La guerre en Ukraine au jour le jour

Poutine arsenalise tout. Le discours de Zelensky à l’ONU sur la guerre d’Ukraine

Poutine a fait du monde son champ de bataille. Le front de l’Ukraine n’est qu’un moyen, une arme dans une guerre qui s’étend. Face au verrou onusien, Zelensky propose une autre compréhension de l’affrontement, au-delà des termes militaires. Pour la première fois en français, nous traduisons son appel à l’unité contre l’arsenalisation du monde.

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Le Grand Continent
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Comment lutter contre un État pour lequel le monde est devenu une arme de destruction ? « L’objectif de la guerre actuelle contre l’Ukraine est de transformer notre terre, notre peuple, nos vies, nos ressources en une arme contre vous — contre l’ordre international fondé sur des règles. »

Devant l’Assemblée générale des Nations Unies le 19 septembre, le président ukrainien Volodymyr Zelensky ne s’est pas concentré sur la dimension militaire de la guerre que mène la Russie de Poutine sur le sol ukrainien depuis un an et demi. L’originalité et la force de sa prise de parole tiennent dans ce qu’elle entend porter dans l’enceinte multilatérale la question de l’arsenalisation de toutes les interdépendances à l’âge de la guerre étendue. Ce sont les nouvelles armes de la Russie : énergie, climat, finance, sécurité alimentaire, nouvelles technologies, influence cognitive. 

Alors qu’il s’exprime dans une enceinte où nombre de pays ont choisi de rester neutre après l’agression russe du mois de février 2022, l’objectif du Président ukrainien est de démontrer que la guerre est loin de se limiter au seul territoire ukrainien, où se déroulent les combats, ni même au continent européen, dont l’économie a été lourdement affectée par l’augmentation des prix de l’énergie. Contre toutes les règles du droit international, à commencer par la Charte des Nations Unies, Vladimir Poutine a décidé de transformer le monde en champ de bataille, utilisant toutes les ressources à sa disposition pour pousser un projet impérial qui ne se limite pas à la seule Ukraine.

Il s’agit avant tout de rappeler que la Russie n’est pas et ne sera jamais un partenaire fiable : « On ne peut pas faire confiance au mal — demandez à Prigojine s’il pense que c’est une bonne idée de parier sur les promesses de Poutine ». Agressée, violentée, victime d’une véritable tentative de génocide, qui passe notamment par la déportation de dizaines — voire de centaines — de milliers d’enfants en Russie, l’Ukraine de Zelensky précise sa doctrine néo-idéaliste, en rappelant le caractère universel d’un tel discours. Tout, dans l’allocution de Volodymyr Zelensky, cherche à faire ressentir que l’agression subie par l’Ukraine ne restera pas contenue si jamais la Russie parvient à ses fins, que la guerre s’étendra — inévitablement.

Je souhaite la bienvenue à tous ceux qui se battent pour nos efforts communs ! 

Et je vous promets qu’en étant vraiment unis, nous pouvons garantir une paix équitable à toutes les nations. L’unité peut aussi prévenir les guerres.

Mesdames et Messieurs,

Monsieur le Secrétaire général,

Chers dirigeants,

Cette enceinte a connu de nombreuses guerres — mais pas en tant que défenseur actif contre les agressions.

Bien souvent, c’est la peur de la guerre, de la guerre finale, qui a été la plus forte ici — la guerre après laquelle personne ne se réunirait plus dans cette salle de l’Assemblée générale.

La troisième guerre mondiale était perçue comme une guerre nucléaire. Un conflit entre États lancés sur l’autoroute des armes atomiques. Les autres guerres semblaient moins effrayantes que la menace de voir les soi-disant « grandes puissances » mettre à feu leurs stocks nucléaires.

