive et efficace, quoi que fassent nos concurrents, quelle que soit l’ampleur de nos défis communs et quel que soit le nombre de garde-fous que nous ayons abattus.

Personne — et certainement pas moi — ne remet en cause le pouvoir des marchés. Mais au nom de l’efficacité d’un marché simplifié à l’extrême, des chaînes d’approvisionnement entières de biens stratégiques, ainsi que les industries et les emplois qui les fabriquaient, ont été transférées à l’étranger. Le postulat selon lequel une libéralisation profonde du commerce aiderait l’Amérique à exporter des biens, et non des emplois et des capacités, a été une promesse faite mais non tenue. 

Un autre postulat bien ancré était que le type de croissance n’avait pas d’importance. Toute croissance était bonne à prendre. Ainsi, diverses réformes se sont combinées pour privilégier certains secteurs de l’économie, comme la finance, tandis que d’autres secteurs essentiels, comme les semi-conducteurs et les infrastructures, s’atrophiaient. Notre puissance industrielle, qui est cruciale pour la capacité d’un pays à continuer d’innover, a subi un véritable coup dur. 

Les chocs d’une crise financière mondiale et d’une pandémie mondiale ont mis à nu les limites de ces hypothèses dominantes.

Le deuxième défi auquel nous avons été confrontés a été de nous adapter à un nouvel environnement défini par la concurrence géopolitique et sécuritaire, avec des impacts économiques importants.

Une grande partie de la politique économique internationale des dernières décennies reposait sur l’idée que l’intégration économique rendrait les nations plus responsables et plus ouvertes, et que l’ordre mondial serait plus pacifique et plus coopératif — que l’intégration des pays dans l’ordre fondé sur des règles les inciterait à adhérer à celles-ci.

Ce n’est pas ce qui s’est passé. Dans certains cas, oui, et dans beaucoup d’autres, non.

Au moment où le président Biden est entré en fonction, nous devions faire face à la réalité d’une grande économie non marchande intégrée dans l’ordre économique international d’une manière qui posait des défis considérables.

La République populaire de Chine a continué à subventionner massivement les secteurs industriels traditionnels, comme l’acier, ainsi que les secteurs clés de l’avenir, comme l’énergie propre, l’infrastructure numérique et les biotechnologies avancées. L’Amérique ne s’est pas contentée de perdre l’industrie manufacturière : elle a érodé sa compétitivité dans des technologies essentielles qui allaient définir l’avenir.

L’intégration économique n’a pas empêché la Chine d’étendre ses ambitions militaires dans la région, ni la Russie d’envahir ses voisins démocratiques. Aucun des deux pays n’est devenu plus responsable ou plus coopératif.

Et ignorer les dépendances économiques qui s’étaient constituées au cours des décennies de libéralisation était devenu vraiment périlleux — de l’incertitude énergétique en Europe aux vulnérabilités de la chaîne d’approvisionnement dans les équipements médicaux, les semi-conducteurs et les minéraux critiques. Il s’agit là du type de dépendances susceptibles d’être exploitées à des fins économiques ou géopolitiques.

Le troisième défi auquel nous étions confrontés était l’accélération de la crise climatique et le besoin urgent d’une transition énergétique juste et efficace.

Lorsque le président Biden est entré en fonction, nous étions loin d’avoir atteint nos objectifs en matière de climat et nous ne disposions pas d’une voie claire vers une offre abondante d’énergie propre, stable et abordable, malgré les efforts considérables déployés par l’administration Obama-Biden pour réaliser des progrès significatifs.

Trop de gens pensaient que nous devions choisir entre la croissance économique et la réalisation de nos objectifs climatiques.

Le recours à l’imaginaire des classes moyennes et du tissu industriel des États-Unis comme déterminants vitaux de la puissance américaine n’est pas propre à Joe Biden. Avant « build back better », Trump avait lui aussi fait campagne sur l’idée de rénovation du pays par la reconstruction d’infrastructures. L’originalité mise en avant par Jake Sullivan consiste dans la politique du Président américain à lier la politique industrielle à la question climatique, identifiée à la fois comme le nœud du problème et un point par lequel doivent passer les solutions.

Le président Biden a vu les choses tout à fait différemment. Comme il l’a souvent dit, lorsqu’il entend « climat », il pense « emplois ». Il est convaincu que la mise en place d’une économie de l’énergie propre au XXIe siècle est l’une des opportunités de croissance les plus importantes de notre temps, mais que pour exploiter cette opportunité, l’Amérique a besoin d’une stratégie d’investissement délibérée et concrète pour faire avancer l’innovation, baisser les coûts et créer des emplois de qualité.

