En tournée en Asie, Pete Hegseth confirme la volonté de l’administration Trump de maintenir sa politique de pression vis-à-vis de la Chine

La politique agressive de l’administration Trump vis-à-vis de l’Europe — allant de menaces d’annexion du Groenland, qui fait partie du royaume danois, au flou entretenu par le président américain quant au respect de l’Article 5 du Traité de l’Atlantique nord — a suscité une vive inquiétude chez les partenaires asiatiques des États-Unis, qui craignent d’être eux aussi abandonnés face à la Chine.

C’est pour lever ces doutes et assurer les puissances alliées des États-Unis en Indo-Pacifique du soutien de l’administration Trump que le nouveau secrétaire à la Défense américain, Pete Hegseth, s’est rendu cette semaine dans la région.

• Hegseth a conclu aujourd’hui une visite de 4 jours en Asie qui l’a amené à se rendre dans le territoire américain de Guam, aux Philippines puis au Japon.
• Il a qualifié Tokyo de « pierre angulaire de la paix et de la sécurité dans la région indo-pacifique », alors qu’il participait à une réunion avec le ministre de la Défense japonais Gen Nakatani ¹.
• Il a également rassuré son homologue quant à la volonté de l’administration Trump de maintenir sa politique de dissuasion de Pékin dans la région, qui se traduit notamment par une importante présence militaire au sol et en mer.
• Le Japon est le territoire étranger qui accueille le plus grand contingent militaire américain au monde : 50 000 soldats sont basés sur l’archipel, soit plus qu’en Corée du Sud ou en Allemagne.

Si Hegseth ne s’est pas rendu à Taïwan alors que l’île evoque la possibilité d’une invasion chinoise en 2027, le Pentagone entend toutefois « prioriser la dissuasion de la prise de Taïwan par la Chine », selon un mémo interne diffusé à la mi-mars au sein des différentes branches du département de la Défense.

• Intitulé Interim National Defense Strategic Guidance, ce document entérine une politique encore plus faucon que la doctrine chinoise ayant guidé les actions des précédentes administration Trump I et Biden en définissant la Chine comme « l’unique menace du département […] Le refus d’une prise de Taïwan par la Chine — tout en défendant la patrie américaine — est le seul scénario du département » ².
• Celui-ci comporte par ailleurs plusieurs passages quasi-identiques à un rapport publié par la Heritage Foundation en août 2024, le think-tank conservateur qui a déjà influencé de larges pans de la politique de l’administration Trump via son Projet 2025 ainsi que le Projet Esther.
• Publié sous le titre « L’impératif de priorisation. Une stratégie pour défendre les intérêts de l’Amérique dans un monde plus dangereux », celui-ci encourage notamment Taipei à « porter les dépenses de défense à un niveau correspondant à la menace existentielle à laquelle l’île est confrontée » ³.
• Début mars, le futur numéro deux du Pentagone, Elbridge Colby, dont la confirmation doit encore faire l’objet d’un vote du Sénat, déclarait que Taïwan devait consacrer environ 10 % de son PIB à sa défense. Colby ajoutait : « Nous devons donc les inciter de manière appropriée » ⁴.

Taïwan, qui alloue actuellement environ 2,45 % de son PIB à sa défense, anticipe une hausse jusqu’à 3 % au cours des prochaines années. Toutefois, l’effort militaire taïwanais n’est pas tant limité par des dépenses insuffisantes que par des retards répétés dans les livraisons d’armes américaines ⁵. En septembre 2024, le gouvernement de l’île a envoyé pour la première fois des représentants visiter les usines américaines de production d’armement afin de garantir le respect des délais de livraisons.