Lorsque vous étiez à l’université, vous avez été l’une des leaders du mouvement étudiant en 2018. Pouvez-vous revenir sur votre parcours, sur ce qui vous a amenée à vous engager ? Y a-t-il un événement spécifique qui vous a poussé à agir ?
Mon activisme s’est produit de manière spontanée, comme la révolution et l’insurrection à l’intérieur du Nicaragua.1 Deux semaines avant le 18 avril 2018, nous avions un pays qui protestait pour préserver la plus grande réserve naturelle du Nicaragua, l’Indio Maíz. Le gouvernement voulait expulser les paysans de la réserve, qui sont descendus dans la rue pour empêcher le gouvernement de prendre leurs terres. La proposition d’un projet de loi d’une réduction de 5 % du montant des retraites a aussi contribué au déclenchement des manifestations. Le régime a réagi en envoyant ce que nous nommons ses « foules”. Ces « foules” sont des groupes de personnes qui soutiennent le gouvernement mais qui ne sont pas légalement constitués. Dans certains cas en revanche, ils le sont, comme Juventudes, qui sont des groupes qui font partie du gouvernement. Nous les appelons les foules sandinistes, car elles dérivent du Front sandiniste. Dans la soirée du 18 avril 2018, les étudiants ont manifesté devant l’Université Centroméricaine. Le régime a envoyé ses « foules » pour les intimider. Cette réaction gouvernementale a généré une révolte encore plus grande, et les différentes universités publiques du pays ont commencé à appeler à des manifestations dès le lendemain.
Mon activisme a donc commencé le 19 avril. J’avais demandé à une amie qui vivait près de l’université de m’accompagner afin d’aider les étudiants qui s’étaient organisés via Twitter. Nous avons rencontré d’autres étudiants, de toutes les filières et de toutes les universités. Fondamentalement, le 19 avril est la date qui a complètement changé le Nicaragua. Ce jour-ci, tous les secteurs de la société civile ; les étudiants, les paysans et les travailleurs sont descendus dans les rues pour protester. Le régime a répondu par la violence en utilisant des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc. À l’époque, j’étais étudiante en deuxième année de génie biologique à l’Université nationale autonome du Nicaragua. J’ai donc pu aider les manifestants qui avaient été blessés par les tirs. Je me souviens que nous nous sommes rendus à l’église de Santa Marta où nous avons parlé au prêtre, qui nous a permis de nous réfugier afin d’installer le premier poste médical près de l’Université Centroaméricaine.
Nous essayions d’aider les jeunes qui manifestaient dans le secteur de l’Université Centroaméricaine et de l’Université Nationale d’Ingénierie, mais la police anti-émeute a commencé à nous poursuivre avec des armes. Nous avons dû nous enfuir. J’ai finalement réussi à rentrer chez moi. Cette nuit-là, les autorités nicaraguayennes ont pris le contrôle de l’Université Polytechnique du Nicaragua, et ont tué un étudiant, Richard Paul. Ainsi, après le 19 avril, les manifestations ne visaient plus à renverser une loi, mais à réclamer que justice soit faite.
Les jours suivants, il y a eu des protestations massives. J’étais à l’Université Polytechnique du Nicaragua et je participais à des sit-in et des marches. Désormais, le régime ne répondait plus par des balles en caoutchouc et des gaz lacrymogènes, mais tuait les manifestants qui protestaient pacifiquement. J’étais responsable d’un groupe de 15 personnes que j’accompagnais. On partageait ce qui se passait sur les réseaux sociaux, en utilisant des hashtags et en étiquetant toutes les organisations de défense des droits de l’homme. Nous avons également essayé de recenser les personnes qui avaient été blessées.
Puis, la direction de l’université nous a demandé de retourner en classe. Le 7 mai 2018, un groupe de jeunes manifestants a pris possession de l’université. Dans les universités publiques, il existe une organisation qui est le bras politique du Front sandiniste, appelée l’Union nationale des étudiants du Nicaragua. C’est une organisation étudiante qui manipule le corps étudiant, c’est un opérateur politique du Front sandiniste lui-même. La principale raison pour laquelle l’Université nationale autonome du Nicaragua a été occupée était d’obtenir la démission des dirigeants de l’Union nationale car ils étaient totalement apathiques face à la répression qui se produisait à l’époque, et ils ne s’occupaient pas des intérêts des étudiants.
