Points clefs
    • Aux élections législatives et présidentielles qui se tiendront le 25 février au Nigéria, la jeunesse, qui représente 40 % du corps électoral, a le potentiel d’être la clef du résultat.
    • Mais alors que le taux de chômage des jeunes atteint 50 % et que le phénomène de fuite des cerveaux s’amplifie, l’offre politique ne semble toujours pas la prendre en compte — à l’exception de Peter Obi, auto-proclamé candidat des jeunes.
    • Autre sujet délaissé : le changement climatique, dont le pays subit pourtant de plein fouet les conséquences (inondations, désertification, pollution) demeure toujours un impensé de la classe politique.

    Le 19 novembre 2022, le Nigerian Yusuf Anka remportait le premier prix des Rocky Peck Awards pour son documentaire The Bandit Warlords of Zamfara1. Ces prix récompensent chaque année les reportages de journalistes free-lance ayant risqué leur vie pour leur travail. Parmi les récipiendaires des années précédentes, on retrouve des journalistes ayant œuvré dans des pays en guerre ou s’en approchant : la Syrie, l’Irak, l’Afghanistan ou le Nicaragua ; les côtoie désormais un nigérian. Que penser de cette promotion symbolique, aux côtés de Daech ou des narcotrafiquants ?

    Diffusé sur la BBC, le documentaire a été sèchement reçu au Nigeria. Le ministre de l’Information, Alhaji Lai Mohammed, a notamment menacé la chaîne britannique et son auteur de sanctions dès sa diffusion, reprochant au documentaire de « glorifier le terrorisme et le banditisme au Nigeria ». Le reportage, qui met en avant les errements étatiques en matière de sécurité, en particulier les « bavures » policières devenues systémiques, constitue le témoignage embarrassant d’une vérité connue de tous : dans leurs conflits avec Boko Haram, les forces gouvernementales et leurs supplétifs miliciens ont fait plus de morts que les terroristes2.

    Alors que la situation sécuritaire au Nigeria fait l’objet de mises à jour régulières — début novembre 2022, les États-Unis rapatriaient leur « non essential staff » — l’enjeu, à l’approche de l’élection présidentielle, est devenu politique. Le président actuel Muhammadu Buhari, âgé de 80 ans, général en retraite, malade et semi-résident londonien, ne peut se représenter ; aussi l’élection de février opposera principalement trois hommes. Bola Ahmed Tinubu, âgé officiellement de 70 ans, réputé corrompu, est originaire du même parti que le président sortant (APC) ; il connaît bien son principal opposant du PDP, Alhaji Atiku Abubakar, qui à 76 ans se présente pour la septième fois, après avoir été vice-président il y a 24 ans. Enfin, Peter Obi, âgé de 61 ans  : le candidat du Labour Party fait figure de trouble-fête entre les deux partis qui ont occupé la scène politique nigériane depuis le retour à la démocratie en 1999.

    Depuis le début de la campagne à l’automne, les débats se concentrent autour des enjeux économiques et sécuritaires et se cristallisent autour d’un duo  : insécurité et inflation.  D’autres sujets, pourtant majeurs, tels que la dynamique démographique et l’adaptation aux changements climatiques n’ont, face à ces urgences quotidiennes, que peu de voix au chapitre.

    Depuis le début de la campagne à l’automne, les débats se concentrent autour des enjeux économiques et sécuritaires et se cristallisent autour d’un duo  : insécurité et inflation.  D’autres sujets, pourtant majeurs, tels que la dynamique démographique et l’adaptation aux changements climatiques n’ont, face à ces urgences quotidiennes, que peu de voix au chapitre.

    Enzo FASQUELLE

    Depuis le début de la campagne à l’automne, les débats se concentrent autour des enjeux économiques et sécuritaires et se cristallisent autour d’un duo  : insécurité et inflation.  D’autres sujets, pourtant majeurs, tels que la dynamique démographique et l’adaptation aux changements climatiques n’ont, face à ces urgences quotidiennes, que peu de voix au chapitre.