Contrairement à la situation dans de nombreux États membres de l’Union, la question climatique polarise fortement le champ politique aux États-Unis. Face à un certain climato-scepticisme affiché par Trump mais aussi par une partie de la droite républicaine et des milieux d’affaires (carbon coalition), la stratégie de Joe Biden a consisté à faire de la transition une base politique et une opportunité en termes d’emploi et d’industrie.

Enfin, nous avons été confrontés au défi de l’inégalité et des dommages qu’elle cause à la démocratie.

Ici, l’hypothèse dominante était que la croissance basée sur le commerce serait une croissance inclusive, c’est-à-dire que les gains du commerce finiraient par être largement partagés au sein des nations. Mais le fait est que ces gains n’ont pas atteint un grand nombre de travailleurs. La classe moyenne américaine a perdu du terrain, tandis que les riches se portaient mieux que jamais. Les communautés manufacturières américaines ont été vidées de leur substance tandis que les industries de pointe se sont déplacées vers les zones métropolitaines.

Les facteurs d’inégalité économique — que beaucoup d’entre vous connaissent mieux que moi — sont complexes et comprennent des défis structurels tels que la révolution numérique. Mais l’un des principaux facteurs est constitué par des décennies de politiques économiques de ruissellement — des politiques telles que des réductions d’impôts régressives, des coupes drastiques dans les investissements publics, une concentration incontrôlée des entreprises et des mesures actives visant à saper le mouvement ouvrier qui a initialement construit la classe moyenne américaine.

Il est frappant de constater que, juste à côté de la question climatique, Jake Sullivan place celle des inégalités, au sein d’un discours qui semble augurer d’un tournant dans la vision du capitalisme. Les références à l’histoire américaine, si elles ne sont pas toujours nommées, sont clairement identifiables : contre le ruissellement, plus sceptique vis-à-vis du libre échange, la figure que Sullivan esquisse de Joe Biden est celle d’un anti-Reagan.

Les efforts déployés par l’administration Obama pour adopter une approche différente, notamment pour adopter des politiques visant à lutter contre le changement climatique, à investir dans les infrastructures, à étendre le filet de sécurité sociale et à protéger le droit des travailleurs à s’organiser, se sont heurtés à l’opposition des républicains.

Et franchement, nos politiques économiques nationales n’ont pas non plus réussi à prendre pleinement en compte les conséquences de nos politiques économiques internationales.

Par exemple, ce que l’on appelle le « choc chinois », qui a frappé de plein fouet certains pans de notre industrie manufacturière nationale — avec des conséquences importantes et durables — n’a pas été suffisamment anticipé et n’a pas fait l’objet d’une réponse adéquate au fur et à mesure de son déroulement.

Collectivement, ces forces ont ébranlé les fondements socio-économiques sur lesquels repose toute démocratie forte et résistante.

Ces quatre défis ne sont pas propres aux États-Unis. Les économies établies et émergentes y sont également confrontées, parfois avec plus d’acuité que nous.

Lorsque le président Biden est entré en fonction, il savait que la solution à chacun de ces défis consistait à rétablir une mentalité économique favorable à la construction. Et c’est là le cœur de notre approche économique ; construire. Renforcer les capacités, renforcer la résilience, renforcer l’inclusion, chez nous et avec nos partenaires à l’étranger ; renforcer aussi la capacité de produire et d’innover, et de fournir des biens publics tels qu’une infrastructure physique et numérique solide et une énergie propre à grande échelle ; la résilience nécessaire pour résister aux catastrophes naturelles et aux chocs géopolitiques ; et l’inclusivité pour garantir une classe moyenne américaine forte et dynamique et de plus grandes opportunités pour les travailleurs du monde entier.

Tout cela fait partie de ce que nous avons appelé une politique étrangère pour la classe moyenne.

La première étape consiste à poser de nouvelles fondations chez nous, avec une stratégie industrielle américaine moderne.

Mon ami et ancien collègue Brian Deese a parlé assez longuement de cette nouvelle stratégie industrielle, et je vous recommande ses remarques, car elles sont meilleures que toutes celles que je pourrais faire sur le sujet. 

