L’accord de libre-échange entre l’Union et le Mercosur, annoncé le 28 juin 2019, prévoit la réduction et, à terme, l’élimination des droits de douane et des contingents d’importation. En outre, il offre aux entreprises étrangères appartenant aux parties signataires de l’accord la possibilité de participer aux appels d’offres gouvernementaux. 

Jusqu’ici, les négociations avaient piétiné ; le gouvernement français, en particulier, avait annoncé qu’il ne ratifierait l’accord que sous réserve que le Brésil respecte l’accord de Paris sur le climat, dans un contexte de reprise massive des déforestations sous la présidence Bolsonaro1

Lors du cycle de négociations ouvert début mars 2023, la Commission a présenté aux pays du Mercosur sa proposition visant à étoffer les engagements climatiques de l’accord commercial. 

  • La proposition de texte européen, dont une version préliminaire a fuité début avril2, demande aux deux parties de s’engager à respecter les mesures contenues dans l’accord de Paris sur le climat ; celles-ci exigent des signataires qu’ils réduisent de moitié la déforestation d’ici 2025, et qu’ils inversent la perte de forêts et l’utilisation abusive des terres d’ici 2030.
  • La proposition comprend également une obligation de répondre à « toute autre décision » prise par l’ONU en ce qui concerne l’accord de Paris, et de fournir des ressources adéquates aux régulateurs environnementaux ; elle prévoit la mise en œuvre de la convention sur la biodiversité négociée à Montréal, et la ratification des conventions fondamentales de l’OIT.

La proposition de la Commission reflète aussi les pressions des groupes parlementaires européens écologistes, alors que l’accord devra être ratifié par le Parlement et, individuellement, par les pouvoirs législatifs des quatre pays membres du Mercosur et des vingt-sept membres de l’Union. 

  • Les Verts allemands ont jusqu’à présent subordonné leur consentement à l’obtention de garanties sur le volet climatique ; les parlements néerlandais et autrichien se sont prononcés contre l’accord, arguant que l’augmentation des importations en provenance d’Amérique du Sud rendrait les consommateurs européens responsables de la déforestation.

Bien que la proposition européenne fixe des objectifs climatiques pour les États signataires, elle ne prévoit cependant pas de sanctions pour les faire respecter. 

  • Le Mercosur craint cependant que l’Union n’introduise des sanctions de manière détournée via un addendum imposant des sanctions commerciales en cas de non-respect des objectifs. 
  • En outre, les gouvernements du Mercosur s’inquiètent de la manière dont le règlement de l’Union sur les produits exempts de déforestation ou le mécanisme d’ajustement frontalier pour le carbone, adoptés par le Parlement européen ce mercredi 19 avril, s’ajusteront à l’accord.
  • Le règlement sur la déforestation3 requiert en effet des entreprises vendant des biens sur le marché européean de certifier que ceux-ci n’ont pas été produits sur des terrains déforestés ; celles qui ne le font pas s’exposent à une amende pouvant atteindre 4 % de leur chiffre d’affaires. 

L’accord de libre-échange avec le Mercosur serait le traité le plus important sur le plan économique que l’Union ait jamais signé : le Brésil protégeant ses marchés en appliquant des droits de douane élevés — de l’ordre de 35 % sur les voitures par exemple — l’accord permettrait aux exportateurs d’économiser quatre milliards d’euros de droits de douane par an. À titre de comparaison, l’accord conclu avec le Japon en juillet 2018 permet d’économiser environ un milliard d’euros.

Sources
  1. Daniela Fernandes, Na França, acordo entre UE e Mercosul enfrenta oposição e protestos de agricultores, ambientalistas e até ministros, BBC, 7 juillet 2019.
  2. « EU-Mercosur Joint Instrument Draft », version de février 2023.
  3. Dont le texte est disponible à cette adresse.