En Slovénie, une campagne atone marquée par les questions migratoires

Ljubljana. Huit sièges d’eurodéputés sont en jeu en Slovénie, où quelque 1,71 millions de Slovènes sont appelés aux urnes pour la septième fois en dix-huit mois. Le petit nombre de sièges rend d’autant plus attractive la perspective d’en obtenir un pour les petites listes.

La campagne européenne s’est manifestée pour une course d’endurance pour la droite conservatrice (alliance SDS-SLS, PPE), grande gagnante de l’écrasante majorité des récents sondages, mais talonnée par ses concurrentes : le parti centriste du Premier ministre Marjan Šarec (LMŠ, ALDE), un parti social-démocrate (SD, S&D) en quête de revanche après un score décevant (8,08 %) aux élections de 2014, les chrétiens-démocrates de Nouvelle Slovénie (NSi, PPE).

Après l’échec d’une alliance de circonstance entre les petits partis libéraux composant la coalition actuellement au pouvoir, le parti du Premier ministre Marjan Šarec affronte son premier scrutin national après la nomination du gouvernement qu’il dirige, en septembre 2018. Loué pour la discipline et l’éthique personnelle qu’il a imposées au sein de sa coalition, critiqué pour l’obscurité de ses positions et son maigre bilan en termes de réformes, il reste en deuxième position des intentions de vote malgré des choix hasardeux pour la sélection de ses candidats1.

À l’exception d’un dernier débat télévisé dynamique et riche en propositions, la campagne électorale est demeurée calme, voire atone2 : ni le Président de la République Borut Pahor (SD), ni le Premier ministre n’ont été particulièrement vocaux dans la campagne. Les partis slovènes, fatigués par quatre campagnes (présidentielle, référendaire, législative et municipale) en un an, ont misé sur un budget minimaliste. On craint une participation basse, dans un scrutin traditionnellement boudé en Slovénie, et ce malgré les efforts sans précédent du Parlement européen et de sa campagne Tokrat grem volit, ou « cette fois, je vote »3.

Les échanges se sont concentrés autour de trois principales thématiques : les migrations et la politique migratoire – la Slovénie est l’un des États frontaliers de l’espace Schengen –, la montée du populisme en Europe avec l’influence de la Hongrie en Slovénie, et l’environnement et le réchauffement climatique.

Le principal parti de droite et premier parti représenté au Parlement, le Parti démocratique slovène (SDS), a su faire usage de la récente recrudescence des franchissements illégaux de la frontière slovéno-croate pour mener une campagne conservatrice, centrée sur la protection des frontières. Il a pourtant dû faire face aux critiques l’accusant d’être trop proche de la Hongrie de Viktor Orbán, dont un proche est propriétaire de deux médias slovènes.

La campagne a également vu la montée en puissance du très radical Parti national slovène (SNS) ainsi que la création d’une « Ligue patriotique » (DOM), souverainiste et viscéralement opposée à l’Union. De l’autre côté du spectre politique, le parti de gauche radicale Levica (« la Gauche »), dont le porte-drapeau Violeta Tomič est Spitzenkandidatin de la Gauche européenne, n’a pas su percer dans les intentions de vote.

L’une des originalités de la campagne fut la nomination comme tête de liste du petit parti « Alliance d’Alenka Bratušek » d’une eurodéputée autrichienne, Angelika Mlinar, membre de la minorité slovène de Carinthie et poids lourd au sein de l’Alliance des libéraux et des démocrates pour l’Europe (ALDE). Malgré de faibles intentions de vote pour le parti qu’elle représente (entre 2,6 % et 5,0 %), Mlinar a marqué une grande partie des débats et pourrait être la surprise du scrutin.

Selon le dernier sondage réalisé par la société Valicon, la liste SDS-SLS (22,1 %) et la liste de Marjan Šarec (LMŠ, 18,9 %) obtiendraient deux sièges chacune, les sociaux-démocrates (SD, 15,8 %) un à deux sièges, et NSi (7,7 %) un siège. Le principal enjeu du scrutin reste le huitième siège, qui se jouera très certainement à quelques centaines de voix près : il pourrait revenir à l’un des partis en tête, ou au contraire appartenir aux plus petits partis, dont les intentions de vote s’échelonnent entre 4,0 % et 6,2 %4.

Sources
  1. NONNE Charles, Slovenia : Marjan Šarec, l’invincibile tattico dai piedi d’argilla, Osservatorio balcani e caucaso, 1er avril 2019.
  2. PENGOV BITENC Aljaž, Ladies’ Night, Pengovsky, 24 mai 2019.
  3. NONNE Charles, Élections européennes en Slovénie : les partis au défi de l’abstention, Le Courrier des Balkans, 17 avril 2019.
  4. MEKINA Borut, Kaj lahko prinesejo in kaj odnesejo prihajajoče evropske volitve ?, Mladina, 17 mai 2019.