Derrière le slogan « Build Back Better », Joe Biden s’engageait à renforcer les services publics, les infrastructures et le dynamisme technologique américains. Pour aboutir à ces objectifs en mobilisant le budget fédéral, pour mener à bien ce programme, l’Administration Biden a notamment créé, avec le Congrès, de multiples outils de politique industrielle — subventions à la production de semiconducteurs ou d’électricité renouvelable, programmes de recherche, coopérations publics-privés, etc.

Brian Deese fut Directeur du Conseil économique national à la Maison-Blanche entre janvier 2021 et février 2023. À ce poste, il était chargé de coordonner la politique économique au travers de la branche exécutive et de conseiller le Président sur ces sujets. 

Dans le discours évoqué par Jake Sullivan sur la stratégie industrielle de l’Administration Biden, il défendait le rôle moteur des investissements publics dans le développement économique et la sécurité nationale, soulignait les succès législatifs et présentait les défis à surmonter pour mettre en œuvre ce programme et dépenser efficacement les centaines de milliards de dollars qui y ont été alloués.

Mais je résume :

Une stratégie industrielle américaine moderne identifie des secteurs spécifiques qui sont essentiels à la croissance économique, stratégiques du point de vue de la sécurité nationale, et dans lesquels l’industrie privée n’est pas en mesure de réaliser à elle seule les investissements nécessaires à la réalisation de nos ambitions nationales. 

Il déploie des investissements publics ciblés dans ces domaines qui libèrent la puissance et l’ingéniosité des marchés privés, du capitalisme et de la concurrence pour jeter les bases d’une croissance à long terme.

Elle permet aux entreprises américaines de faire ce qu’elles font le mieux : innover, se développer et être compétitives.

Il s’agit de renforcer l’investissement privé, et non de le remplacer. Il s’agit de réaliser des investissements à long terme dans des secteurs vitaux pour notre bien-être national, et non de désigner des gagnants et des perdants.

Cette approche a une longue tradition dans notre pays. En fait, même si l’expression « politique industrielle » est passée de mode, elle est restée discrètement à l’œuvre, sous une forme ou une autre, pour l’Amérique — de la DARPA et de l’internet à la NASA et aux satellites commerciaux.

Aujourd’hui, au cours des deux dernières années, les premiers résultats de cette stratégie sont remarquables.

Le Financial Times a rapporté que les investissements à grande échelle dans la production de semi-conducteurs et d’énergie propre ont déjà été multipliés par 20 depuis 2019, et qu’un tiers des investissements annoncés depuis le mois d’août impliquent un investisseur étranger investissant ici, aux États-Unis.

Nous avons estimé que le total des capitaux publics et des investissements privés découlant du programme du président Biden s’élèvera à quelque 3 500 milliards de dollars au cours de la prochaine décennie.

Prenons l’exemple des semi-conducteurs, qui sont aussi essentiels pour nos biens de consommation actuels que pour les technologies qui façonneront notre avenir, de l’intelligence artificielle à l’informatique quantique en passant par la biologie synthétique.

L’Amérique ne fabrique plus qu’environ 10 % des semi-conducteurs dans le monde, et la production – en général et en particulier lorsqu’il s’agit des puces les plus avancées – est géographiquement concentrée ailleurs.

Cette situation crée un risque économique important et une vulnérabilité en matière de sécurité nationale. C’est pourquoi, grâce à la loi bipartisane CHIPS and Science Act, nous avons déjà constaté une augmentation de l’ordre de grandeur des investissements dans l’industrie américaine des semi-conducteurs. Et ce n’est que le début.

Prenons l’exemple des minéraux essentiels, qui constituent l’épine dorsale de l’avenir énergétique. Aujourd’hui, les États-Unis ne produisent que 4 % du lithium, 13 % du cobalt, 0 % du nickel et 0 % du graphite nécessaires pour répondre à la demande actuelle de véhicules électriques. Pendant ce temps, plus de 80 % des minéraux critiques sont traités par un seul pays, la Chine.

Les chaînes d’approvisionnement en énergie propre risquent d’être instrumentalisées de la même manière que le pétrole dans les années 1970 ou le gaz naturel en Europe en 2022. C’est pourquoi nous agissons en investissant dans la loi sur la réduction de l’inflation et la loi bipartisane sur les infrastructures.

Dans le même temps, il n’est pas possible ni souhaitable de tout construire au niveau national. Notre objectif n’est pas l’autarcie, mais la résilience et la sécurité de nos chaînes d’approvisionnement.

