En fin de semaine, vendredi 9 mai, Vladimir Poutine organisera comme chaque année un défilé militaire sur la place Rouge de Moscou à l’occasion du 80e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe. Au-delà des troupes et matériels militaires qui seront mis en avant à cette occasion, c’est surtout les dirigeants étrangers présents qui reflèteront l’influence à laquelle le président russe aspire.

Xi Jinping sera incontestablement le dignitaire étranger dont la présence sera la plus remarquée à Moscou. Toutefois, alors que Poutine espérait accueillir une vingtaine de chefs d’État et de gouvernement, plusieurs défections semblent se dessiner.

  • Quelques jours seulement en amont des célébrations, le Premier ministre indien Narendra Modi a fait savoir mercredi 30 avril qu’il annulait sa venue à Moscou, alors que les tensions avec le Pakistan se sont considérablement accrues suite à l’attaque du 22 avril qui a fait 26 morts dans le Cachemire — dont 25 Indiens 1.
  • Deux semaines auparavant, c’est le cabinet du Premier ministre hongrois qui annonçait l’absence de Viktor Orbán, pourtant proche de Poutine en Europe. Son directeur de cabinet, Gergely Gulyas, a déclaré que « cela n’aurait aucun sens pour la Hongrie de participer à ces célébrations même si les pays d’Europe occidentale entretenaient de bonnes relations avec la Russie, car la fin de la Seconde Guerre mondiale a été une lourde défaite pour elle » 2.
  • La venue à Moscou du président serbe Aleksandar Vučić est incertaine en raison de problèmes de santé survenus ces derniers jours. Le Premier ministre slovaque Robert Fico, dont le déplacement était également incertain pour des raisons médicales, a quant à lui confirmé dimanche 4 mai qu’il se rendrait bien à Moscou vendredi 3.

Au lundi 5 mai, seulement 15 chefs d’État et de gouvernement ont ainsi confirmé leur venue à Moscou, parmi lesquels figurent tous les dirigeants des républiques d’Asie centrale. Le président mongole Ukhnaagiin Khürelsükh, pourtant invité, n’a toujours pas confirmé sa venue, tout comme le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi et le chef d’État éthiopien Taye Atske Sélassié. Le leader nord-coréen Kim Jong-Un pourrait lui aussi faire l’impasse sur le défilé et se faire représenter par le président du Présidium de l’Assemblée populaire suprême, Choe Ryong-hae 4.

  • Afin de grossir les rangs des dignitaires qui seront présents dans la tribune présidentielle à l’occasion du défilé du Jour de la Victoire, Vladimir Poutine a convié à Moscou le président de la république d’Abkhazie Badra Gounba ainsi que le président de la république d’Ossétie du Sud Alan Gagloïev.
  • Ces deux territoires, qui ont proclamé leur indépendance en 1992 suite à l’effondrement de l’Union soviétique, ne sont pas reconnus par la communauté internationale. Les médias russes présentent néanmoins ces deux dirigeants comme des chefs d’État au même titre que les autres dirigeants ayant confirmé leur venue.
  • Le président de la république serbe de Bosnie (Republika Srpska) Milorad Dodik et le président de l’Assemblée nationale Nenad Stevandić devraient également faire partie des dignitaires étrangers présents.
  • Ainsi, au lundi 5 mai, des chefs d’État et de gouvernement représentant 20,1 % du PIB ainsi que 22,3 % de la population mondiale devraient se trouver aux côtés de Poutine pour célébrer la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe.
  • D’une manière assez étonnante, la Russie sera le seul grand État ayant pris part au conflit à organiser une grande célébration pour les 80 ans de la fin du conflit, en dehors des traditionnels défilés militaires du 8 mai.
  • Le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait initialement prévu d’inviter à Kiev de nombreux dirigeants européens afin de projeter une image d’unité face à la Russie de Poutine, mais l’événement semble avoir été annulé.

La semaine dernière, Vladimir Poutine a unilatéralement décrété une trêve temporaire de trois jours, prévue du 8 au 10 mai, pour des « raisons humanitaires ». En réponse, l’Ukraine a dénoncé une « mise en scène » visant à garantir une certaine sécurité aux dirigeants qui se rendront à Moscou pour le 9 mai. Zelensky a par la suite réitéré son soutien à un cessez-le-feu inconditionnel d’une durée de 30 jours, négocié par Washington puis accepté par Kiev dès le 11 mars — auquel le Kremlin n’a jamais donné suite.