Trump a le « Grand Honneur » de nous imposer 30 % de tarifs non réciproques — il y a quelqu’un ?
Dans une lettre au ton pompeux qui peine à cacher sa brutalité — et qui traite inopinément l’Union européenne de pays — le président américain a annoncé vouloir mettre les mains dans les poches des Européens, en imposant des tarifs de 10 points supérieurs à ceux qu’il avait annoncés lors du Liberation Day.
L’Union « se tient prête à continuer à travailler à un accord » — face à cet échec, ne devrait-elle pas changer de stratégie ?
Nous traduisons et commentons ligne à ligne ce texte important.
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- Le Grand Continent •
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Les tarifs de Trump ressemblent à un tribut impérial — brutal, unilatéral, asymétrique.
Les Européens sont sommés d’accepter 30 % de tarifs non réciproques, en ouvrant leur marché sans broncher.
Dans une lettre partagée sur Truth Social, le président américain annonce à Ursula von der Leyen — qui dit en avoir « pris note » — qu’à partir du mois d’août, des droits de douane effectifs de 30 % seront appliqués aux produits européens entrant sur le marché américain.
Cette annonce marque l’échec de la ligne de négociation de la Commission et de la prudence imposée par plusieurs pays européens — l’Allemagne en tête.
Alors que notre relation commerciale est quatre fois plus importante que celle du Royaume-Uni avec les États-Unis, cette proposition est non seulement moins avantageuse pour nous que l’accord conclu avec Londres — qui a accepté 10 % de tarifs unilatéraux —, mais surtout nettement plus dure que les conditions offertes lors du Liberation Day — le président américain avait alors annoncé « limiter » ses tarifs à 20 % dans le cas où aucune riposte n’avait été prise.
En 2024, les échanges de biens et services entre l’Union et les États-Unis représentaient environ 4,9 % du PIB américain — soit plus du double de ceux avec la Chine (2,2 %).
Contrairement à la Chine, et malgré la taille de son marché unique, l’Union n’a pas engagé de véritable rapport de force avec les États-Unis. Pourtant, les sondages montrent qu’une large majorité de citoyens y est favorable, et nos leviers sont nombreux.
Une enquête d’opinion a récemment circulé dans les couloirs du Berlaymont révélant que 80 % des citoyens européens n’étaient pas du tout d’accord avec la ligne de négociation de la Commission. Les Européens sont, en réalité, très largement favorables à des mesures de rétorsion.
La logique des tarifs est évidente : unilatérale, brutale, asymétrique, c’est un tribut impérial.
L’un des principaux conseillers économiques du président américain l’a exprimé clairement : « Payer des droits de douane sans prendre de mesures de rétorsion est un excellent moyen pour les autres pays de contribuer à partager le fardeau du système de sécurité que nous fournissons. »
Payez — ne ripostez pas — et tout ira bien.
Le jusqu’au boutisme américain laisse une nouvelle chance à l’Union.
Quelqu’un la saisira ou la prédiction pessimiste d’un diplomate proche du dossier se réalisera-t-elle ?
« On était tout proche d’un accord à la britannique à 10 %. Là, on va encore céder un peu et conclure triomphalement qu’on a évité les 30 %. »
La réponse de la Commission semble aller dans ce sens :
« L’Union européenne a toujours privilégié une solution négociée avec les États-Unis, reflétant ainsi notre engagement en faveur du dialogue, de la stabilité et d’un partenariat transatlantique constructif. Nous restons prêts à poursuivre les travaux en vue d’un accord d’ici au 1er août. Dans le même temps, nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour défendre les intérêts de l’Union, y compris l’adoption de contre-mesures proportionnées si cela s’avère nécessaire. »
Madame la Présidente,
C’est un Grand Honneur pour moi de vous adresser cette lettre, car elle témoigne de la force et de l’engagement de notre Relation Commerciale, et du fait que les États-Unis d’Amérique ont accepté de poursuivre leur coopération avec L’Union (sic) européenne, malgré le fait que nous ayons à votre égard l’un de nos Déficits Commerciaux les plus élevés.
Depuis le 7 juillet, soit deux jours avant la date butoir initialement fixée au 9 juillet pour l’entrée en vigueur des « tarifs réciproques », puis reportée au 1er août, le président américain a annoncé de nouveaux taux de droits de douane pour 25 pays.
Les tarifs annoncés sont pour la plupart similaires aux taux déjà communiqués le 2 avril lors de « Liberation Day », à quelques exceptions près : le Brésil, qui n’a pas de déficit commercial avec les États-Unis, et qui n’avait pas initialement été spécifiquement visé par les « tarifs réciproques » se voit imposer un taux de 50 %.
L’Union européenne, initialement à 20 %, menacée avec un taux de 50 % en l’absence d’un accord, aurait un taux de 30 %.
Néanmoins, nous avons décidé d’aller de l’avant, mais uniquement avec un COMMERCE plus équilibré et équitable. C’est pourquoi nous vous invitons à participer à l’Économie extraordinaire des États-Unis, le Marché mondial Numéro Un — et de loin.
Avec 440 millions de consommateurs à haut revenu, c’est le marché européen qui est le premier marché au monde et non les États-Unis. Il s’agit également du plus grand bloc commercial mondial en termes d’exportations et d’importations combinées.