Le renforcement de nos capacités nationales est le point de départ ; mais l’effort s’étend au-delà de nos frontières. Cela m’amène à la deuxième étape de notre stratégie : travailler avec nos partenaires pour s’assurer qu’ils renforcent eux aussi leurs capacités, leur résilience et leur inclusivité.

Le message que nous leur adressons est cohérent : nous poursuivrons sans réserve notre stratégie industrielle dans notre pays, mais nous nous engageons sans ambiguïté à ne pas laisser nos amis de côté. Nous voulons qu’ils nous rejoignent. En fait, nous avons besoin qu’ils nous rejoignent.

La création d’une économie sûre et durable face aux réalités économiques et géopolitiques exigera de tous nos alliés et partenaires qu’ils fassent davantage, et il n’y a pas de temps à perdre. Dans des secteurs comme les semi-conducteurs et l’énergie propre, nous sommes loin du point de saturation mondial des investissements nécessaires, qu’ils soient publics ou privés.

En fin de compte, notre objectif est de disposer d’une base techno-industrielle solide, résiliente et de pointe dans laquelle les États-Unis et leurs partenaires, qu’il s’agisse d’économies établies ou émergentes, pourront investir et sur laquelle ils pourront s’appuyer ensemble.

Le président Biden et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, en ont parlé ici à Washington le mois dernier.

Ils ont publié une déclaration très importante, que je vous encourage à lire si vous ne l’avez pas encore fait. Au fond, cette déclaration dit ceci : des investissements publics audacieux dans nos capacités industrielles respectives doivent être au cœur de la transition énergétique. Les présidents von der Leyen et Biden se sont engagés à travailler ensemble pour faire en sorte que les chaînes d’approvisionnement de demain soient résistantes, sûres et conformes à nos valeurs, y compris en matière de travail.

Ils ont défini des mesures pratiques dans la déclaration pour atteindre ces objectifs, comme l’alignement des incitations respectives en matière d’énergie propre de chaque côté de l’Atlantique et le lancement d’une négociation sur les chaînes d’approvisionnement en minerais critiques et en batteries.

Peu après, le président Biden s’est rendu au Canada. Avec le Premier ministre Justin Trudeau, il a créé un groupe de travail chargé d’accélérer la coopération entre le Canada et les États-Unis dans le même but : garantir notre approvisionnement en énergie propre et créer des emplois pour la classe moyenne de part et d’autre de la frontière.

Quelques jours plus tard, les États-Unis et le Japon ont signé un accord renforçant leur coopération dans le domaine des chaînes d’approvisionnement en minerais essentiels.

Nous tirons donc parti de la loi sur la réduction de l’inflation pour construire un écosystème de production d’énergie propre ancré dans les chaînes d’approvisionnement ici — en Amérique du Nord — et s’étendant à l’Europe, au Japon et ailleurs.

C’est ainsi que nous transformerons l’IRA d’une source de friction en une source de force et de fiabilité. Je pense que vous en saurez plus à ce sujet lors du sommet du G7 à Hiroshima le mois prochain.

L’Administration Biden entend utiliser le poids géo-économique des États-Unis pour transformer l’économie mondiale dans un sens favorable à ses priorités politiques et géostratégiques en semblant vouloir — c’est du moins ce que présente — étendre son Green New Deal. La forme concrète que cela prendra n’est pas détaillée mais renvoyée au G7 d’Hiroshima, qui devrait être l’occasion de futures annonces. Ce projet s’inscrit dans une tradition d’economic statecraft américaine : l’ambition renouvelée des États-Unis devra toutefois se heurter aujourd’hui à un concurrent — la Chine — et des États « non-alignés » qui veulent « faire leur marché » et défendre leurs intérêts — comme au Chili qui a récemment pris la décision de nationaliser une partie de sa production de lithium.

Notre coopération avec nos partenaires ne se limite pas à l’énergie propre.

Par exemple, nous travaillons avec des partenaires — en Europe, en République de Corée, au Japon, à Taïwan et en Inde — pour coordonner nos approches en matière d’incitations pour les semi-conducteurs.

Les projections des analystes sur la localisation des investissements dans les semi-conducteurs au cours des trois prochaines années ont radicalement changé, les États-Unis et des partenaires clés étant désormais en tête de liste.

Permettez-moi également de souligner que notre coopération avec nos partenaires ne se limite pas aux démocraties industrielles avancées.

