Lorsque les États-Unis et leurs alliés ont déclenché un barrage de sanctions financières visant la Russie en réponse à son invasion de l’Ukraine en février 2022, de nombreux experts ont ouvertement averti que le dollar américain serait une victime involontaire de ces mesures. La directrice générale adjointe du Fonds monétaire international, Gita Gopinath, a averti que les mesures prises par Washington pourraient fragmenter le système monétaire international, poussant certains pays à éloigner leurs activités économiques internationales du dollar. Zoltan Pozsar, influent stratège du géant bancaire Credit Suisse, a même déclaré que les sanctions marquaient la fin de la domination mondiale du dollar. Le rédacteur en chef adjoint du Financial Times a mis en garde contre un avenir où la prééminence du dollar serait de plus en plus contestée.
Les sanctions financières sont devenues un outil essentiel de la politique étrangère des États-Unis depuis le début du siècle. Les capacités financières coercitives des États-Unis découlent directement du rôle du dollar en tant que monnaie la plus utilisée pour les investissements et les paiements dans l’économie mondiale. D’un point de vue purement économique, la domination du dollar est logique. Il existe une offre apparemment illimitée d’actifs sûrs dans la monnaie dans lesquels investir, et à peu près toutes les entreprises aux quatre coins du monde sont heureuses d’accepter des dollars comme paiement pour des biens ou des services rendus. Pourtant, les prédictions de Gopinath, Pozsar et Wolf reflètent un point de vue de plus en plus répandu : la prééminence du dollar ne dépend pas seulement des fondamentaux économiques, mais aussi de considérations politiques.
Le recours croissant de Washington aux sanctions financières incite politiquement les cibles, ou les cibles potentielles, à transférer au moins une partie de leurs activités économiques hors du dollar. Bien qu’il soit peu probable que les sanctions renversent le rôle de premier plan joué par le dollar au niveau mondial, les réactions négatives à l’égard de la monnaie pourraient ébranler sa position et affaiblir l’efficacité des sanctions américaines à l’avenir.
1 — La domination du dollar est la source du pouvoir de sanction des États-Unis
La plupart des monnaies nationales ne sont pas utilisées en dehors de leur pays d’émission. Quelques rares monnaies fonctionnent comme des monnaies internationales — le dollar est la principale d’entre elles. Au niveau mondial, plus de richesses sont stockées en dollars que dans n’importe quelle autre monnaie. Qu’il s’agisse de dépôts bancaires ou d’obligations, les actifs libellés en dollars sont extrêmement populaires, reflétant la confiance internationale dans la valeur de la monnaie et dans la liquidité des marchés financiers américains. De même, le dollar est la monnaie la plus utilisée pour les paiements transfrontaliers et le règlement des transactions commerciales. En effet, les échanges bilatéraux entre la plupart des pays du monde sont réglés en dollars, même lorsqu’un acheteur ou un vendeur américain n’est pas impliqué dans la transaction. Cette situation est significative de la puissance financière américaine.
En raison de la popularité du dollar, une grande partie de la richesse mondiale est stockée dans des actifs et des comptes relevant de la juridiction américaine. De même, les échanges financiers basés sur le dollar qui sous-tendent le commerce mondial passent par de grandes banques américaines qui doivent suivre les règles de Washington, sous peine de subir d’énormes coûts financiers et de réputation. Le dollar et le système financier américain rendent ceux qui s’en servent dépendants à la pression économique des États-Unis.
La plupart des programmes de sanctions financières sont lancés lorsque le Président américain signe un décret ordonnant au Trésor d’ajouter des personnes, des entreprises ou des institutions gouvernementales étrangères à une liste noire financière de « ressortissants spécialement désignés » (SDN). Une fois inscrites sur la liste noire, les personnes visées voient leurs avoirs conservés dans des institutions financières américaines gelés ; elles deviennent incapables d’effectuer ou de recevoir des paiements en dollars. Les institutions financières qui faisaient autrefois des affaires pour le compte d’une cible ne répondent plus à ses appels. Du jour au lendemain, une cible de sanction peut se retrouver plus pauvre, isolée financièrement et stigmatisée.