    Atiku Abubakar, candidat à la présidence du People’s Democratic party (à gauche) rend visite à l’émir de Kano, Aminu Ado Bayero, au centre, avant un événement de campagne à Kano le 9 février 2023. © AP Photo/Sani Maikatanga

    Alors que la situation sécuritaire au Nigeria fait l’objet de mises à jour régulières — début novembre 2022, les États-Unis rapatriaient leur « non essential staff » — l’enjeu, à l’approche de l’élection présidentielle, est devenu politique. Le président actuel Muhammadu Buhari, âgé de 80 ans, général en retraite, malade et semi-résident londonien, ne peut se représenter ; aussi l’élection de février opposera principalement trois hommes. Bola Ahmed Tinubu, âgé officiellement de 70 ans, réputé corrompu, est originaire du même parti que le président sortant (APC) ; il connaît bien son principal opposant du PDP, Alhaji Atiku Abubakar, qui à 76 ans se présente pour la septième fois, après avoir été vice-président il y a 24 ans. Enfin, Peter Obi, âgé de 61 ans  : le candidat du Labour Party fait figure de trouble-fête entre les deux partis qui ont occupé la scène politique nigériane depuis le retour à la démocratie en 1999.

    Depuis le début de la campagne à l’automne, les débats se concentrent autour des enjeux économiques et sécuritaires et se cristallisent autour d’un duo  : insécurité et inflation.  D’autres sujets, pourtant majeurs, tels que la dynamique démographique et l’adaptation aux changements climatiques n’ont, face à ces urgences quotidiennes, que peu de voix au chapitre.

    Depuis le début de la campagne à l’automne, les débats se concentrent autour des enjeux économiques et sécuritaires et se cristallisent autour d’un duo  : insécurité et inflation.  D’autres sujets, pourtant majeurs, tels que la dynamique démographique et l’adaptation aux changements climatiques n’ont, face à ces urgences quotidiennes, que peu de voix au chapitre.

    Enzo FASQUELLE

    La democrazy nigériane  : 220 millions d’habitants, 20  % d’inflation, cinq conflits ouverts et une élection.

    Il est vrai que la situation économique du pays résume à elle seule les ambivalences du Nigeria, classé en 2012 par Goldman Sachs parmi les « next eleven », les successeurs des BRICS. Un taux de croissance économique proche de 4  % en 2021, pour une inflation de plus de 20  % en 2022 — un record depuis 2005 ;  un PIB qui place le pays à la 31e place mondiale, mais un IDH qui le déclasse à la 197e place sur 228.

    Le Nigeria subit aujourd’hui les variations du cours des hydrocarbures qui représente près de 90 % de ses revenus à l’exportation. On estime que près de la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté, tandis que les pénuries de carburant — premier exportateur d’Afrique en pétrole brut, le Nigeria ne raffine pas ses productions et importe donc du carburant depuis l’Europe — pénalisent entrepreneurs et particuliers.

    La chute de la production nationale de riz, due à des inondations, conjuguée aux effets de la guerre en Ukraine et de l’inflation a également entraîné une flambée des prix des matières premières. La valeur d’un sac de riz de 50 kilogrammes par exemple, est désormais supérieure au salaire mensuel minimum d’un nigérian, qui tourne autour 65 euros.

    En parallèle de cette conjoncture économique défavorable, le Nigeria est toujours engagé dans cinq conflits ouverts. Au sud-est, les sécessionnistes biafrais continuent clandestinement à lutter pour l’indépendance du Biafra, en dépit du cessez-le-feu de 1970. Plus au Sud, les communautés autour de l’État fédéral du River sont engagées depuis des années dans une lutte contre les extractions minières illégales qui, entre 2006 et 2008, avaient fait chuter d’un tiers la production de pétrole du pays.

    En parallèle de cette conjoncture économique défavorable, le Nigeria est toujours engagé dans cinq conflits ouverts.

    enzo fasquelle

    Le nord-ouest du pays, où le documentaire de Yusuf Anka a été tourné, est quant à lui l’objet d’attaques régulières de « bandits » qui ont fait du kidnapping et de la prise d’otage un business. Au centre-nord, les principaux conflits sont fonciers et opposent bergers majoritairement musulmans et agriculteurs plutôt chrétiens. À l’origine, ce conflit sous-tendu par des motifs environnementaux et économiques a acquis, pour certains, une coloration ethnique ou religieuse. Au nord-ouest, enfin, la menace est terroriste. Elle prend le nom de Boko Haram ou d’ISWAP (État islamique en Afrique de l’Ouest) en fonction des lieux et des périodes.