Fondamentalement, nous devons – et nous avons l’intention de – dissiper l’idée que les partenariats les plus importants de l’Amérique se limitent aux économies établies ; pas seulement en le disant, mais en le prouvant – avec l’Inde, sur tous les sujets, de l’hydrogène aux semi-conducteurs ; avec l’Angola – sur l’énergie solaire sans carbone ; avec l’Indonésie, grâce à son partenariat pour une transition énergétique juste ; avec le Brésil, sur une croissance respectueuse du climat.

Cela m’amène à la troisième étape de notre stratégie : aller au-delà des accords commerciaux traditionnels pour établir de nouveaux partenariats économiques internationaux novateurs axés sur les principaux défis de notre époque.

Le principal projet économique international des années 1990 était la réduction des droits de douane. En moyenne, les droits de douane appliqués par les États-Unis ont été pratiquement réduits de moitié au cours des années 1990. Aujourd’hui, en 2023, notre taux moyen est de 2,4 %, ce qui est faible historiquement et par rapport à d’autres pays.

Bien entendu, ces tarifs ne sont pas uniformes et il reste encore du travail à faire pour abaisser les niveaux tarifaires dans de nombreux autres pays. Comme l’a dit l’ambassadeur Tai, « nous n’avons pas renoncé à la libéralisation des marchés ». Nous avons l’intention de poursuivre des accords commerciaux modernes. Mais définir ou mesurer l’ensemble de notre politique sur la base de la réduction des droits de douane, c’est passer à côté de quelque chose d’important.

Se demander ce qu’est notre politique commerciale aujourd’hui – étroitement définie comme des plans visant à réduire davantage les droits de douane – n’est tout simplement pas la bonne question. La bonne question est la suivante : comment le commerce s’intègre-t-il dans notre politique économique internationale et quels problèmes cherche-t-il à résoudre ?

Le projet des années 2020 et 2030 est différent de celui des années 1990.

Nous connaissons les problèmes que nous devons résoudre aujourd’hui : créer des chaînes d’approvisionnement diversifiées et résistantes ; mobiliser les investissements publics et privés pour une transition énergétique propre et juste et une croissance économique durable ; créer de bons emplois en cours de route, des emplois qui soutiennent les familles ; garantir la confiance, la sécurité et l’ouverture de notre infrastructure numérique ; mettre un terme à la course vers le bas de l’impôt sur les sociétés ; renforcer la protection des travailleurs et de l’environnement ; s’attaquer à la corruption. Il s’agit là d’un ensemble de priorités fondamentales, différentes de la simple réduction des droits de douane.

Nous avons conçu les éléments d’une initiative économique régionale ambitieuse, le cadre économique indo-pacifique, afin de nous concentrer sur ces problèmes et de les résoudre. Nous négocions actuellement des chapitres avec treize pays de la région indo-pacifique, qui accéléreront la transition vers des énergies propres, mettront en œuvre l’équité fiscale, lutteront contre la corruption, fixeront des normes élevées en matière de technologie et garantiront des chaînes d’approvisionnement plus résistantes pour les biens et les intrants essentiels. 

Permettez-moi d’être un peu plus concret. Si l’IPEF avait été en place lorsque le COVID a ravagé nos chaînes d’approvisionnement et que les usines ont tourné au ralenti, nous aurions pu réagir plus rapidement, entreprises et gouvernements confondus, en adoptant de nouvelles options pour l’approvisionnement et le partage des données en temps réel. Voilà à quoi peut ressembler une nouvelle approche sur cette question, comme sur beaucoup d’autres.

Notre nouveau partenariat pour la prospérité économique des Amériques, lancé avec un certain nombre de nos partenaires clés ici dans les Amériques, vise le même ensemble d’objectifs fondamentaux.

Parallèlement, par l’intermédiaire du Conseil du commerce et de la technologie États-Unis-UE et de notre coordination trilatérale avec le Japon et la Corée, nous coordonnons nos stratégies industrielles afin de nous compléter mutuellement et d’éviter une course dans laquelle tous se disputeraient les mêmes objectifs.

Certains ont regardé ces initiatives et ont dit « mais ce ne sont pas des accords de libre-échange traditionnels » ; c’est exactement ce qu’il faut faire. Pour les problèmes que nous essayons de résoudre aujourd’hui, le modèle traditionnel ne suffit pas.

L’ère des correctifs politiques après coup et des vagues promesses de redistribution est révolue. Nous avons besoin d’une nouvelle approche.