2 — Les sanctions financières sont un outil de coercition précis et évolutif
Les sanctions économiques traditionnelles, comme les embargos commerciaux, sont des mesures brutales. Elles imposent des coûts économiques à de larges pans de la société dans les pays qu’elles ciblent. Les sanctions commerciales utilisées contre le régime de Saddam Hussein dans les années 1990 ont provoqué une malnutrition massive sans pour autant ébranler la mainmise du dictateur sur le pouvoir. Les sanctions financières sont apparues au tournant du siècle comme une arme économique alternative, plus précise, capable d’imposer des coûts aux mauvais acteurs tout en évitant les dommages collatéraux. Contrairement aux sanctions commerciales, elles peuvent également être utilisées contre des acteurs non étatiques, tels que des organisations terroristes et des réseaux criminels.
Cependant, même si les sanctions financières peuvent fonctionner comme un scalpel — en ciblant avec précision des fonctionnaires et des hommes d’affaires dans les pays visés — elles peuvent également être étendues à grande échelle pour produire un effet considérable. Washington peut couper du système du dollar les principales industries d’exportation d’un adversaire étranger, couper aussi ses banques internationales et ses institutions gouvernementales — y compris la banque centrale. Si les autorités américaines le souhaitent, elles peuvent encore intensifier leur effet en appliquant des sanctions « secondaires », qui obligent les banques étrangères à appliquer la législation américaine en matière de sanctions, sous peine d’être elles-mêmes exclues du système du dollar.
3 — Les sanctions génèrent des perceptions de « risque politique » associées au dollar
En 2000, vingt et un décrets de l’exécutif ordonnaient au Trésor de mettre en œuvre des programmes de sanctions. À la fin de l’année 2020, ce nombre était passé à quatre-vingt-quatorze, mettant sur liste noire des milliers de cibles étrangères. Si certains de ces programmes visent des groupes terroristes et d’autres organisations non étatiques, la plupart d’entre eux s’attaquent à des gouvernements étrangers. En 2020, plus de vingt pays étrangers, soit environ un État souverain sur dix, ont été ciblés pour divers motifs : violations des droits de l’homme, recul démocratique ou positions de politique étrangère contraires à celles de Washington.
La portée des programmes de sanctions visant les gouvernements étrangers était très variable. Dans certains cas, seuls quelques fonctionnaires ont été mis sur liste noire par le Trésor américain. Dans d’autres cas, les mesures étaient beaucoup plus étendues, coupant des industries majeures et des institutions étatiques du système du dollar. Au fur et à mesure que le nombre de cibles de Washington dans les capitales étrangères augmentait, la perception du « risque politique » associé au fait de compter sur le dollar comme monnaie internationale commençait à s’accroître.
Alors que le dollar restait attractif d’un point de vue purement économique, les gouvernements visés — ou ceux qui craignaient de l’être bientôt — ont fini par comprendre que le dollar était fort peu attirant d’un point de vue politique, compte tenu de la marge qu’il pouvait donner à Washington.
4 — La prise de conscience du risque politique stimule les politiques anti-dollar et la dédollarisation
Au fil du temps, l’accumulation de risques politiques dans le système monétaire international a incité les gouvernements à adopter des politiques anti-dollar encourageant l’utilisation de monnaies ou d’actifs autres que le dollar pour les investissements et les transactions transfrontalières. Bien entendu, les politiques anti-dollar peuvent échouer. En soi, elles ne signifient donc pas que le dollar joue un rôle de moins en moins important dans les relations économiques internationales d’un pays. Elles indiquent simplement que le gouvernement tente de provoquer un tel changement. Si ces politiques réussissent, il s’agit d’une dédollarisation, c’est-à-dire d’une réduction intentionnelle du rôle du dollar dans les activités économiques transfrontalières d’un pays. Dans mon livre Bucking the Buck : US Financial Sanctions and the International Backlash Against the Dollar, j’illustre comment le recours croissant de Washington aux sanctions a provoqué une augmentation des politiques anti-dollar. Ces politiques peuvent prendre diverses formes, notamment des accords visant à régler davantage d’échanges commerciaux en monnaies locales plutôt qu’en dollars, des accords d’échange de devises entre banques centrales, une augmentation des investissements en or physique et même des efforts visant à lancer une crypto-monnaie nationale. Dans de nombreux cas, ces politiques anti-dollar échouent, mais certaines ont réussi à faciliter la dédollarisation.