Le Président ukrainien commence ici son discours par la troisième des menaces planétaires identifiées par Bruno Latour dans son texte important « Le sol européen est-il en train de changer sous nos pieds ? » : « La question que je voudrais donc poser est plutôt celle-ci : qu’ajoutent aux définitions classiques de l’existence européenne ces luttes des deux côtés, c’est-à-dire le conflit territorial et colonial numéro un et les conflits territoriaux et coloniaux numéro deux ? Avec toujours ce troisième conflit suspendu au-dessus de nos têtes, celui de l’annihilation nucléaire. La terre dévastée virtuellement par le nucléaire, la terre dévastée réellement par les mutations écologiques et la terre ukrainienne dévastée par l’armée rouge de sang. C’est là où nous risquons d’être “emportés trop fort par les flots à l’heure qu’il est pour sortir la tête du creux de la houle de sang”. »

Cet exorde interroge également l’efficacité de la Charte des Nations Unies, très souvent empêchée par la présence d’arsenaux nucléaires dans des camps opposés. Comme a pu l’écrire Alain Pellet, « les nobles idéaux de 1919, 1928 ou 1945 de “mise hors la loi de la guerre” n’ont nullement éradiqué les conflits armés, ni internationaux, ni internes ». C’est à nouveau manifeste depuis le déclenchement de l’« opération militaire spéciale », pendant laquelle le Président russe a violé la quasi-totalité des dispositions de la Charte des Nations Unies — sans que l’organisation ne puisse rien faire pour l’empêcher. 

Le XXe siècle a donc enseigné au monde à s’abstenir d’utiliser des armes de destruction massive, à ne pas les déployer, à ne pas les faire proliférer, à ne pas menacer de les utiliser et à ne pas les tester, mais à promouvoir un désarmement nucléaire complet.

En toute franchise, il s’agit d’une bonne stratégie. Mais elle ne devrait pas être la seule stratégie pour protéger le monde de cette guerre finale.

L’Ukraine a renoncé à son troisième plus grand arsenal nucléaire. Le monde a alors décidé que la Russie devait devenir la gardienne de cette puissance. Pourtant, l’histoire montre que c’est la Russie qui méritait le plus le désarmement nucléaire dans les années 1990. Et la Russie le mérite aujourd’hui : les terroristes n’ont pas le droit de détenir des armes nucléaires. Aucun droit !

L’Ukraine disposait en effet avant son retour à l’indépendance après la chute de l’Union soviétique d’un important stock d’armes nucléaires. Par les mémorandums de Budapest signés en 1994, l’Ukraine mais aussi le Kazakhstan et le Bélarus ont obtenu des garanties sur leur intégrité territoriale en échange de leur adhésion au traité de non-prolifération (TNP). C’est un point de départ extrêmement important et qui constitue, vu d’Ukraine, l’acte inaugural de l’injustice russe — la Fédération de Russie étant censée, aux termes du mémorandum, garantir l’intégrité territoriale de l’ex-République socialiste soviétique. Elle n’a évidemment pas respecté ses engagements. Par ailleurs, l’une des accusations proférées par Poutine dans les jours qui ont précédé l’agression de l’Ukraine en 2022 était que le pays voulait se doter d’armes nucléaires

Pourtant, ce ne sont pas les armes nucléaires qui sont les plus effrayantes aujourd’hui.

Alors que les armes nucléaires restent en place, la destruction massive prend de l’ampleur. L’agresseur a recours à de nombreuses autres armes qui sont utilisées non seulement contre notre pays, mais aussi contre tous les vôtres.

Chers dirigeants,

Il existe de nombreuses conventions qui limitent les armes, mais il n’y a pas de véritables restrictions sur l’arsenalisation.

Énergie, climat, finance, sécurité alimentaire, nouvelles technologies, influence cognitive : la guerre en Ukraine est ici décrite comme un point incandescent à partir duquel s’accélère l’instrumentalisation des interdépendances. Le président ukrainien évoque ici une dimension de la stratégie russe que nous avons souvent analysée dans la revue, notamment dans une étude clef d’Agathe Desmarais et Julien Nocetti : la transformation en armes de guerre de tous les leviers d’interdépendances internationaux.

Permettez-moi tout d’abord de vous donner un exemple : l’alimentation.

Depuis le début de la guerre, les ports ukrainiens de la mer Noire et de la mer d’Azov sont bloqués par la Russie. Jusqu’à présent, nos ports sur le Danube restent la cible de missiles et de drones. Il s’agit d’une tentative évidente de la Russie d’utiliser la pénurie alimentaire comme arme sur le marché mondial en échange de la reconnaissance d’une partie, voire de la totalité, des territoires capturés.

La Russie utilise les prix des denrées alimentaires comme des armes. L’impact s’étend de la côte atlantique de l’Afrique à l’Asie du Sud-Est. Telle est l’échelle de la menace.

