Hugo Salinas


Les émeutes qui ont éclaté peu après le dixième anniversaire de la fuite du dictateur Ben Ali rappellent malgré les espoirs portés par la Révolution de Jasmin que la Tunisie est aujourd’hui dans une impasse économique et sociale. La situation est d’autant plus sensible que la crise sanitaire et le premier confinement du printemps 2020 ont aggravé la pauvreté et fragilisé un équilibre social déjà précaire. Si la gestion de la seconde vague du Covid-19 ne s’accompagne pas d’un ensemble de réformes économiques en faveur de l’emploi et contre la pauvreté, la troisième vague sera sociale en Tunisie.

Le 17 décembre 2010, dans la localité de Sidi Bouzid, chef-lieu d’une région agricole, pauvre et au taux de chômage élevé du centre de la Tunisie, Mohammed Bouazizi, jeune vendeur ambulant à qui les autorités avaient saisi sa marchandise, s’immole par le feu devant le siège du gouvernorat. Dans la région, le drame indigne, et Sidi Bouzid devient le centre d’un soulèvement populaire.

Surfant sur la colère d’une Tunisie à bout de souffle, Kaïs Saïed a incarné l’espoir populiste dans un contexte politique instable. Élu à l’automne 2019 à la plus haute fonction de l’État, ses promesses se heurtent à la réalité de la double crise économique et sanitaire. La rhétorique souverainiste du nouveau président peine à se concrétiser alors que le paysage politique, perméable aux événements géopolitiques étrangers, retrouve ses antagonismes d’antan.