5 — Les sanctions américaines ont conduit la Russie à dédollariser ses réserves
Depuis l’invasion de l’Ukraine en février 2022, les mesures prises par la Russie pour dédollariser son économie ont fait l’objet d’une grande attention. Pourtant, les efforts de Vladimir Poutine pour réduire l’exposition de son pays à la monnaie américaine sont antérieurs de plusieurs années à la guerre. Washington a sanctionné la Russie pour la première fois en 2014, lors de l’annexion illégale de la Crimée. La Russie a fait l’objet de plusieurs séries de sanctions supplémentaires au cours des années suivantes pour s’être immiscée dans l’élection présidentielle américaine de 2020, pour des cyber-attaques et pour des violations des droits de l’Homme. À mesure que la liste des cibles s’allongeait en Russie, le pays a pris des mesures pour minimiser son exposition à la coercition financière des États-Unis. Plus particulièrement, à la suite d’une série sévère de nouvelles sanctions financières imposées par l’administration Trump en 2018, la Banque centrale de Russie a commencé à vendre ses actifs en dollars américains et à les remplacer par des euros et des yuans.
Au cours de cette année, la Russie a réduit ses avoirs en dollars de 20 %, ce qui représente une diversification sans précédent par rapport à la monnaie de réserve mondiale en si peu de temps. Les motifs de cette décision ne sont pas mystérieux. Les responsables russes ont même ouvertement expliqué pourquoi ils avaient choisi de rééquilibrer leur portefeuille, en invoquant des « risques géopolitiques ». Les médias pro-Kremlin ont noté que Washington avait gelé les avoirs de réserve de l’Iran et de la Libye, suggérant que les avoirs en dollars de la Russie pourraient un jour connaître le même sort. Il s’avère que ces inquiétudes étaient prémonitoires : les États-Unis ont gelé les actifs en dollars restants de la Russie après le début de la guerre en Ukraine.
6 — La Russie avait déjà des « partenaires anti-dollar » avant la guerre
Un autre domaine dans lequel la Russie s’est efforcée de réduire sa dépendance à l’égard du dollar est celui des règlements commerciaux. Les responsables du Kremlin ont compris que les actifs en dollars du pays n’étaient pas les seuls à être menacés. Le cœur industriel de leur économie, orienté vers l’exportation — l’énergie, l’exploitation minière, les entreprises de défense — était également vulnérable aux sanctions américaines. En effet, entre 2014 et 2020, les États-Unis avaient déjà ciblé certaines grandes entreprises russes, dont Rusal, le deuxième producteur mondial d’aluminium. Une fois inscrites sur la liste noire, les entreprises ont vu les banques refuser d’effectuer des paiements en dollars en leur nom. Le fait d’être coupé du système du dollar a rendu extrêmement difficile l’obtention de paiements pour les exportations ; elles ont pu également contraindre les entreprises partenaires à ne pas honorer les dettes libellées en dollars dont elles devaient s’acquitter. Vladimir Poutine a ainsi cherché des partenaires étrangers prêts à transférer leurs échanges commerciaux dans des monnaies non libellées en dollars.
En 2018, alors que la banque centrale vendait une grande partie de ses dollars, la Chine a commencé à payer la majeure partie de ses achats de produits russes en euros plutôt qu’en dollars. La même année, alors que Washington menaçait de cibler un autre groupe d’entreprises de défense russes, l’Inde a commencé à payer ses équipements de défense russes en roubles plutôt qu’en dollars. Depuis le début de la guerre en Ukraine, ces tendances se sont intensifiées, la Russie utilisant de plus en plus le yuan et le rouble dans ses règlements commerciaux.