Volodymyr Zelenskyy s’exprime lors du débat général de la 78e session de l’Assemblée générale des Nations Unies au siège de New York, le 19 septembre 2023. © Lev Radin/Sipa USA/SIPA

Le 17 juillet, le Kremlin annonçait se retirer à nouveau de l’accord permettant l’exportation des céréales ukrainiennes via la mer Noire. Depuis, Moscou cible les infrastructures portuaires et de transport terrestre de marchandises ukrainiennes dans un effort visant à limiter les capacités de Kiev à exporter ses marchandises. Les responsables russes accusent quant à eux les pays européens et les États-Unis d’être à l’origine de l’augmentation des prix alimentaires, notamment en « imprimant de l’argent d’une manière qui n’était pas justifiée économiquement pour faire face à leurs problèmes causés par la pandémie de Covid-19 ».

Mardi 19 septembre, un premier cargo chargé de blé ukrainien, le Resilient Africa, a emprunté pour la première fois la nouvelle route de la mer Noire dont l’itinéraire doit garantir aux navires d’éviter les menaces navales russes en traversant les eaux territoriales roumaines.

Je voudrais remercier les dirigeants qui ont soutenu notre initiative sur les céréales de la mer Noire et le programme humanitaire alimentaire « Grain d’Ukraine ». Merci beaucoup ! Unis, nous avons fait en sorte d’inverser la métamorphose : faire redevenir nourriture ce qui était devenu une arme. Plus de 45 nations ont compris l’importance de rendre les produits alimentaires ukrainiens disponibles sur le marché, de l’Algérie à l’Espagne en passant par l’Indonésie et la Chine.

Aujourd’hui encore, alors que la Russie a mis à mal l’initiative céréalière de la mer Noire, nous nous efforçons de garantir la stabilité alimentaire. Et j’espère que vous serez nombreux à vous joindre à nous dans ces efforts. Nous avons lancé un corridor d’exportation maritime temporaire à partir de nos ports. Et nous travaillons d’arrache-pied pour préserver les voies terrestres d’exportation des céréales. Il est alarmant de voir comment certains en Europe, certains de nos amis en Europe, jouent la solidarité sur le théâtre politique — ils dirigent un thriller sur les céréales. Ils ont l’air de jouer leur propre partition, mais ils aident en fait à préparer le terrain pour un acteur moscovite.

Avec des mots très durs, Volodymyr Zelensky s’en prend ici à la Hongrie, la Pologne et la Slovaquie que l’Ukraine a attaqué devant l’OMC. Ces trois pays ont en effet pris des mesures protectionnistes contre le blé en provenance d’Ukraine. En interne, ces restrictions sont justifiées comme des mesures de protection du secteur agroalimentaire. Le président ukrainien pointe leur instrumentalisation par Moscou.

Deuxièmement, l’arsenalisation de l’énergie.

Le monde a souvent vu la Russie utiliser l’énergie comme une arme. Le Kremlin a utilisé le pétrole et le gaz pour affaiblir les dirigeants d’autres pays lorsqu’ils venaient sur la Place Rouge. 

Aujourd’hui, la menace est encore plus grande. La Russie utilise l’énergie nucléaire comme une arme. Non seulement elle diffuse ses technologies peu fiables de construction de centrales nucléaires, mais elle transforme également les centrales d’autres pays en véritables bombes sales.

Regardez, s’il vous plaît, ce que la Russie a fait à notre centrale de Zaporijia : elle l’a bombardée, l’a occupée et fait maintenant chanter les autres avec des fuites de radiations.

Y a-t-il un sens à réduire les armes nucléaires alors que la Russie arsenalise les centrales nucléaires ? C’est une question qui fait peur. 

L’architecture de sécurité mondiale n’offre aucune réponse ou protection contre une menace radiologique aussi perfide. Et jusqu’à présent, les maîtres chanteurs de radiations n’ont pas à répondre de leurs actes.

