Le spectre de la Guerre d’Hiver de 1939 entre la Finlande et la Russie plane sur le conflit en cours depuis huit mois, alors que des experts essaient de trouver des parallèles entre les deux évènements.

  • Lors du conflit, les Finlandais, à la manière des Ukrainiens d’aujourd’hui, disposaient d’une armée bien moindre par rapport à celle des Russes, mais avaient réussi à résister à une invasion soviétique massive, aboutissant à un accord de paix inattendu. 
  • L’utilisation astucieuse du terrain et de la météo par les Finlandais avait permis de dépasser la force militaire russe. Certains observateurs pensent que les Ukrainiens, qui ont déjà prouvé leur habileté tactique tout au long de cette guerre, pourraient suivre la même stratégie que les Finlandais de la Guerre d’Hiver.
  • L’un des enseignements de cette Guerre d’Hiver est que les hostilités entre la Russie et l’Ukraine continueront sûrement cet hiver, en dépit des conditions météorologiques extrêmes du climat ukrainien.

Les approches purement militaires entre la Russie et l’Ukraine devraient être dans la continuité de ce que les deux pays ont entrepris jusqu’à présent. 

  • Un élément clé de cette stratégie pour la Russie sera la mobilisation en masses de troupes nouvellement enrôlées en Ukraine pour stabiliser la ligne de front.
  • Quant à l’Ukraine, elle s’est battue pendant huit mois pour reprendre l’initiative aux Russes dans cette guerre. Kyiv cherchera à continuer à profiter de cet élan et utiliser l’hiver comme une opportunité pour continuer à reprendre son territoire.
  • Pour les deux pays, il faudra cependant prendre en compte les caractéristiques inhérentes à l’hiver ukrainien. Le froid sape l’énergie des soldats, la mobilité des véhicules ainsi que la dissimulation des soldats sont amoindries.

Pour la Russie, l’objectif sera de créer une guerre d’attrition en provoquant un conflit stratégique autour de l’énergie.

  • La guerre énergétique de Poutine, qui a déjà affecté 30 % de la capacité de production d’électricité en Ukraine, entraînera des restrictions de chauffage, davantage de ruptures de conduites d’eau et d’autres difficultés pour la population.
  • Alors que les réserves de vêtements chauds et de bois de chauffage ont déjà commencé, de nombreux Ukrainiens sont soit déplacés ou vivent dans des résidences endommagées, les rendant plus vulnérables aux ravages de l’hiver.

Cette « privation de chaleur » par Poutine pendant les mois les plus froids de la guerre est un aspect fondamental de sa stratégie. 

  • Elle vise à terroriser la population et à faire pression sur le gouvernement ukrainien pour obtenir un cessez-le-feu ou un autre arrangement.
  • À l’heure actuelle, Poutine espérait probablement que sa guerre stratégique contre les infrastructures énergétiques ukrainiennes aurait eu un impact plus important sur les populations des pays européens, dépendantes de l’énergie russe.
  • Cependant, une combinaison de nouvelles sources d’énergie, de rationnement et de réserves explique pourquoi Poutine n’a pas encore été en mesure d’exercer une influence sur les Européens pour réduire leur soutien à l’Ukraine.

Pour réussir à relever ces défis, l’Ukraine devra gagner la guerre d’adaptation1.

  • Les Finlandais en leur temps avaient constaté qu’il n’était « pas suffisant de s’adapter à une géographie difficile. L’objectif devrait plutôt être de développer de nouvelles formes d’art opérationnel qui permettent de tirer parti de cette même géographie contre un ennemi mal adapté »2.
  • Tout comme les Ukrainiens s’étaient adaptés lors des avancées russes sur Kiyv en mars dernier en employant des équipes d’infanterie anti blindées, il faudra que l’Ukraine trouve à nouveau des moyens pour canaliser, détourner et démoraliser les troupes russe.
Sources
  1. Mick Ryan, « How Ukraine is winning in the adaptation battle against Russia », Engelsberg Ideas, 24 août 2022.
  2. Iskander Rehman, « Lessons from the Winter War : Frozen grit and Finland’s Fabian Defense », War on the Rocks, 20 juillet 2016.