Depuis sa victoire très confortable lors de la primaire du Parti républicain l’an dernier, Donald Trump est incontestablement vu comme la seule figure capable de rallier les électeurs du GOP à l’échelle fédérale mais également dans des élections locales. En sélectionnant les candidats aux élections au Congrès et en remplaçant les cadres du Parti par des personnalités loyales et des membres de sa famille, Trump a étouffé l’émergence de toute contestation.

En contribuant à augmenter significativement le risque d’une récession et en ayant provoqué un effondrement du marché boursier inédit depuis la pandémie du Covid, le président américain voit ces derniers jours l’émergence d’une opposition — pour le moment minoritaire — inattendue.

  • Mercredi 2 avril, quelques heures seulement après l’annonce par Trump des taux des tarifs « réciproques » qui entreront en vigueur demain, mercredi 9, quatre sénateurs républicains se joignaient aux Démocrates pour révoquer l’état d’urgence invoqué par Trump pour justifier des tarifs de 25 % sur les produits canadiens.
  • Un démocrate de Virginie, Tim Kaine, qui a introduit cette résolution au début du mois de mars, mettait en avant l’augmentation des prix pour les consommateurs américains que provoquerait ces tarifs 1.
  • Sur son réseau Truth Social, le président américain accusait ces quatre sénateurs républicains d’être des RINO (Republicans In Name Only) victimes d’un « stratagème démocrate » 2.

Alors que Trump a déclaré qu’il ne « reculerait pas » sur ses tarifs en dépit de l’effondrement des marchés, plusieurs importants donateurs républicains ont fait part au cours du week-end de leurs inquiétudes — et, pour certains, de leur mécontentement 3. Dans sa lettre annuelle envoyée aux investisseurs lundi 7 avril, le directeur général de JPMorgan Chase, Jamie Dimon, un temps pressenti pour être secrétaire au Trésor de l’administration Trump II, écrivait : « Les récents droits de douane augmenteront probablement l’inflation et conduisent de nombreuses personnes à envisager une plus grande probabilité de récession » 4.

  • Jeudi 3 avril, le lendemain du Liberation Day, le sénateur républicain Chuck Grassley, président de la commission judiciaire et membre de la commission des Finances et de la commission sur le Budget, troisième dans la ligne de succession à la présidence en qualité de president pro tempore du Sénat, a introduit aux côtés de la sénatrice démocrate Maria Cantwell une proposition de loi qui limiterait le pouvoir de l’exécutif en matière d’imposition de droits de douane 5.
  • Plus significatif encore, un élu républicain de la Chambre — qui, en raison d’une durée des mandats plus courte, reflète traditionnellement plus la dépendance électorale de ses membres à Trump —, Don Bacon, a confirmé la semaine dernière qu’il travaillait à l’élaboration d’un texte équivalent à celui de Grassley qu’il souhaite introduire au Congrès 6.

Les leaderships républicains ayant largement la main dans les deux chambres sur les textes mis au vote, il est peu probable que ces initiatives aboutissent. La Maison-Blanche a par ailleurs annoncé lundi 7 avril que Trump opposerait son veto à la loi préparée par Grassley et Cantwell si celle-ci venait à passer le Sénat. Bien qu’une grande partie du Parti républicain au Congrès demeure largement fidèle à Trump, ces initiatives constituent la première réelle opposition à Trump au sein du GOP depuis son retour au pouvoir.