Lorsque nous avons occupé l’université, nous nous sommes barricadés et j’ai été élue présidente de la logistique. Mon travail consistait à documenter les violations des droits de l’homme, à recenser les étudiants de l’université, à m’occuper des dons de la société civile et de la diaspora. C’était un travail logistique qui impliquait beaucoup de responsabilités. L’université a été occupée pendant 2 mois et 13 jours, jusqu’au 13 juillet, date à laquelle le régime a mené ce qu’il a appelé l’opération « nettoyage », qui consistait à faire sortir les étudiants de l’université. Je tiens également à souligner que le 16 mai, la première table de dialogue national a été mise en place. Bien qu’elle ait échoué, cette table de dialogue a permis aux organisations de défense des droits de l’homme d’entrer dans le pays pour documenter les violences commises. Néanmoins, cette table de dialogue a aussi donné de l’oxygène au régime, qui s’est armé et a organisé des groupes paramilitaires. Le pays a été paralysé pendant environ trois mois, tandis que ces groupes paramilitaires sont allés dans différentes municipalités et universités pour assassiner et faire disparaître les manifestants.
Un groupe paramilitaire chargé d’expulser les étudiants de l’Université nationale autonome du Nicaragua nous a attaqué du 13 juillet à 11h00 au 14 juillet à 8h00, soit plus de 12 heures sous une grêle de balles. L’Église a joué un rôle très important car le Nicaragua est encore un pays très conservateur. L’Église catholique a servi de médiateur tout au long de ce processus depuis le début de la crise. Après cette attaque, nous avons été emmenés dans différents refuges. Je suis restée cachée pendant deux mois jusqu’au 23 septembre, date à laquelle j’ai été capturée à 5h30 du matin par la police et les paramilitaires, puis emmenée au centre de torture. J’étais enceinte de trois mois, j’ai subi des violences physiques et psychologiques. Les autorités nicaraguayennes m’ont forcé à avorter. J’ai été libéré grâce à la pression d’Amnesty International. La Commission interaméricaine des droits de l’homme m’a accordé des mesures de précaution et j’ai été libérée, mais pas définitivement. Deux semaines après ma convalescence, le bureau du procureur a émis un nouveau mandat d’arrêt et j’ai dû partir d’urgence au Costa Rica. J’ai vécu au Costa Rica pendant six mois et j’ai commencé à travailler là-bas avec la Fondation Area pour documenter les témoignages de personnes dont les droits de l’homme avaient été violés dans le cadre des manifestations. Je suis ensuite retournée au Nicaragua en tant que vice-présidente d’une organisation de jeunes étudiants et de défenseurs des droits de l’homme où nous avions une influence politique et où nous avons commencé à travailler sur la justice transitionnelle.
Vous dites que votre engagement a commencé le 18 ou 19 avril, aviez-vous déjà une vocation, des positions politiques, ou était-ce tout à fait soudain et spontané ?
Mon engagement était spontané. À ce moment-là, le pays s’est retourné et c’est la compassion et le besoin d’aide qui ont motivé ceux qui sont aujourd’hui des défenseurs, des leaders ou des acteurs de la société civile. Je faisais partie de cette Union nationale des étudiants nicaraguayens. Ce sont justement les étudiants qui descendaient dans la rue pour défendre les personnes âgées et qui affrontaient les paramilitaires du régime pendant que le pays était complètement paralysé.
En tant que militante pour la construction de la mémoire d’un pays au pouvoir répressif et en tant que victime de cette répression, comment définissez-vous votre identité, quelle influence a eu votre militantisme ?
Je ne suis définitivement plus la même personne depuis avril 2018. J’ai beaucoup changé. J’étudiais la géologie, rien à voir avec les droits de l’homme ou la politique. J’ai grandi en tant que personne. Parce que j’ai subi les mêmes traumatismes, je peux mieux comprendre la douleur des victimes et de leurs familles. J’ai vraiment mûrie au cours de ces mois dans tous les aspects de ma vie.
Après tout ce qui s’est passé au cours de votre militantisme, y-a-t-il des choses que vous auriez faites différemment, quel est votre recul sur ces évènements ?
Au moment de l’insurrection d’avril 2018 la plupart d’entre nous étions jeunes. Nous nous sommes laissés emporter par nos émotions, sans en mesurer les conséquences. Si je devais changer quelque chose, j’essayerais d’établir un dialogue honnête avec l’opposition pour mieux affronter Daniel Ortega. Le régime a divisé l’opposition et nous en voyons maintenant les conséquences : tous les dirigeants politiques et les figures les plus représentatives de l’insurrection d’avril ont été condamnées.