7 — Les sanctions ont aussi contribué à raviver la popularité de l’or
Pendant les deux décennies qui ont précédé 2010, les banques centrales du monde entier ont été des vendeurs nets d’or. Autrefois partie intégrante du système monétaire international, l’or était une relique du passé dont se détournement progressivement les autorités monétaires. Mais lorsque les États-Unis ont commencé à intensifier leurs sanctions financières, certaines banques centrales ont recommencé à acheter de l’or.
L’intérêt de l’or en tant que couverture contre les sanctions américaines réside principalement dans sa nature physique. Les investissements en dollars américains sont généralement détenus sur des comptes ouverts auprès de banques américaines, voire de la Réserve fédérale. Ils sont donc susceptibles d’être gelés par les autorités américaines. À l’inverse, l’or peut être stocké dans des coffres-forts situés sur le territoire d’un pays, en toute sécurité et hors de portée de Washington. Le métal précieux peut également être déplacé et vendu en dehors du système bancaire basé sur le dollar, ce qui le rend presque impossible à suivre ou à arrêter pour Washington.
Lorsque Nicholas Maduro, le président du Venezuela, a vu son régime financièrement isolé par de sévères sanctions financières américaines, les réserves d’or physique de son pays lui ont servi de bouée de sauvetage. Maduro a utilisé l’or pour payer l’Iran pour son aide dans la réparation de l’infrastructure pétrolière du pays. Avec l’aide de la Russie, l’or vénézuélien a pu aussi être acheminé par avion vers la Turquie, l’Ouganda et les Émirats arabes unis, où il a été vendu contre des euros en espèces, qui ont ensuite été réinjectés dans l’économie à court d’argent. Depuis 2010, les banques centrales sont redevenues de gros acheteurs d’or. Les pays visés par les sanctions américaines, comme la Russie et la Turquie, ont été parmi les plus gros investisseurs dans le métal au cours de cette période. En 2022, après le début de la guerre en Ukraine, les achats d’or par les banques centrales ont été les plus importants jamais enregistrés. Dans Bucking the Buck : US Financial Sanctions and the International Backlash Against the Dollar, je montre que les pays visés par les sanctions américaines, ainsi que ceux qui risquent de l’être, ont acheté beaucoup plus d’or que les autres pays au cours des quinze dernières années. Le renouveau du métal en tant qu’actif de réserve repose sur son émergence en tant qu’investissement anti-dollar pour les gouvernements inquiets de la puissance financière des États-Unis.
8 — L’Europe s’est opposée à la domination du dollar — du moins jusqu’à la guerre
Lors du lancement de l’euro en 1999, les responsables européens n’ont pas pris position sur le rôle international de la nouvelle monnaie. Ils n’ont pas voulu promouvoir un usage mondial de la monnaie, pas plus qu’ils n’ont voulu le freiner. Les marchés ont naturellement adopté la monnaie pour diverses fonctions, et elle est rapidement devenue la deuxième monnaie internationale derrière le dollar américain.
Toutefois, à bien des égards, l’euro n’était qu’un lointain second par rapport au billet vert. En 2018, lorsque l’administration Trump s’est brusquement retirée de l’accord avec l’Iran, de sévères sanctions financières américaines ont été rétablies. Il s’agissait notamment de sanctions secondaires qui obligeaient les banques et les entreprises européennes à couper leurs liens avec l’Iran. Les dirigeants européens étaient furieux contre Trump, et ils ont déporté leur colère sur le dollar américain en créant INSTEX, une chambre de compensation, conçue pour maintenir le commerce avec l’Iran en dehors du système du dollar ; cette chambre fut cependant plus symbolique qu’effective : elle n’a pratiquement pas été utilisée. Cependant, l’Union a commencé à plaider en faveur d’un euro plus musclé, qui réduirait la dépendance du continent à l’égard du dollar. L’objectif était de renforcer l’« autonomie stratégique » de l’Europe ; celle-ci a notamment trouvé un partenaire volontaire dans la Russie de Poutine. Entre 2014 et 2021, les deux parties ont réglé une part croissante de leurs échanges énergétiques en euros, réduisant la part du dollar dans leurs échanges de 80 % à moins de 50 % au cours de cette période.
