Hier, dans l’après-midi, l’Embraer Legacy 600 immatriculé RA-02795 appartenant à Wagner a décollé de Moscou, avec pour destination Saint-Pétersbourg. Les raisons pour lesquelles Prigojine était à bord de cet avion ne sont pas claires, alors qu’une vidéo publiée lundi indiquait qu’il était en Afrique pour « rendre la Russie plus grande sur tous les continents »1. Après avoir parcouru environ 180 kilomètres, il a été filmé en train de chuter à la verticale, une aile en moins. À 17h20 (heure française), son signal disparaît alors qu’il vole à plus de 6 000 mètres d’altitude2.

Il n’est pas possible à ce stade de déterminer la cause de ce crash, bien que plusieurs théories circulent.

  • Selon International Aviation HQ, l’avion d’affaire Legacy 600 utilisé par Prigojine n’avait rencontré qu’une seule défaillance mécanique en 20 ans.
  • Le constructeur brésilien Embraer a toutefois déclaré mercredi 23 août qu’il «  respectait toutes les sanctions internationales imposées à la Russie », et n’a ainsi pas assuré la maintenance de l’avion depuis 20193.
  • La piste d’un « accident » semble toutefois à écarter en raison de la chute à la verticale de l’appareil.

Des comptes pro-Wagner ont affirmé dans les heures ayant suivi le crash que l’avion avait été ciblé par les défenses antiaériennes russes. Selon la chaîne liée au groupe Grey Zone, des habitants de Kuzhenkino auraient entendu « deux rafales de tirs caractéristiques de la défense antiaérienne » (notamment des S-300), ce qui serait confirmé par « des traces d’inversion dans le ciel sur l’une des vidéos »4.

Dans la soirée du 23 août, des mercenaires de Wagner ont publié une déclaration vidéo dans laquelle l’un deux affirme : « On parle beaucoup en ce moment de ce que fera le groupe Wagner. Nous pouvons vous dire une chose… nous commençons »5. Au même moment, le projet biélorusse Hajun — qui suit les activités militaires au Bélarus depuis janvier 2022 — observait « de fortes pannes d’Internet mobile dans la zone du camp Wagner de Tsel’ », dont le démantèlement semble être en cours depuis plusieurs jours selon le média biélorusse Svadoba6.

  • Selon l’agence de presse officielle russe TASS, les dix passagers du vol ont été tués. Celui-ci comportait sept membres de la milice Wagner, deux pilotes et un personnel de bord7.
  • Outre la présence supposée de Prigojine lui-même, l’Agence russe fédérale du transport aérien Rosaviatsia a confirmé la présence dans le manifeste de vol de Dmitri Outkine, co-fondateur de Wagner et bras droit d’Evgueni Prigojine8. Sous sanctions américaines depuis 2017, il a travaillé à la Direction générale des renseignements de l’État-Major des Forces armées russes (GRU) jusqu’en 2013 avant de rejoindre les forces spéciales du GRU, les Spetsnaz9.
  • Le responsable du service de sécurité de Wagner Valery Chekalov ainsi que quatre mercenaires, Sergey Propustin, Yevgeny Makaryan, Alexander Totmin et Nikolay Matyuseyev étaient également aux côtés de Prigojine.
  • Chekalov était l’un des amis proches du chef de Wagner, qu’il a rejoint au début des années 2000. Il était notamment « responsable des contrats de l’armée Concord fournissant de la nourriture aux militaires »10.

Tandis qu’une commission spéciale chargée de déterminer les causes du crash a été créée, Vladimir Poutine et les responsables du Kremlin n’ont fait aucune déclaration à propos de la mort supposée de Prigojine. Les médias d’État concentrent quant à eux leur attention sur le sommet des BRICS qui se tient à Johannesburg, ne couvrant qu’au minimum l’incident dans l’attente probable d’instructions officielles relatives au ton qu’ils devront adopter11.