En clair : dans le monde d’aujourd’hui, la politique commerciale doit aller au-delà de la réduction des droits de douane et doit être pleinement intégrée à notre stratégie économique, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de nos frontières. Parallèlement, l’administration Biden élabore une nouvelle stratégie mondiale du travail qui fait progresser les droits des travailleurs par le biais de la diplomatie, et nous dévoilerons cette stratégie dans les semaines à venir. 

Cette stratégie s’appuie sur des outils tels que le mécanisme de réaction rapide en matière de travail de l’USMCA, qui fait respecter les droits d’association et de négociation collective des travailleurs. Cette semaine encore, nous avons résolu notre huitième affaire en concluant un accord qui améliore les conditions de travail – un accord gagnant-gagnant pour les travailleurs mexicains et la compétitivité américaine.

Nous sommes en train de continuer à mener un accord historique avec 136 pays pour mettre enfin un terme à la course vers le bas de l’impôt sur les sociétés, qui nuit à la classe moyenne et aux travailleurs. Le Congrès doit maintenant mettre en œuvre la législation d’application, et c’est exactement ce que nous nous efforçons de faire.

Par ailleurs, nous adoptons une nouvelle approche que nous considérons comme un modèle essentiel pour l’avenir : lier le commerce et le climat d’une manière qui n’a jamais été faite auparavant. L’arrangement mondial sur l’acier et l’aluminium que nous négocions avec l’Union européenne pourrait être le premier grand accord commercial à s’attaquer à la fois à l’intensité des émissions et aux surcapacités ; et si nous pouvons l’appliquer à l’acier et à l’aluminium, nous pourrons examiner comment l’appliquer à d’autres secteurs également ; nous pouvons contribuer à créer un cercle vertueux et veiller à ce que nos concurrents ne prennent pas l’avantage en dégradant la planète.

Pour ceux qui ont posé la question, l’administration Biden reste attachée à l’OMC et aux valeurs communes sur lesquelles elle repose : concurrence loyale, ouverture, transparence et primauté du droit ; mais de sérieux défis, notamment les pratiques et politiques économiques non commerciales, menacent ces valeurs fondamentales ; c’est pourquoi nous travaillons avec tant d’autres membres de l’OMC pour réformer le système commercial multilatéral afin qu’il profite aux travailleurs, qu’il tienne compte des intérêts légitimes en matière de sécurité nationale et qu’il s’attaque à des questions urgentes qui ne sont pas pleinement intégrées dans le cadre actuel de l’OMC, comme le développement durable et la transition vers des énergies propres.

En résumé, dans un monde transformé par cette transition vers l’énergie propre, par des économies émergentes dynamiques, par une quête de résilience de la chaîne d’approvisionnement, par la numérisation, par l’intelligence artificielle et par une révolution dans le domaine de la biotechnologie, le jeu n’est plus le même.

Notre politique économique internationale doit s’adapter au monde tel qu’il est, afin que nous puissions construire le monde que nous voulons.

Cela m’amène à la quatrième étape de notre stratégie : mobiliser des milliers de milliards d’investissements dans les économies émergentes – avec des solutions que ces pays élaborent eux-mêmes, mais avec des capitaux rendus possibles par une diplomatie américaine d’un genre différent.

Nous avons lancé un effort majeur pour faire évoluer les banques multilatérales de développement afin qu’elles soient à la hauteur des défis d’aujourd’hui. 2023 est une année importante à cet égard.

Comme l’a souligné la secrétaire d’État, Mme Yellen, nous devons actualiser les modèles de fonctionnement des banques, en particulier de la Banque mondiale, mais aussi des banques régionales de développement. Nous devons étendre leurs bilans pour faire face au changement climatique, aux pandémies, à la fragilité et aux conflits. Et nous devons élargir l’accès à des financements concessionnels de haute qualité pour les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire qui doivent faire face à des défis qui dépassent les frontières d’un seul pays.

Le mois dernier, nous avons assisté à un premier versement sur cet agenda, mais nous devrons faire beaucoup plus.

Nous sommes très enthousiastes à l’idée que le nouveau leadership d’Ajay Banga à la Banque mondiale fasse de cette vision une réalité.

Parallèlement à l’évolution des banques multilatérales de développement, nous avons également lancé un effort majeur pour combler le déficit d’infrastructures dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Nous l’appelons le Partenariat pour l’infrastructure et l’investissement mondiaux (PGII). Le PGII mobilisera des centaines de milliards de dollars pour le financement d’infrastructures énergétiques, physiques et numériques d’ici à la fin de la décennie.

