Le marché gazier européen vit une période d’accalmie marquée par une diminution substantielle du prix du gaz naturel. Avec la réduction drastique des exportations russes de gaz vers l’Europe, les 27 se tournent vers d’autres sources afin de sécuriser leurs approvisionnements. 

  • Sans infrastructures permanentes permettant d’assurer un débit suffisant pour approvisionner le continent en gaz, les acheteurs européens privilégient le gaz naturel liquéfié (GNL), facilement transportable et produit par de nombreux pays partenaires.
  • Depuis la fin de l’année 2021, les importations européennes de GNL augmentent considérablement en volume, tandis que les États-Unis ont supplanté le Qatar comme principal exportateur de GNL vers l’Union. 

Le secteur américain d’exportation de GNL a connu un développement vertigineux depuis 2016, tandis que la construction de nouveaux terminaux d’exportation sur la côte Est des États-Unis — parfois grâce à des investissements européens1 — devrait contribuer à augmenter davantage les capacités de liquéfaction et d’exportation de gaz naturel américain d’ici 2025-20262.

La déstabilisation des marchés énergétiques mondiaux provoquée par la baisse de l’activité économique due au Covid-19 et aggravée par la guerre en Ukraine a conduit au renforcement de la présence de la Chine et de l’Europe sur les marchés mondiaux du GNL.

  • En 2021, la Chine détrônait le Japon de sa position de premier acheteur mondial de gaz naturel liquéfié occupée par le pays depuis 50 ans3.
  • Afin de sécuriser leurs approvisionnements tout en bénéficiant de prix plus avantageux, les entreprises chinoises concluent des contrats qui les engageront pendant des décennies. Le 20 juin, la China National Petroleum Corporation signait un contrat de 27 ans avec Qatar Energy pour l’achat de 4 millions de tonnes de GNL par an4.
  • Selon les données de Bloomberg, les acheteurs chinois ont conclu avec des fournisseurs étrangers un tiers du total des contrats d’approvisionnement en GNL à long terme signés depuis le début de l’année.
  • Soucieuse d’assurer sa sécurité énergétique plus que tout — quitte à revendre par la suite les surplus à des acheteurs étrangers —, la Chine a entamé la construction d’une douzaine de terminaux d’importation qui devraient permettre au pays d’acheter 138 millions de tonnes de GNL d’ici 2033, soit le double de sa capacité actuelle5.

Ainsi, la concurrence entre les pays européens et la Chine pour l’achat de gaz naturel s’intensifie, limitant les capacités d’achat des pays ne disposant pas d’autant de ressources financières — comme le Pakistan — et suscitant des craintes liées à une potentielle pénurie de l’offre. Selon Fatih Birol, le directeur de l’Agence internationale de l’énergie, une reprise économique chinoise plus forte qu’anticipée conduirait à l’augmentation des prix de l’énergie en Europe cet hiver ainsi qu’à d’éventuelles coupures d’électricité en cas de réduction du débit de gaz russe6.

Sources
  1. « TotalEnergies buys 17.5 % stake in Next Decade for $219mn », Natural Gas World, 14 juin 2023.
  2. Sergey Vakulenko, « Can China Compensate Russia’s Losses on the European Gas Market ? », Carnegie Endowment for International Peace, 1er juin 2023.
  3. Ryosuke Hanafusa, « Japan set to cede LNG import crown to China », Nikkei Asie, 2 juillet 2021.
  4.  Andrew Mills et Maha El Dahan, « Qatar strikes second big LNG supply deal with China », Reuters, 20 juin 2023.
  5. « China Is Buying Gas Like There’s Still an Energy Crisis », Bloomberg, 2 juillet 2023.
  6. Alex Lawson, « International Energy Agency warns of higher bills this winter », The Guardian, 3 juillet 2023.