Salzbourg. C’est en prenant par surprise son propre parti que l’ancien chancelier autrichien Christian Kern (SPÖ) a annoncé mercredi son souhait de devenir le Spitzenkandidat des S&D aux prochaines élections européennes (4). Un souhait qui équivaut en Autriche à une auto-désignation, pour celui qui détient à la fois la présidence du parti social-démocrate et le poste de chef de l’opposition.

Mardi soir, lorsque les rumeurs de démission s‘étaient propagées, la classe politique autrichienne avait d’abord cru à sa reconversion dans le secteur privé, pas à une nouvelle campagne. Alors que Kern devait être reconduit à la tête du parti dans quinze jours, il s’agit maintenant pour le SPÖ de trouver dans l’urgence un nouveau visage : Doris Bures, vice-présidente du Conseil national et Pamela Rendi-Wagner, ancienne ministre de la Santé, sont les mieux placées pour lui succéder.

Si la campagne européenne des sociaux-démocrates promet d’être difficile, Kern n‘en reste pas moins l’un des concurrents les plus sérieux pour mener la bataille dans son camp (1). Au seul autre candidat déclaré, le vice-président slovaque de la Commission Maroš Šefčovič, pourraient bientôt s’ajouter deux autres postulants bruxellois : Pierre Moscovici et Frans Timmermans. Federica Mogherini, dont l’action a été maintes fois saluée par le Président Juncker, aurait fait le choix inverse.

Malgré la surprise générale affichée à Vienne comme à Berlin, l’ex-chancelier a probablement assuré ses arrières hors d’Autriche. Ses concurrents potentiels n’ont jamais dirigé un gouvernement, et leurs partis nationaux sont en déroute. Or, malgré sa défaite l’an passé et la révélation dans la presse de certaines oppositions internes, le SPÖ est arrivé second avec près de 27 pour cent des voix, un score honorable.

La décision sera prise début décembre à Lisbonne. Avec à leur tête le prédécesseur et meilleur ennemi politique du chancelier Kurz, c’est dans une confrontation claire avec les populismes de droite, qualifiés de “fange nationaliste” (“nationalistischer Sumpf “), que s’engageraient les sociaux-démocrates européens. Avec une ambition claire : “[notre] défi majeur sera de protéger l’héritage européen” (3). Une position compatible avec celles d’Emmanuel Macron ? Car si les S&D ne gagneront certes pas l’élection, aucune coalition centrale ne se formera sans eux, et la présidence du Conseil devra elle aussi aussi être renouvelée (2).

Perspectives :

  • Fin novembre 2018 : congrès du SPÖ (date prévue : 6-7 octobre).
  • 7-8 décembre 2018 : congrès des S&D à Lisbonne.
  • Mai 2019 : élections européennes.

Sources :

  1. HANSER Martin, Wie Kerns Chancen für eine Spitzenkandidatur der EU-Sozialdemokraten stehen, Die Presse, 19 septembre 2018.
  2. MAYER Thomas et BAUMANN Birgit, Kern auf europäischer Bühne : « Ein Mann für die erste Reihe », Der Standard, 19 septembre 2018.
  3. VYTISKA Herbert, Kern ernennt sich zum EU-Spitzenkandidaten der Sozialdemokraten, Euractiv.eu, 19 septembre 2018.
  4. SPÖ-Chef Christian Kern wird Spitzenkandidat bei EU-Wahl, Die Presse, 19 septembre 2018.