Nous avons eu de longues années pour discuter de notre Relation Commerciale avec L’Union européenne, et nous en sommes arrivés à la conclusion qu’il faut rompre avec ces Déficits Commerciaux durables, importants et persistants, engendrés par vos Politiques Tarifaires et Non-Tarifaires et vos Barrières Commerciales. Notre relation a malheureusement été loin d’être Réciproque. À compter du 1er août 2025, nous facturerons à L’Union européenne des Tarifs de seulement 30 % sur les produits exportés vers les États-Unis — en sus de tous les Tarifs Sectoriels existants. Toute marchandise envoyée pour contourner un Tarif plus élevé sera soumise exactement à ce Tarif plus élevé.
En 2023, le déficit commercial des États-Unis avec l’Union européenne atteignait 156,6 milliards d’euros, mais les États-Unis affichent un excédent de 108,6 milliards d’euros dans le domaine des services.
Les exportations vers les États-Unis représentent environ 3 % du PIB européen.
Il vous faut bien comprendre que 30 % est un taux bien inférieur à celui qui serait nécessaire pour éliminer totalement le Déficit Commercial dont nous souffrons vis-à-vis de l’UE.
À ces droits de douane généraux s’ajoutent les tarifs sectoriels.
Actuellement, les États-Unis appliquent des droits de douane de 25 % sur les importations de voitures et de leurs composants et de 50 % sur l’acier et l’aluminium. Trump a également annoncé la mise en place de droits de douane de 50 % sur le cuivre, qui devraient entrer en vigueur le 1er août. Plusieurs enquêtes sont actuellement en cours au titre de la section 232 de la loi sur l’expansion du commerce (Trade Expansion Act). Le 8 juillet, le président américain a menacé d’imposer des droits de douane pouvant aller jusqu’à 200 % sur les produits pharmaceutiques, qui pourraient entrer en vigueur dans un an.
Comme vous le savez, nous n’appliquerons pas de Tarif si L’Union européenne, ou des entreprises établies dans l’UE, choisit de produire ou de fabriquer ses biens sur le sol américain ; nous ferons alors tout notre possible pour obtenir les autorisations nécessaires rapidement, professionnellement et de manière systématique — Autrement dit, en quelques semaines.
Alors que la relation commerciale de l’Union avec les États-Unis est quatre fois plus importante que celle du Royaume-Uni, nous nous apprêtons donc subir, tout aussi docilement que Londres, des tarifs unilatéraux de 30 %. Il s’agira là d’un transfert direct au profit des réductions fiscales promises aux entreprises américaines dans la loi budgétaire One Big Beautiful Bill, accentuant encore l’écart de compétitivité transatlantique.
L’Union européenne accordera aux États-Unis un Accès complet et ouvert à son Marché, sans aucun Tarif à notre égard, et ce dans le but de réduire ce Déficit Commercial considérable. Si, pour quelque raison que ce soit, vous décidiez d’augmenter vos Droits de douane et de riposter, le pourcentage que vous choisiriez alors serait automatiquement ajouté au taux de 30 % que nous vous facturons. Il vous faut bien comprendre que ces Tarifs sont indispensables pour corriger les années de Politiques Tarifaires et Non-Tarifaires de l’Union européenne, ainsi que ses Barrières Commerciales, qui ont creusé un Déficit Commercial excessif et insoutenable aux dépens des États-Unis. Ce Déficit constitue une menace majeure pour notre Économie et, donc, en fait, pour notre Sécurité Nationale !
Les « barrières commerciales non tarifaires » sont l’une des obsessions du président américain concernant l’Union. Il y classe faussement la TVA à côté des taxes sur les services numériques, que huit pays européens appliquent aujourd’hui.
Nous nous réjouissons de travailler avec vous en tant que Partenaire Commercial pour de nombreuses années à venir. Si vous souhaitez ouvrir vos Marchés Commerciaux (sic), jusqu’à présent fermés aux États-Unis, et supprimer vos Politiques Tarifaires et Non-Tarifaires ainsi que vos Barrières Commerciales, nous envisagerons, peut-être, de considérer un ajustement relatif au contenu de cette lettre. Ces Droits de douane pourront être modifiés, à la hausse ou à la baisse, selon l’évolution de nos relations avec votre pays (sic). Vous ne serez jamais déçus par les États-Unis d’Amérique.
Contrairement à ce que le président américain affirme, les droits de douane européens et américains étaient relativement similaires avant les hausses de tarifs annoncées par Trump depuis janvier.
Selon l’Organisation mondiale du commerce, avant le 20 janvier, le taux moyen pondéré des droits de douane appliqués par l’Union européenne sur les importations de produits agricoles et non agricoles américains s’élevait à 4,2 % et 0,9 % respectivement, contre 2,5 % et 1,5 % du côté américain.
Dans la fin de cette lettre adressée à Ursula von der Leyen en tant que présidente de la Commission européenne, Donald Trump fait référence à « son pays », suggérant que le modèle utilisé pour la lettre pourrait ne même pas avoir été adapté — cette phrase étant reprise de la lettre envoyée le même jour à la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum.
Je vous remercie de l’attention que vous porterez à cette question !
Veuillez agréer, Madame la Présidente, l’expression de mes salutations distinguées.