La centrale nucléaire de Zaporijia, la plus puissante d’Europe, est située à un point stratégique, à la frontière des territoires ukrainiens occupés par l’armée russe. Avant l’invasion de 2022, elle produisait un cinquième de l’électricité de l’Ukraine qui avait massivement investi dans le nucléaire civil pour réduire sa dépendance énergétique envers la Russie. Après février 2022, la centrale a été capturée par les Russes ; elle a subi un incendie ; et elle a vu son infrastructure militarisée, avec notamment des munitions stockées dans ses salles de turbines. Le personnel a été réduit des deux tiers, de 11 000 à 4 000 employés, dont une majorité travaille désormais pour Rosatom, l’entreprise nucléaire russe. Bien que la centrale ne produise aujourd’hui plus d’électricité, il est essentiel de refroidir les cœurs des réacteurs pour éviter un accident nucléaire, d’autant que les activités militaires à proximité posent un risque majeur, ce dont a témoigné le directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique, Rafael Grossi, qui avait déclaré avoir « dû traverser un champ de mines » pour accéder au site. 

Le troisième exemple est celui des enfants. 

Divers groupes terroristes enlèvent des enfants pour faire pression sur leurs familles et leurs sociétés. Mais jamais auparavant les enlèvements massifs et les déportations n’avaient fait partie intégrante d’une politique gouvernementale. Jusqu’à aujourd’hui.

Volodymyr Zelenskyy s’exprime lors du débat général de la 78e session de l’Assemblée générale des Nations Unies au siège de New York, le 19 septembre 2023. © Vladimir Kostyrev/TASS/Sipa USA/SIPA

Nous connaissons les noms de dizaines de milliers d’enfants et disposons de preuves concernant des centaines de milliers d’autres enfants enlevés par la Russie dans les territoires occupés de l’Ukraine et déportés par la suite. La Cour pénale internationale a lancé un mandat d’arrêt contre Poutine pour ce crime.

Nous essayons de ramener les enfants chez eux, mais le temps passe. Que va-t-il leur arriver ?

En Russie, on apprend à ces enfants à haïr l’Ukraine, et tous les liens avec leurs familles sont rompus… Il s’agit clairement d’un génocide.

Dans les semaines qui avaient suivi la découverte du massacre de Boucha, Jean-Yves Pranchère et Anna Zielinska avaient publié un important article réfléchissant à la définition du génocide dans le cas ukrainien. Ils y rappelaient notamment que la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, adoptée par les Nations Unies en 1948, entrée en vigueur en 1951, ne le définit pas par la « destruction totale » mais par « l’intention de détruire, ou tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel » (nous soulignons). Cette Convention précise que le génocide peut être constitué par des actions non meurtrières, telles que les « mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe » ou le « transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe ». 

Les déportations d’enfants ukrainiens par la Russie ont été confirmées par de nombreux documents, y compris rédigés par les autorités russes qui présentent ces actions comme des évacuations humanitaires. Avant le conflit, l’Ukraine comptait 7,5 millions d’enfants, dont près de 500 ont été tués et 1 000 blessés depuis le début de la guerre. Beaucoup ont été séparés de leurs familles ou sont devenus réfugiés. Depuis le début du conflit, la Russie a transféré de force des enfants, orphelins ou non, vers son territoire. Le Bureau national d’information ukrainien a recensé 19500 enfants déportés, mais la réalité est probablement bien plus importante, avec des estimations allant, pour certaines sources ukrainiennes, jusqu’à 240000 enfants déplacés. La Russie évalue elle-même ce chiffre à 740000. On estime qu’au moins 6000 enfants ont été envoyés dans 43 camps répartis sur le territoire russe. Un rapport de la commission d’enquête internationale sur l’Ukraine du Conseil des droits de l’Homme, publié en mars 2023, a identifié trois principales situations de transferts d’enfants ukrainiens par la Russie : les enfants séparés de leurs parents, que ceux-ci aient été tués ou évacués sans une partie de leurs familles ; des enfants séparés de leurs parents à des « points de filtrage » tenus par les autorités russes avant d’être déplacés dans des camps où de nombreuses violations des droits humains auraient été commises ;  enfin des enfants placés dans des institutions en Ukraine occupée par la Russie alors que leurs parents sont toujours vivants. 

Lorsque la haine est utilisée comme arme contre une nation, elle ne s’arrête jamais. 

