Elon Musk ne devrait pas être présent aujourd’hui au Bujairi Terrace de Riyad, la capitale saoudienne, pour l’ouverture du premier magasin Tesla dans le pays. Le milliardaire et proche de Donald Trump espère toutefois capitaliser sur la proximité affichée par le président américain avec le prince héritier saoudien pour s’implanter dans un nouveau marché encore largement inexploité.
- En 2024, seulement 1 % des véhicules vendus en Arabie saoudite étaient électriques 1. Au-delà du défi que représentent les fortes chaleurs pour les batteries — qui ont un impact direct sur leur autonomie et durée de vie —, le pays manque également d’infrastructures.
- Selon des données publiques, l’Arabie saoudite, qui compte plus de 33 millions d’habitants, ne disposait au 10 avril 2025 que de 105 bornes de recharge de véhicules électriques — soit 2 700 fois moins de bornes par habitant que les Pays-Bas, le pays européen ou leur réseau est le plus développé.
- Ainsi, il n’y a qu’une seule station de recharge sur la route de 800 kilomètres qui sépare Riyad de la ville sainte de La Mecque, dans l’ouest du pays.
Si l’économie du royaume repose encore largement sur le pétrole, le plan « Vision 2030 » lancé en 2016 et qui vise à diversifier l’économie saoudienne semble être une opportunité pour Tesla : les activités non-pétrolières représentent désormais 52 % du PIB du pays. La relation entre le milliardaire et le royaume, bien que dans une meilleure dynamique depuis l’investiture de Trump, demeure toutefois marquée par la querelle qui a éclaté il y a sept ans.
- Dans un message posté sur Twitter le 7 août 2018, le dirigeant de Tesla déclarait après une rencontre avec le gouverneur du Fonds d’investissement public saoudien, Yasir Al-Rumayyan : « J’envisage de privatiser Tesla à 420 $ [par action]. Financement assuré ».
- Dans les heures ayant suivi, le cours de l’action s’est envolé jusqu’à 13 %. Au même moment, les médias révélaient que le Fonds saoudien avait acquis une participation de 5 % dans Tesla pour un montant d’environ 2 milliards de dollars.
- Une semaine plus tard, Musk indiquait que le supposé accord avec Riyad n’était en réalité pas garanti, provoquant une chute de l’action. Les investisseurs de Tesla ont par la suite porté plainte contre le milliardaire, et la Securities and Exchange Commission imposait un mois plus tard une amende de 40 millions de dollars à Tesla et Musk 2.
La détérioration de la relation entre Musk et Al-Rumayyan à la suite de cette affaire a conduit le constructeur automobile à s’implanter dans d’autres pays du Golfe, notamment aux Émirats arabes unis, mais pas en Arabie saoudite. Avec le retour au pouvoir de Trump et l’annonce d’une future visite dans le royaume, il apparaît qu’Elon Musk souhaite tirer profit du momentum — d’autant que les ventes du constructeur subissent de plein fouet la concurrence du chinois BYD à l’international 3.
- Depuis son premier mandat, Trump a considérablement approfondi ses relations avec le royaume saoudien, qui se trouve désormais au cœur de sa stratégie au Moyen-Orient mais également en Europe.
- C’est en effet à Djeddah et à Riyad que des négociateurs américains ont rencontré à deux reprises des délégations russe et ukrainienne pour discuter d’un cessez-le-feu en Ukraine.
- Tout comme en 2017, c’est en Arabie saoudite que Trump devrait se rendre pour la première visite officielle de son deuxième mandat, probablement en mai. Il s’agissait alors de la première fois qu’un président américain visitait le royaume pour lancer son mandat, préférant traditionnellement le Canada ou un pays européen, notamment le Royaume-Uni.
Trump ne se cache pas d’avoir réduit ce moment hautement symbolique à une dimension strictement financière. Il y a un mois, le président américain déclarait : « Je vais en Arabie saoudite. Normalement, on va d’abord au Royaume-Uni. La dernière fois, je suis allé en Arabie saoudite. Ils ont mis 450 milliards de dollars sur la table […] Cette fois-ci, j’ai dit que j’irai si vous offrez 1000 milliards de dollars aux entreprises américaines. Ils ont accepté de le faire. Je vais donc m’y rendre » 4.
Sources
- eMobility Outlook 2024 KSA Edition, PwC, 12 septembre 2024.
- Elon Musk Settles SEC Fraud Charges ; Tesla Charged With and Resolves Securities Law Charge, Securities and Exchange Commission, 29 septembre 2018.
- Pesha Magid et Manya Saini, « In Saudi debut, Tesla faces desert heat, few chargers, but no Musk protests », Reuters, 10 avril 2025.
- Barak Ravid et Alex Isenstadt, « Trump to visit Saudi Arabia in May for first foreign trip, sources say », Axios, 30 mars 2025.