Kigali. Entre le 5 et le 6 juin, le chef de l’État Paul Kagame, président en exercice de l’Union africaine, a participé à une série de sommets institutionnels à Bruxelles dans le cadre des Journées européennes du développement (JED), organisées par la Commission européenne pour réunir les acteurs du développement, les bailleurs de fonds internationaux et les États partenaires du continent africain (5).

La présence de Kagame à Bruxelles a confirmé que le Rwanda est actuellement l’un des États africains les plus dynamiques sur la scène internationale, au centre des processus politiques de nature bilatérale et multilatérale. La participation aux JED a suivi de peu le sommet avec Macron, promu par l’Elysée pour encourager un processus de normalisation des relations franco-rwandaises (3). En décembre 2017, un rapport demandé par le gouvernement (2) a mis en évidence les responsabilités directes des appareils politico-militaires français à l’appui des forces du régime à l’occasion du génocide des Tutsi (1), provoquant un nouveau rapprochement de Kigali et de Paris. L’initiative diplomatique de Macron, visant à rétablir de bonnes relations avec un allié stratégique dans la région des Grands Lacs – pleinement intégré dans un système d’instabilité dont l’épicentre est dans les territoires de l’Est de la RDC -, s’est appuyée sur le soutien influent apporté à Louise Mushikiwabo, actuelle ministre des Affaires étrangères, dans l’élection de la haute direction de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), et ce malgré l’appartenance du Rwanda au Commonwealth et l’adoption de l’anglais comme langue officielle.

L’intérêt de Paris pour le renforcement des relations avec Kigali semble également répondre à un besoin géostratégique continental et à la nécessité de maintenir un poids spécifique dans les équilibres régionaux face à la concurrence mondiale. Ce n’est pas par hasard si, il y a quelques jours, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a fait une halte dans la capitale, témoignant ainsi des ambitions géopolitiques de Moscou en Afrique : la coopération bilatérale dans le secteur minier, l’amélioration des relations commerciales en termes quantitatifs, une augmentation de la contribution russe aux opérations de maintien de la paix sur le continent et le renforcement des capacités des forces de sécurité nationale dans la lutte contre le terrorisme étaient au centre des discours (4).

Perspectives :

  • Octobre 2018 : 17e Sommet de la Francophonie à Erevan, Arménie. La Secrétaire générale sortante, la Canadienne Michaëlle Jean – élue avec le soutien décisif de la France – semble destinée à défier la candidate rwandaise Louise Mushikiwabo, avec l’appui stratégique du Président Macron, dans le cadre d’un processus de rapprochement entre Paris et Kigali.

Sources :

  1. Rwanda report : France ‘complicit’ in 1994 genocide, Al-Jazeera News, 13 décembre 2017.
  2. Report and recommendation to the government of Rwanda on the role of French officials in the genocide against the tutsi, Cunningham Levy Muse LLP, Washington, 2017.
  3. MWAI Collins, Presidents Kagame, Macron discuss France-Africa ties, The New Times, 24 mai 2018.
  4. MWAI Collins, Why Russian foreign minister was in Kigali, The New Times, 04 juin 2018.
  5. TASHOBYA Athan, President Kagame in Belgium for European Development Days meet, The New Times, 04 juin 2018.