Chaque décennie, la Russie déclenche une nouvelle guerre. Certaines parties de la Moldavie et de la Géorgie restent occupées. La Russie a transformé la Syrie en ruines. Et sans la Russie, les armes chimiques n’auraient jamais été utilisées en Syrie. La Russie a presque avalé le Belarus. Elle menace manifestement le Kazakhstan et les États baltes… Et l’objectif de la guerre actuelle contre l’Ukraine est de transformer notre terre, notre peuple, nos vies, nos ressources en une arme contre vous — contre l’ordre international fondé sur des règles. De nombreux sièges dans la salle de l’Assemblée générale pourraient tout simplement devenir vides si la Russie réussit sa trahison et son agression.

« Guerre infinie » ; « Guerre éternelle », etc. Quelle que soit l’expression utilisée, nombreux sont les spécialistes de la Russie qui soulignent que le projet géopolitique de Vladimir Poutine ne peut être défini par un but de guerre précis après lequel il pourrait s’estimer satisfait. Dans l’ordre stratégique comme dans l’ordre symbolique — qui s’incarnent particulièrement lors des cérémonies annuelles du 9 mai qui commémorent la victoire de l’Union soviétique sur l’Allemagne nazie —, la guerre en Ukraine est perçue comme une étape d’une stratégie prolongée du Kremlin, basée sur deux piliers : une perspective impériale qui remet en question la notion même de frontière et étend sans limite sa zone d’influence, ainsi qu’une animosité envers l’Occident servant de catalyseur et de doctrine. L’ambition de la Russie serait de dominer une région qu’elle considère comme son territoire d’influence naturel, englobant l’ex-espace soviétique ainsi que certains pays d’Europe centrale et de l’Est, en utilisant la force lorsque c’est nécessaire. 

Mesdames et Messieurs !

L’agresseur sème la mort et apporte des ruines, même sans armes nucléaires, mais les résultats sont les mêmes. 

Nous voyons des villes et des villages d’Ukraine anéantis par l’artillerie russe. Ils ont été complètement rasés ! Nous voyons la guerre des drones. Nous connaissons les effets possibles de l’extension de la guerre au cyberespace.

Dès le début de l’invasion russe en février 2022, l’armée ukrainienne a massivement fait usage de drones pour des opérations de reconnaissance et d’attaque. Depuis plusieurs mois, les chiffres communiqués par le commandement des forces aériennes ukrainiennes indiquent une intensification des attaques de drones russes. Entre juin et les deux premières semaines de septembre, la moyenne journalière a presque triplé, passant de 5 à 14 aéronefs. Ces derniers sont aussi bien lancés sur des cibles militaires que sur des infrastructures civiles et énergétiques, en complète violation du droit international humanitaire. Afin de soutenir cet effort au cours des prochains mois de guerre, Moscou développe des centres de recherche et de production domestique de drones, tout en collaborant avec l’Iran pour produire des milliers de Shahed-136 supplémentaires d’ici 2025.

L’intelligence artificielle pourrait être entraînée à bien combattre avant d’apprendre à aider l’humanité. Dieu merci, les gens n’ont pas encore appris à utiliser le climat comme une arme. Même si l’humanité ne parvient pas à atteindre ses objectifs en matière de politique climatique, cela signifie que les conditions météorologiques extrêmes continueront d’avoir un impact sur la vie normale dans le monde et qu’un État malveillant en utilisera les résultats comme une arme. Lorsque les gens dans les rues de New York et d’autres villes du monde sont sortis pour protester contre le climat — nous les avons tous vus… Lorsque les gens au Maroc, en Libye et dans d’autres pays meurent à la suite de catastrophes naturelles… Lorsque des îles et des pays disparaissent sous les eaux… Lorsque les tornades et les déserts s’étendent à de nouveaux territoires… Lorsque tout cela se produit, une catastrophe non naturelle à Moscou a décidé de lancer une grande guerre et de tuer des dizaines de milliers de personnes. Nous devons l’arrêter !

Nous devons agir ensemble — pour vaincre l’agresseur et concentrer toutes nos capacités et notre énergie sur la résolution de ces problèmes.

De même que les armes nucléaires sont bridées, l’agresseur doit être bridé, ainsi que tous ses outils et méthodes de guerre. Chaque guerre peut maintenant devenir définitive, mais il faut que nous soyons unis pour nous assurer que l’agression ne se reproduira pas.

Et ce n’est pas un dialogue entre les soi-disant « grandes puissances », quelque part derrière des portes closes, qui pourra nous garantir une nouvelle ère sans guerre, mais un travail ouvert de toutes les nations en faveur de la paix.