Contrairement aux financements prévus dans le cadre de l’initiative « Road and Belt », les projets menés dans le cadre du PGII sont transparents, conformes aux normes les plus strictes et au service d’une croissance durable, inclusive et à long terme. Depuis le lancement de cette initiative il y a un peu moins d’un an, nous avons déjà réalisé des investissements importants dans des domaines aussi variés que les mines nécessaires à l’alimentation des véhicules électriques ou les câbles de télécommunications sous-marins mondiaux.

Dans le même temps, nous sommes également déterminés à remédier au surendettement d’un nombre croissant de pays vulnérables. Nous avons besoin d’un véritable allègement, et pas seulement d’« une extension doublée d’un simulacre » (extending and pretending). Et nous devons faire en sorte que tous les créanciers bilatéraux, officiels et privés, partagent le fardeau.

Cela inclut la Chine, qui s’est efforcée d’asseoir son influence en accordant des prêts massifs aux pays émergents, presque toujours assortis de conditions. Nous partageons l’avis de beaucoup d’autres que la Chine doit maintenant s’imposer comme une force constructive pour aider les pays surendettés.

Enfin, nous protégeons nos technologies fondamentales avec une petite cour et une haute clôture.

Comme je l’ai déjà dit, notre mission est d’inaugurer une nouvelle vague de la révolution numérique, qui garantisse que les technologies de la prochaine génération soient au service de nos démocraties et de notre sécurité, plutôt qu’elles se développent à leur détriment.

Nous avons mis en œuvre des restrictions aux exportations des technologies de semi-conducteurs les plus avancées vers la Chine. Ces restrictions sont fondées sur des préoccupations directes en matière de sécurité nationale. Nos principaux alliés et partenaires nous ont emboîté le pas, en fonction de leurs propres préoccupations en matière de sécurité.

Nous améliorons également le contrôle des investissements étrangers dans les domaines critiques liés à la sécurité nationale ; et nous progressons dans le traitement des investissements sortants dans les technologies sensibles ayant un lien avec la sécurité nationale.

Il s’agit de mesures adaptées. Il ne s’agit pas, comme le dit Pékin, d’un « blocus technologique ». Elles ne visent pas les économies émergentes ; elles se concentrent sur une tranche étroite de technologie et sur un petit nombre de pays qui ont l’intention de nous défier militairement.

Un mot sur la Chine de manière plus générale. Comme l’a récemment déclaré la présidente von der Leyen, nous sommes en faveur d’une réduction des risques et d’une diversification, non d’un découplage. Nous continuerons à investir dans nos propres capacités et dans des chaînes d’approvisionnement sûres et résistantes. Nous continuerons à faire pression pour que nos travailleurs et nos entreprises bénéficient de conditions équitables et à nous défendre contre les abus.

Nos contrôles à l’exportation resteront étroitement axés sur les technologies susceptibles de faire pencher la balance militaire. Nous veillons simplement à ce que les technologies américaines et alliées ne soient pas utilisées contre nous. Nous n’interrompons pas les échanges commerciaux.

En fait, les États-Unis continuent d’entretenir des relations commerciales et d’investissement très importantes avec la Chine. Le commerce bilatéral entre les États-Unis et la Chine a atteint un nouveau record l’année dernière.

Si l’on s’éloigne de l’économie, nous sommes en concurrence avec la Chine sur de multiples plans, mais nous ne cherchons pas l’affrontement ou le conflit. Nous cherchons à gérer la concurrence de manière responsable et à collaborer avec la Chine dans la mesure du possible. Le président Biden a clairement indiqué que les États-Unis et la Chine peuvent et doivent travailler ensemble sur des défis mondiaux tels que le climat, la stabilité macroéconomique, la sécurité sanitaire et la sécurité alimentaire.

Pour gérer la concurrence de manière responsable, il faut en fin de compte deux parties consentantes. Il faut un certain degré de maturité stratégique pour accepter de devoir maintenir des lignes de communication ouvertes, même lorsque nous prenons des mesures pour concourir à armes égales.

Comme l’a dit la secrétaire d’État Yellen la semaine dernière dans son discours sur ce sujet, nous pouvons défendre nos intérêts en matière de sécurité nationale, avoir une concurrence économique saine et travailler ensemble dans la mesure du possible, mais la Chine doit être disposée à jouer son rôle.

