Depuis la signature de l’Accord de Paris sur le climat en décembre 2015, les 60 grandes banques examinées dans le cadre du rapport annuel Banking on Climate Chaos, coordonné par le Rainforest Action Network, ont financé des projets carbone à hauteur de 5 500 milliards de dollars1.

  • Selon les auteurs du rapport, en 2022, les grandes banques ont octroyé 673 milliards de dollars de financements (prêts, émissions d’actions, obligations) à des entreprises du secteur des hydrocarbures pour financer de nouveaux projets d’extraction et d’exploitation de combustibles fossiles.
  • Si ce montant global est en baisse par rapport aux années précédentes (il était de plus de 800 milliards en 2021), ces larges sommes vont à l’encontre des engagements pris visant à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, conformément à l’Accord de Paris.
  • Sur les 60 banques listées ci-dessus, 43 sont membres de l’initiative « Net-Zero Banking Alliance » (ou NZBA, qui réunit à ce jour 129 banques réparties dans 41 pays), organisée par l’Initiative financière du Programme des Nations unies pour l’environnement2.
  • Sur les 60 banques étudiées, « 59 n’ont pas de politiques suffisamment robustes pour atteindre l’objectif de maintenir le réchauffement de la planète en dessous de 1,5 °C ».

En 2022, c’est la banque canadienne Royal Bank of Canada (RBC) qui a octroyé le plus de financements à l’industrie fossile, avec un montant annuel de 42,1 milliards de $ (derrière JPMorgan, qui demeure le principal financier depuis 2016 avec un total de 434 milliards de dollars). Globalement, ce sont les banques canadiennes qui semblent exercer le rôle de « prêteur de dernier recours » aux entreprises de l’industrie des hydrocarbures qui essuient des refus de la part de banques européennes3.

L’étude de ces financements permet d’éclairer les changements globaux qui traversent le secteur énergétique depuis l’invasion russe de l’Ukraine.

  • Tandis que certains pays — notamment l’Allemagne — ont considérablement développé leurs capacités d’importation de gaz naturel liquéfié (GNL) durant cette période, le montant des financements de projets d’infrastructures liées à la liquéfaction ou a la regazéification de gaz naturel a augmenté de près de 50 % entre 2021 et 2022, passant de 15,2 milliards de dollars à 22,7 l’an dernier.
  • Sur les 13 milliards de dollars de financement accordés aux 30 principales entreprises d’extraction de charbon au monde, 87 % ont été fournis par des banques chinoises. Pour les entreprises produisant de l’électricité à partir de charbon, il s’agit de 97 % des financements, pour un montant total de 29 milliards de dollars.
  • En 2022, Pékin a approuvé la construction de l’équivalent de deux nouvelles centrales à charbon par semaine — tandis que le reste du monde se détourne massivement du charbon, bien qu’à un rythme plus lent que les années précédentes4.

En cumulé, entre 2016 et 2022, ce sont principalement des banques américaines qui ont octroyé les financements fossiles, pour un total de 1 756 milliards de dollars, soit plus que le total des banques chinoises (881 milliards) et canadiennes (862 milliards).

Dans son rapport annuel publié en juin dernier sur les investissements en matière énergétique, l’Agence internationale de l’énergie estimait une hausse des investissements dans les énergies fossiles à l’échelle globale pour l’année 2022 (+ 33 milliards de dollars dans le pétrole et le gaz naturel, + 11 milliards dans le charbon, + 5 milliards pour le raffinage et + 3 milliards pour le GNL). Cependant, l’agence note que « les investissements dans les combustibles fossiles restent inférieurs de près de 30 % à ce qu’ils étaient au moment de la signature de l’accord de Paris »5.

Sources
  1. Rainforest Action Network (RAN), BankTrack, Indigenous Environmental Network (IEN), Oil Change International (OCI), Reclaim Finance, the Sierra Club, et Urgewald, Banking on Climate Chaos (2023), 13 avril 2023.
  2. Net-Zero Banking Alliance, UN environment programme finance initiative.
  3. Attracta Mooney, Camilla Hodgson et Patrick Temple-West, « Royal Bank of Canada becomes top financier for fossil fuel industry », Financial Times, 13 avril 2023.
  4. Boom and Bust Coal. Tracking the Global Coal Plant Pipeline, Global Energy Monitor, CREA, E3G, Reclaim Finance, Sierra Club, SFOC, Kiko Network, CAN Europe, Bangladesh Groups, ACJCE, Chile Sustentable, mars 2023.
  5. World Energy Investment 2022, Agence internationale de l’énergie, juin 2022.