Cependant, la décision de la Russie de déclencher une guerre terrestre en Europe a bouleversé la donne. Les intérêts américains et européens étant désormais alignés, les deux parties ont conjointement sanctionné la Russie. Reste à voir si l’intérêt de Bruxelles pour un euro en pleine ascension perdurera ou si une nouvelle proximité stratégique avec Washington freinera ces ambitions.
9 — La Chine s’inquiète également des sanctions américaines
La prise de conscience du risque politique associé à la dépendance au dollar s’est propagée d’une capitale à l’autre, et ces préoccupations ont fini par atteindre Pékin. Vers 2018, les élites politiques chinoises ont commencé à affirmer que la méfiance croissante de la communauté internationale à l’égard du dollar offrait au yuan la possibilité d’émerger en tant qu’alternative à la monnaie américaine.
Plus tard, en 2020, les États-Unis ont sanctionné des responsables du PCC à Hong Kong, après que le gouvernement local eut réprimé les manifestations démocratiques. Cette décision a déclenché une sonnette d’alarme en Chine et a donné un nouvel élan à l’internationalisation du yuan ; la sanction indiquait que Washington était prêt à utiliser le dollar comme une arme contre Pékin. Certaines élites chinoises ont commencé à affirmer que le pays devait désormais promouvoir l’utilisation internationale de sa monnaie pour sa propre défense.
À l’heure actuelle, le yuan reste un acteur mineur de l’économie internationale, en grande partie parce que Pékin n’est pas disposé à libéraliser totalement ses marchés financiers et à faire du yuan une monnaie entièrement convertible, ce qui améliorerait ses perspectives en tant que monnaie d’investissement. Les inquiétudes concernant les sanctions pourraient jouer un rôle clé dans la politique monétaire de Pékin à l’avenir, en renforçant peut-être la volonté du gouvernement de procéder aux réformes nécessaires pour propulser un yuan international vers l’avant. L’utilisation de la monnaie est certes en hausse dans les échanges avec la Russie, comme nous l’avons vu plus haut ; et Xi Jinping a récemment rencontré les dirigeants des principaux États du Golfe exportateurs de pétrole pour discuter de la fixation des prix et du règlement des échanges de pétrole en yuans plutôt qu’en dollars. Un autre domaine à surveiller est le développement du système de paiements interbancaires transfrontaliers (Cross-border Interbank Payments System, ou CIPS), défi lancé par la Chine au réseau de paiements en dollars. Plus la Chine pourra mener ses propres affaires internationales sur son propre réseau financier, plus elle sera à l’abri de la coercition américaine.
10 — Les décideurs américains doivent adopter une approche prudente des sanctions
Le fait que les États-Unis fassent des sanctions financières un élément majeur de leur politique étrangère a incité à la fois leurs alliés et leurs adversaires à adopter des politiques anti-dollar.
En réponse, certains pays ont modestement dédollarisé leurs relations économiques internationales. Jusqu’à présent, ces mesures se sont concentrées sur les économies visées par les sanctions américaines et ne constituent pas une menace significative pour la domination mondiale du dollar.
Toutefois, si la dépendance excessive de Washington à l’égard des sanctions financières se poursuit au cours de cette décennie, le nombre de gouvernements anti-dollar à la recherche d’alternatives ne cessera de croître. Cela ouvrira davantage la porte à la Chine pour promouvoir le yuan en tant qu’alternative au dollar pour les États qui se sont heurtés à Washington. Même si la Chine ne prend pas le relais, les gouvernements visés développeront de plus en plus un ensemble de politiques anti-dollar destinées à réduire leurs vulnérabilités ; ainsi, au fil du temps, la capacité des États-Unis à utiliser les sanctions financières dans les moments critiques diminuera. Si Washington souhaite préserver cet outil pour les situations où les intérêts critiques de l’Amérique sont menacés, il devrait en faire une utilisation plus circonspecte.