Quand vous dites dialogue, est-ce au sein de l’opposition ou pensez-vous aussi à un dialogue avec le pouvoir d’Ortega ?
Il y a eu deux tentatives de dialogue. Le premier dialogue avec l’opposition a été un échec parce qu’à l’époque, nous étions divisés. L’Église catholique jouait le rôle de médiateur mais elle n’a pas pu atteindre de consensus. En 2019, une deuxième tentative de dialogue a eu lieu, avec une table plus restreinte entre l’opposition et le gouvernement. La seule chose qui ait été obtenue fut la libération de 80 % des prisonniers politiques. En revanche, les violations des droits de l’homme n’ont jamais été reconnues par le régime.
Face à la répression d’Ortega, comment percevez-vous l’organisation de cette lutte pour les droits de l’homme et les dynamiques qui la composent, et que pensez-vous de l’efficacité de cette mobilisation au Nicaragua ?
L’opposition a eu deux ans pour s’organiser et créer une alternative solide au pouvoir de Daniel Ortega. Mais, de nouveau, les divisions au sein de l’opposition ont empêchées toute perspective de changement politique. Nous n’avons pas réussi à établir d’agenda commun.
Comment décririez-vous votre militantisme à distance, est-il possible de mener votre engagement depuis l’étranger, existe-t-il des moyens de structurer le militantisme depuis l’étranger ?
Même si je vis à l’étranger, ma famille est toujours au Nicaragua. J’ai désormais un casier judiciaire. J’ai été condamnée pour terrorisme. Si le régime commence à penser que je suis de nouveau une menace, ma famille pourrait être en danger. C’est pourquoi, j’ai choisi de dénoncer les atteintes aux droits de l’homme, non pas à travers des conférences de presse mais de façon plus discrète. J’ai une petite sœur, un frère, des oncles et tantes qui pourraient être mis en prison si je retournais au Nicaragua.
Quelles sont vos priorités aujourd’hui, pour vous et votre combat ?
Ma priorité est de continuer de suivre attentivement la situation au Nicaragua et d’essayer d’obtenir la libération des prisonniers politiques. Je crois qu’il est désormais nécessaire d’établir une discussion avec le gouvernement pour tenter d’obtenir la mise en place de mécanismes de protection des droits de l’homme.
Pensez-vous qu’il soit possible de mener cette lutte à l’intérieur du Nicaragua ? Par exemple, nous savons que certaines personnes s’exilent au Costa Rica ou au Honduras. Pensez-vous que la solution puisse venir de l’intérieur, de l’extérieur, ou des deux ?
Il y a beaucoup d’organisations de la société civile qui opèrent maintenant en dehors du pays. Le Nicaragua vit en état de siège. Si une personne ose exprimer un avis dissident, elle risque d’aller en prison ou de disparaître. C’est d’autant plus vrai dans les zones rurales et dans le nord du pays. Il y a très peu de choses que l’on peut faire depuis l’intérieur du pays. Le régime a entamé une chasse politique contre l’ensemble des membres de l’opposition. Les candidats de l’opposition à la présidence, les journalistes, les leaders étudiants sont emprisonnés.
Existe-t-il des liens entre les militants ou les organisations militantes de la région avec d’autres pays ? Et si ce n’est pas le cas, devrait-il y avoir une telle coopération ?
Je pense que le plus grand espoir que nous ayons est d’établir une coopération avec le Costa Rica. La plupart des militants s’y trouvent aujourd’hui.
Quelle serait la solution idéale pour sortir de la crise ? Vous avez parlé de dialogue, que faudrait-il faire si un tel dialogue devait avoir lieu demain, qui devrait être autour de la table et quels devraient en être les résultats ?
La première condition à l’établissement d’un dialogue serait la libération immédiate de tous les prisonniers politiques. Des représentants de la société civile devraient être invités à participer aux discussions. La première chose que nous proposons est la création d’une Commission de vérité qui mènerait des enquêtes sur les crimes commis par le régime. L’appareil judiciaire devrait être complètement restructuré au Nicaragua. En effet, actuellement, toutes les institutions de l’État sont sous la pression du régime. Enfin, il faudrait donner des réparations financières aux victimes. Dès lors que ces conditions seront remplies, nous pourrons signer un accord de sortie de crise. Néanmoins, le Nicaragua est un régime autoritaire. Je crains qu’il soit utopique de penser qu’une justice transitionnelle puisse être mise en place.
