Tôkyô. L’inconstance a indéniablement marqué les 160 années de relations diplomatiques franco-japonaises. Tout a réellement débuté avec l’ouverture forcée, par l’amiral américain Matthew Perry, d’un archipel résolument fermé à l’extérieur à la fin du XIXe siècle. Les puissances occidentales s’engouffrent dans cette brèche : la France signe avec le Japon le 9 octobre 1858 un traité “d’amitié et de commerce”. Ainsi, l’archipel démarre sa modernisation et la concurrence est rude entre les puissances occidentales pour y exercer leur influence. Au sein de cette compétition, la France s’investit mais peine à se démarquer. Le premier éclairage public japonais sera installé par l’ingénieur français Henri-Auguste Pélegrin en 1872, à Yokohama. Mais en parallèle, le contexte historique de l’époque – défaite de 1870, situation politique française instable – pousse progressivement le Japon à se détourner de la France au profit de l’Allemagne (2).

Ces difficultés à réellement s’imposer demeurent récurrentes jusqu’à notre époque contemporaine. La France a indéniablement su exporter sa culture vers le Japon. Mais l’influence française s’est concentrée sur cet aspect quelque peu suranné. Les nombreuses visites d’État du président Jacques Chirac dans les années 90 relancent les rapports diplomatiques mais sans retombées économiques réelles (2). Les acteurs industriels français rencontrent toujours de grandes difficultés à s’affirmer sur le marché japonais. Le système de relations d’affaires japonais, basé sur des rapports de long terme et très différent du processus européen, peut aussi être mis en cause.

La fin des années 90, avec les troubles économiques japonais couplés à l’ascension chinoise, détourne l’attention française. Les impairs diplomatiques, à travers des déclarations péjoratives sur la culture nippone, commis par le président Nicolas Sarkozy refroidissent plus encore les rapports. François Hollande ranime les relations à partir de 2013 (3), et le gouvernement actuel d’Emmanuel Macron semble poursuivre sur cette voie. Le dossier nord-coréen a orienté le dialogue sur l’aspect sécuritaire, en témoigne notamment la 4e session de dialogue politico-militaire “2+2” en janvier 2018, avec les Ministres des Armées et des Affaires étrangères français et japonais (1). Le défilé militaire du 14 juillet 2018 a d’ailleurs reçu le Japon en invité d’honneur.

Les relations franco-japonaises sont donc basées sur un aspect culturel fort, prédominant. La coopération militaire se renforce au vu de la situation géopolitique actuelle en Asie, mais les rapports économiques demeurent timides. Le Japon représente tout de même le premier investisseur asiatique en France, et le second partenaire asiatique de l’Hexagone, mais le déficit bilatéral commercial français se creuse – 3,56 milliards d’euros en 2017, contre 2,6 milliards d’euros en moyenne sur la dernière décennie (4). Sur ce plan, l’échelle européenne semble prendre le relais avec la finalisation récente du Jefta – Japan-Eu Free Trade Agreement.

Perspectives :

  • 2018 : à l’occasion de ce 160e anniversaire, de nombreux événements culturels, intellectuels, commémoratifs sont organisés en France et au Japon.
  • Début 2019 : entrée en vigueur du JEFTA, si le texte est validé par les Parlements européen et japonais.

Sources :

  1. France diplomatie, Japon – Relations bilatérales.
  2. KESSLER Christian et SIARY Gérard, “France-Japon, histoire d’une relation inégale”, La vie des idées – Collège de France, 12 septembre 2008.
  3. MALIBEAUX Sophie, “France-Japon : une relation à reconstruire”, RFI, 6 juin 2013.
  4. Ministère de l’Économie et des Finances, Commerce et investissements France-Japon.

Jessy Périé