Les Nations unies admettent qu’il n’y a pas de définition universelle de ce que recouvre le terme de « diplomatie » ou de « politique étrangère féministe ». On peut toutefois admettre que cette ligne consiste à promouvoir l’émancipation économique, la lutte contre les violences sexuelles et sexistes ainsi que l’amélioration de la participation des femmes dans la vie politique.

Plusieurs pays ont adopté depuis 2014 cette approche alternative de défense de l’égalité des genres et de l’émancipation des femmes dans le monde.

  • Le Canada (2017), la France (2019), le Mexique (2020), l’Espagne (2021), le Luxembourg (2021), l’Allemagne (2021) et le Chili (2022) défendent ouvertement une politique étrangère féministe.
  • Concrètement, la France s’est engagée à atteindre 50 % d’aide axée sur le genre d’ici 2022, par rapport à 30 % en 2018.
  • Le Canada s’est engagé à garantir que pas moins de 95 % de l’aide bilatérale au développement international ciblera ou intègrera l’égalité des sexes d’ici 2022.
  • L’Espagne a le pourcentage le plus élevé d’aide publique au développement consacrée à l’égalité des sexes comme objectif principal (24 %)1.

Depuis 2014, ces initiatives qui mettent en avant une perspective de genre au sein des engagements étatiques sont également assez critiques, notamment vis-à-vis des pays du Moyen-Orient.

  • En 2015, les remarques de l’ancienne ministre des Affaires étrangères Margot Wallström sur le bilan de l’Arabie saoudite en matière de droits des femmes et de démocratie ont conduit le royaume à rappeler son ambassadeur à Stockholm.
  • En 2016, l’opinion publique suédoise avait pointé du doigt l’hypocrisie de son gouvernement qui affirmait alors qu’il avait contribué à l’élaboration de nouvelles législations liées aux violences sexistes dans une vingtaine de pays, tout en continuant à exporter des d’armes vers des régimes autoritaires.

Cette semaine, le premier pays ayant mis en oeuvre une politique étrangère féministe, désormais dirigé par un gouvernement de droite depuis les élections de septembre, a annoncé qu’il souhaitait abandonner cette politique pionnière.

  • Après la présentation du nouveau gouvernement, le ministre des Affaires étrangères Tobias Billström a déclaré que « la politique étrangère féministe de la Suède arrivera à son terme lorsque le nouveau gouvernement prendra le relais ».
  • Lancée par le gouvernement de gauche de Stefan Löfven en 2014, il a affirmé que cette étiquette pourrait être « contre-productive » pour l’agenda international du pays2.

Ce revirement marque un virage important dans les priorités du nouveau gouvernement suédois, dont le ministre des Affaires étrangères a déclaré que le pays fait désormais face à d’autres priorités en matière de politique étrangère.

  • L’adhésion de la Suède à l’OTAN apparaît comme la première priorité qui doit être un succès pour que « nous [la Suède] puissions remplir les parties de l’accord tripartite entre la Turquie, la Finlande et la Suède afin de devenir membres et améliorer notre situation en matière de sécurité ».
  • Billström a renchéri sur le fait que l’égalité des sexes reste « une valeur fondamentale en Suède et également pour ce gouvernement, mais nous n’allons pas utiliser l’expression ‘politique étrangère féministe’, car elle a masqué le fait que la politique étrangère suédoise doit être basée sur ce que sont les intérêts suédois et les valeurs suédoises ».

Comme le rappelait François Hublet à l’occasion d’une étude publiée après les élections, consacrant le parti d’extrême-droite Démocrates de Suède (SD) comme la deuxième force politique du pays (première au sein de la coalition au pouvoir), le programme politique de la droite et de l’extrême-droite en Suède est structuré autour de la sécurité et de l’État-providence : 

  • « […] lutte anti-gang, anti-terroriste, contre les « crimes d’honneur » et les « sociétés parallèles », renforcement de la police, fin de l’accueil des demandeurs d’asile non issus du « voisinage proche » de la Suède, limitation stricte de l’immigration… la thématique de la lutte contre la criminalité est systématiquement associée dans son [Jimmie Åkesson, président des Démocrates de Suède] discours aux dangers supposés de l’immigration ».