Lorsque vous pensez à de tels processus, en avez-vous un en tête ? Par exemple, pensez-vous aux accords de paix colombiens ou à quelque chose de similaire ?
La justice transitionnelle est un mécanisme novateur pour nous, Nicaraguayens. La plupart des manifestants, moi y compris, étions apathiques à l’égard de la politique. J’avais 19 ans à l’époque. La seule chose qui comptait pour moi était de réussir mes études. La politique du pays n’était pas quelque chose qui m’intéressait. Depuis l’implosion de cette crise, je pense qu’il est nécessaire qu’une justice transitionnelle à l’image de celle mise en place en Colombie soit également développée au Nicaragua.
Quelle serait votre réponse aux critiques qui ont été faites aux accords de paix colombiens ? Serait-il nécessaire de penser à un autre modèle en tenant compte des particularités du Nicaragua ?
La justice transitionnelle s’adapte au contexte. Je pense que les critiques viennent du fait que le pardon est difficile à obtenir mais il reste néanmoins nécessaire.
Que pensez-vous du modèle d’élections libres auxquelles tout le monde pourrait participer ?
Il s’agit d’une autre voie possible. L’organisation d’élections libres pourrait conduire à l’élection d’un nouveau gouvernement. Une transition pourrait alors débuter avec l’établissement d’un accord de paix.
En parlant de la comparaison entre pays, dans quelle mesure pourrait-on envier le Costa Rica en comparant les deux situations ? Et, en lien avec cette question, peut-on attendre d’un pays comme le Costa Rica un plus grand leadership dans la région ?
Le Costa Rica est un État de droit dans lequel les citoyens ont la possibilité de s’exprimer sans crainte. Les droits de l’homme sont respectés et des lois existent pour les protéger. Afin de promouvoir une solution à la crise nicaraguayenne, je pense qu’il faut plus de fermeté. Au Chili, par exemple, Antonia Urriola s’est montrée très critique envers le gouvernement nicaraguayen. Elle faisait partie de la Commission Interaméricaine lorsque cette mobilisation a eu lieu au Nicaragua. Elle a donc suivi de très près ce que les Nicaraguayens ont vécu. Je pense également que les dirigeants sud-américains devraient exercer une pression plus forte sur Ortega.
Quel impact le retrait d’Ortega de l’Organisation des États Américains, qui vise à défendre la démocratie et les droits de l’homme, a-t-il sur la lutte pour les droits de l’homme au Nicaragua, et quelle est la relation qui pourrait être établie avec les organisations internationales lorsque le pays lui-même ne se soumet pas aux règles et refuse de faire partie des sommets ?
Le Nicaragua a signé un accord commercial avec l’Union européenne. Les États européens se sont montrés très fermes à l’encontre du régime de Daniel Ortega mais l’Organisation des États américains n’a pas été suffisamment réactive.
Pensez-vous à une autre organisation, même au sein de la région, ou à une autre manière de faire du lobbying international par le biais d’organisations ?
La plupart des exportations du Nicaragua sont destinées au marché étasunien. Le gouvernement américain est donc le seul qui puisse véritablement exercer une pression sur Ortega.
Que pensez-vous de la récente expulsion du Nicaragua et d’autres pays du Sommet des Amériques ?
Je pense que c’était une décision hâtive. Il n’y a pas eu d’analyse du contexte dans son entièreté. Le Nicaragua, le Venezuela et Cuba ont été exclus du Sommet des Amériques parce que ce sont des régimes autoritaires. Je ne suis pas experte, mais je pense que si ces pays avaient été présents au Sommet, les violations des droits de l’homme qu’ils commettent auraient pu être dénoncées au niveau mondial.
Pouvez-vous penser à d’autres moyens qui pourraient affecter ou être efficaces ?
Le Nicaragua veut éviter de subir des sanctions économiques car le pouvoir du régime repose sur de la corruption dont il se sert pour financer la police, l’armée et les paramilitaires. Une solution supplémentaire pourrait être une négociation directe entre une commission du gouvernement américain et le gouvernement nicaraguayen.
Voyez-vous émerger une organisation avec une figure forte, avez-vous quelqu’un en tête ?