Alors, à quoi ressemble le succès ?

Le monde a besoin d’un système économique international qui fonctionne pour nos salariés, pour nos industries, pour notre climat, pour notre sécurité nationale et pour les pays les plus pauvres et les plus vulnérables du monde.

Cela signifie qu’il faut remplacer une approche unique, axée sur les hypothèses trop simples que j’ai énoncées au début de mon discours, par une approche qui encourage les investissements ciblés et nécessaires dans des domaines où les marchés privés ne sont pas en mesure d’agir seuls, même si nous continuons à exploiter le pouvoir des marchés et de l’intégration.

Cela signifie qu’il faut laisser aux partenaires du monde entier la possibilité de rétablir les accords entre les gouvernements et leurs électeurs et travailleurs.

Cela signifie qu’il faut fonder cette nouvelle approche sur une coopération et une transparence approfondies afin de garantir que nos investissements et ceux de nos partenaires se renforcent mutuellement et soient bénéfiques.

Et cela signifie revenir à la conviction fondamentale que nous avons défendue pour la première fois il y a 80 ans : l’Amérique doit être au cœur d’un système financier international dynamique qui permette aux partenaires du monde entier de réduire la pauvreté et d’accroître la prospérité partagée ; et un filet de sécurité sociale efficace pour les pays les plus vulnérables du monde est essentiel à nos propres intérêts fondamentaux.

Il s’agit également d’établir de nouvelles normes qui nous permettent de relever les défis posés par l’intersection des technologies de pointe et de la sécurité nationale, sans entraver le commerce et l’innovation au sens large.

Cette stratégie nécessitera de la détermination, un engagement résolu à surmonter les obstacles qui ont empêché notre pays et nos partenaires de construire rapidement, efficacement et équitablement comme nous avons pu le faire dans le passé.

Mais c’est la voie la plus sûre pour restaurer la classe moyenne, assurer une transition juste et efficace vers les énergies propres, sécuriser les chaînes d’approvisionnement essentielles et, à travers tout cela, restaurer la confiance dans la démocratie elle-même.

Comme toujours, nous avons besoin du partenariat total et bipartisan du Congrès pour réussir.

Nous avons besoin du soutien du Congrès pour relancer la capacité unique de l’Amérique à attirer et à retenir les talents les plus brillants du monde entier.

Nous avons besoin du partenariat total du Congrès dans nos initiatives de réforme du financement du développement.

Et nous devons doubler nos investissements dans les infrastructures, l’innovation et les énergies propres. Notre sécurité nationale et notre vitalité économique en dépendent.

Permettez-moi de conclure par ceci.

Le président Kennedy aimait à dire que « la marée montante soulève tous les bateaux ». Au fil des ans, les partisans de l’économie de ruissellement se sont approprié cette phrase pour l’utiliser à leurs propres fins.

Mais le président Kennedy ne disait pas que ce qui est bon pour les riches est bon pour la classe ouvrière. Il disait que nous sommes tous dans le même bateau.

Et regardez ce qu’il a dit ensuite : « Si une partie du pays reste immobile, tôt ou tard, la marée descendante fait couler tous les bateaux. »

C’est vrai pour notre pays, c’est vrai pour notre monde. n fin de compte, sur le plan économique, avec le temps, nous allons nous élever – ou tomber – ensemble.

Et cela vaut pour la force de nos démocraties comme pour la force de nos économies.

La mise en œuvre de cette stratégie à l’intérieur et à l’extérieur de nos frontières donnera lieu à des débats raisonnables ; et cela prendra du temps. L’ordre international qui a émergé après la fin de la Seconde Guerre mondiale, puis de la Guerre froide, ne s’est pas construit du jour au lendemain. L’ordre international à venir ne s’édifiera pas plus vite. 

Mais ensemble, nous pouvons travailler à l’amélioration de tous les habitants, communautés et industries des États-Unis, et nous pouvons faire de même avec nos amis et partenaires partout dans le monde. 

C’est cette vision que l’administration Biden doit et va s’efforcer de réaliser.

C’est ce qui nous guide dans nos décisions politiques à l’intersection de l’économie, de la sécurité nationale et de la démocratie.

Et c’est le travail que nous ferons non seulement en tant que gouvernement, mais aussi avec tous les éléments des États-Unis, et avec le soutien et l’aide de nos partenaires, qu’ils soient gouvernementaux ou non, dans le monde entier.

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