L’année dernière, j’avais présenté les grandes lignes de la formule de paix ukrainienne à l’Assemblée générale des Nations unies. Plus tard, en Indonésie, j’ai présenté la formule dans son intégralité. Au cours de l’année écoulée, la formule de paix a servi de base à la mise à jour de l’architecture de sécurité existante — nous pouvons désormais redonner vie à la charte des Nations unies et garantir le plein pouvoir de l’ordre mondial fondé sur des règles.

Demain, je présenterai les détails lors d’une réunion spéciale du Conseil de sécurité des Nations unies.

L’essentiel est qu’il ne s’agit pas seulement de l’Ukraine. Plus de 140 États et organisations internationales ont soutenu, en tout ou en partie, la formule de paix ukrainienne. La formule de paix ukrainienne devient mondiale. Ses points proposent des solutions et des mesures qui mettront fin à toutes les formes d’armement que la Russie a utilisées contre l’Ukraine et d’autres pays et qui pourraient être utilisées par d’autres agresseurs. 

Dmitry Polyansky, en haut à droite, ambassadeur adjoint de la Russie auprès des Nations Unies, ne lève pas les yeux alors que le président ukrainien Volodymyr Zelenskyy s’adresse à la 78e session de l’Assemblée générale des Nations Unies au siège des Nations Unies, le mardi 19 septembre 2023. © Seth Wenig/AP/SIPA

Pour la première fois dans l’histoire moderne, nous avons une chance réelle de mettre fin à l’agression dans les conditions de la nation attaquée. C’est une chance réelle pour chaque nation de s’assurer que l’agression contre son État, si elle se produit, ce qu’à Dieu ne plaise, prendra fin non pas parce que son territoire sera divisé et qu’elle sera forcée de se soumettre à des pressions militaires ou politiques, mais parce que son territoire et sa souveraineté seront pleinement restaurés.

Nous avons lancé le format des réunions entre les conseillers à la sécurité nationale et les représentants diplomatiques. D’importantes discussions et consultations ont eu lieu à Hiroshima, à Copenhague et à Djeddah sur la mise en œuvre de la formule de paix. Et nous préparons un sommet mondial pour la paix. Je vous invite tous —  tous ceux qui ne tolèrent aucune agression — à préparer ensemble ce sommet.

Après le Danemark, c’est l’Arabie saoudite qui a rassemblé à Djeddah les 5 et 6 août les principales forces œuvrant en faveur d’une fin au conflit en Ukraine — ainsi que d’autres acteurs qui avaient jusque-là conservé une certaine distance vis-à-vis de ces initiatives. Au total, 40 pays, ainsi que des représentants de l’Union européenne, ont pris part aux consultations portant « sur les principes clés du rétablissement d’une paix durable et juste pour l’Ukraine ». La présence de la Chine — représentée par Li Hui, l’envoyé spécial du gouvernement chinois pour les affaires eurasiennes — aux discussions s’est accompagnée de la venue de représentants d’une vingtaine de pays supplémentaires par rapport à la réunion de Copenhague. On note notamment la présence d’un nombre croissant d’États européens (17 au total, en comptant le Royaume-Uni et la Norvège) ainsi que de plusieurs États du Golfe (Bahreïn, Qatar, Émirats arabes unis, Koweït). Les pays africains ainsi que d’Asie du Sud-Est demeurent quant à eux les grands absents de ces consultations. En amont du sommet, des sources informelles indiquaient que des invitations avaient été transmises au moins à la Zambie et à l’Indonésie.

Je suis conscient des tentatives de tractations en coulisses. On ne peut pas faire confiance au mal — demandez à Prigojine s’il pense que c’est une bonne idée de parier sur les promesses de Poutine. Je vous en prie, écoutez-moi. Laissons l’unité décider de tout ouvertement.

Alors que la Russie pousse le monde à la guerre finale, l’Ukraine fait tout pour s’assurer qu’après l’agression russe, personne dans le monde n’osera attaquer une nation. L’armement doit être limité. Les crimes de guerre doivent être punis. Les personnes expulsées doivent rentrer chez elles. Et les occupants doivent retourner sur leur propre terre.

Nous devons être unis pour y parvenir. Et nous le ferons.

Слава Україні !

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