Depuis que l’armée ukrainienne a repris la ville de Kherson, située sur le Dniepr, en novembre dernier, la ligne de front n’avait pas bougé (mis à part quelques raids russes et ukrainiens sans importance stratégique majeure). Alors que Kiev devrait lancer une contre-offensive — dont l’ampleur reste à déterminer —, des rapports ont indiqué ces derniers jours que des troupes ukrainiennes avaient établi des positions sur la rive est du Dniepr.

  • Le 21 avril, l’Institute for the Study of War (ISW) relayait des sources russes indiquant la présence prolongée de forces ukrainiennes dans les zones marécageuses situées dans le lit du Dniepr, en face de Kherson1.
  • Les jours suivants, plusieurs activités ukrainiennes ont été documentées dans cette zone accessible uniquement par bateau et difficilement praticable. Selon certaines sources, les unités ukrainiennes y seraient installées depuis plusieurs semaines et parviendraient à se faire approvisionner depuis la rive ouest (sous contrôle de Kiev).

Depuis la prise de la ville en novembre, les Ukrainiens n’ont cessé de mener des opérations de petite taille visant à cibler des dépôts de munitions russes ainsi que d’autres objectifs tactiques sur la rive est du Dniepr. Dans les semaines ayant suivi, une opération amphibie avait été lancée contre la pointe de Kinbourn (dans le golfe de Dniprovska) et des positions russes (notamment à Oleshky) avaient été visées par des frappes ukrainiennes.

Bien que ces récentes activités ne soient pas nouvelles, elles coïncident toutefois avec une dégradation de l’état des positions russes dans la région.

  • Si l’artillerie russe rendait l’établissement de toute position ukrainienne pendant plusieurs jours sur l’île de Velyki Potemkine impossible, un responsable de la région de Kherson a déclaré que des troupes ukrainiennes avaient « maintenu une présence dans la zone au cours des deux dernières semaines »2.
  • Il est peu probable que l’état-major ukrainien cherche à lancer une grande opération de traversée du Dniepr tant celui-ci est difficilement franchissable pour des véhicules blindés, particulièrement depuis la destruction partielle du pont d’Antonivka.
  • Cependant, ces activités — si elles venaient à perdurer et à s’intensifier — pourraient servir de diversion en faveur d’une offensive dans l’est du pays. À l’automne dernier, Kiev avait annoncé vouloir prendre Kherson pour finalement mener un assaut surprise dans la région de Kharkiv.

Il est encore trop tôt pour affirmer que ces mouvements ukrainiens constituent autre chose qu’une opération de reconnaissance et d’attaques de cibles spécifiques qui n’augurent pas de modification majeure de la ligne de front dans la région de Kherson. Cependant, ces mouvements témoignent de modifications du rapport de force dans des régions où les affrontements directs entre forces ukrainiennes et russes sont bien moins intensifs que dans l’est du pays. Dans le cadre de la contre-offensive ukrainienne annoncée de longue date, un des objectifs de Kiev serait d’effectuer une percée vers le sud, en direction de Melitopol et de la Crimée — ce qui paraît pour l’heure toutefois peu probable.

Sources
  1. Kateryna Stepanenko, Riley Bailey, Grace Mappes et Frederick W. Kagan, « Russian Offensive Campaign Assessment », Institute for the Study of War, 21 avril 2023.
  2. Ian Lovett et Ann M. Simmons, « Ukrainian Forces Recapture Land Across Key River in South, Think Tank Says », The Wall Street Journal, 23 avril 2023.