Pendant l’insurrection d’avril, avant d’être arrêtées, de nombreuses personnalités avaient le soutien de la population. C’est le cas de Cristiana Chamorro qui est la fille de l’ancienne présidente du Nicaragua qui avait battu Ortega dans les années 1990. Félix Maradiaga qui est un politologue, maintenant prisonnier politique, directeur de l’IEEPP, l’Institut d’études politiques stratégiques au Nicaragua, représentait un autre espoir. Je pense que ces deux personnes-là seraient capables de tenir tête à Daniel Ortega.
Avec la condamnation en mars de l’opposante Cristiana Chamorro, qui illustre une fois de plus la dimension répressive du régime Ortega, quelles perspectives voyez-vous pour l’opposition ?
Il n’y a pas de bonne perspective pour l’instant. Mais il y a toujours de l’espoir. Nous avons des lieux dédiés au bien-être mental des personnes, car le militantisme affecte les gens psychologiquement et émotionnellement. Il y a des gens qui ont construit ces espaces pour essayer de ne pas perdre espoir, pour continuer de se battre pour une cause juste. Nous avons besoin de justice et de liberté. Nous disons « résister c’est aussi combattre ».
Bien que l’Europe ait imposé des sanctions en réponse aux violations des droits humains lors des manifestations de 2018, considérez-vous que l’action européenne ait été suffisante et efficace en réponse à ces événements ?
Oui, l’action de l’Union européenne a été efficace. Bien sûr, on pourrait faire plus, mais la priorité de l’Union européenne est la guerre en Ukraine. Il est tout à fait compréhensible que cet enjeu soit prioritaire. Toutes les ressources politiques et monétaires y sont consacrées. Malgré tout, le Conseil de l’Europe m’a invitée pour parler de la situation au Nicaragua. Cela représentait une opportunité pour faire connaître notre situation.
Qu’attendez-vous de l’Europe aujourd’hui ?
Il y a beaucoup de choses que j’attends de l’Europe. Je pense qu’elle devrait avoir un discours plus ferme pour faire pression et libérer les prisonniers politiques. Des sanctions sur les dirigeants nicaraguans devraient être mises en place. L’Union européenne devrait sanctionner les personnes qui sont liées à l’appareil répressif du régime, par exemple les députés de l’Assemblée nationale, une partie de l’appareil judiciaire, l’Institut de sécurité sociale du Nicaragua et la présidence. Rosario Murillo a déjà été sanctionné. Il est maintenant temps de sanctionner directement Daniel Ortega, et ses enfants avec lesquels il cherche à créer une dynastie.
Y a-t-il une figure européenne qui vous inspire particulièrement dans votre combat ?
Je ne sais pas si c’est très féministe de ma part, mais j’aime beaucoup Winston Churchill. L’un de mes acteurs préférés, Cilian Murphy, joue dans un film intitulé Dunkerque. J’aime beaucoup regarder des films sur la Première et la Seconde Guerre mondiale, écouter le témoignage de personnes qui ont survécu aux camps de concentration. Je pense que pour comprendre les victimes, il faut voir leur perspective sous plusieurs angles. La gestion de Churchill lorsqu’il était Premier ministre était très ferme. Je pense qu’il était l’un des meilleurs stratèges politiques de l’histoire.
Lorsque vous parlez du rôle que le cinéma peut jouer dans la représentation et la compréhension de certaines situations ou expériences de vie, existe-t-il quelque chose sur la situation au Nicaragua ?
Il existe un documentaire, réalisé par un cinéaste espagnol pendant les manifestations, intitulé Nicaragua, patrie libre pour vivre. C’est très intéressant car de nombreuses personnalités politiques qui sont aujourd’hui en prison figurent dans ce documentaire. On y retrouve leurs témoignages, notamment celui de Monseigneur Silvio Báez, qui a dû fuir le Nicaragua car le régime avait engagé un tueur à gages pour l’assassiner.
Sources
- Alors étudiante à l’Université de Managua, Maria Alejandra Castillo Garcia, a participé aux manifestations contre le régime de Daniel Ortega en 2018. Maria Alejandra Castillo Garcia lutte pour la reconnaissance des violations des droits de l’homme commises par le régime et milite en faveur de la mise en place d’une justice transitionnelle. Cette année, elle a été lauréate de la toute nouvelle initiative Marianne pour les défenseurs des droits de l’Homme, lancée par le Président de la République en décembre 2021