    Enfin, l’ensemble du pays est touché par différentes formes de criminalités  : kidnapping, meurtres et braquages violents. Il s’agit de la première cause de mortalité violente dans le pays par une large marge, selon la base de données indépendantes Nigeria Watch3.  Si le marasme économique et l’insécurité font quotidiennement la une des journaux, ces deux sujets en masquent peut-être deux autres — plus déterminants à l’échelle continentale et planétaire.

     « Baba Go Slow » contre « Lazy Nigerian Youth »  : quelle place pour la jeunesse au Nigeria ?

    Aussi peuplé que le Brésil, bien qu’on ne sache souvent pas le placer sur une carte et que le pays ne se soit pas qualifié pour la coupe du monde de football 2022, le Nigeria sera surtout, d’ici 2050, le troisième pays le plus peuplé du monde. Or, contrairement à la Chine et à ses politiques ou à l’Inde qui a adopté un objectif de stabilisation démographique d’ici 2045, le Nigeria n’a mis en œuvre aucune politique visant à contrôler sa démographie. Le risque de heurter à la fois les leaders traditionnels, les musulmans et les chrétiens semble avoir un prix politique trop important. Sous le premier mandat Buhari, les pouvoirs publics ont soutenu très timidement une politique du « child spacing » consistant à encourager les couples à attendre davantage entre deux naissances, et ainsi à réduire in fine le nombre d’enfants. Cet effort n’a pas été soutenu sur le temps long.

    Face à un chômage qui touche une part considérable des jeunes d’un pays où l’âge médian est de 18 ans, la solution semble être, pour de nombreux nigérians, de se résoudre à des projets de migrations intra ou extra-africains.  Alors que près d’un Africain sur cinq est nigérian, les ressortissants essaiment dans tous les pays de la sous-région, où leur image est contrastée. À la fois bouc émissaire, accusé d’être à l’origine de tous les maux d’Afrique de l’Ouest – trafics, prostitution, arnaques – le pays est également admiré et perçu comme un leader et une voix forte du continent. Selon l’ONU, on comptait 1,7 million de migrants nigérians en 2020, contre moins d’un million dix ans plus tôt. Dans le secteur médical notamment, une fuite des cerveaux vers le Royaume-Uni, le Canada et les États-Unis est documentée depuis longtemps, tandis que l’on retrouve des nigérians parmi les contingents de migrants irréguliers tentant de rejoindre l’Europe par la mer 4.

    Alors que près d’un Africain sur cinq est nigérian, les ressortissants essaiment dans tous les pays de la sous-région, où leur image est contrastée. À la fois bouc émissaire, accusé d’être à l’origine de tous les maux d’Afrique de l’Ouest — trafics, prostitution, arnaques — le pays est également admiré et perçu comme un leader et une voix forte du continent.

    Enzo fasquelle

    Durant ses deux mandats, le président Buhari s’est montré davantage intéressé par les revenus de la diaspora — dont il révélait à la tribune de l’ONU qu’ils étaient équivalents à quatre fois les investissements directs dans le pays — qu’à la situation migratoire du pays ; cela témoigne tout à la fois d’une forme de laisser-aller érigée en politique publique et d’un certain mépris des plus jeunes générations. En 2018, Muhammadu Buhari avait d’ailleurs publiquement dénigré les jeunes nigérians, les qualifiant de « paresseux profitant des revenus du pétrole ».5 S’en était suivi une vague de protestation, notamment sur les réseaux sociaux avec le mot-dièse #lazyNigerianyouth, ce qui n’avait pas empêché sa réélection en 2019. En 2020, les jeunes avaient à nouveau manifesté leur mécontentement dans le cadre du mouvement EndSARS, du nom d’une unité policière connue pour ses exactions et sa très grande violence. Les manifestations avaient été violemment réprimées, faisant plus de deux cents morts dans tout le pays.

    Ce dénigrement des jeunes explique aussi en partie le regain d’intérêt autour de la candidature de Peter Obi, autoproclamé candidats des jeunes. Sur les réseaux sociaux, ses supporters surnommés les « Obidient », sont particulièrement nombreux et visibles. Beaucoup indiquent s’être inscrits sur les registres électoraux uniquement pour le soutenir. Si ses chances d’être élu sont très faibles, notamment en raison des lois électorales qui favorisent les partis établis dans tout le pays, il est probable qu’il fasse un score très élevé chez les jeunes et les urbains, voire qu’il s’ancre dans le paysage politique à plus long terme.

    De jeunes travailleurs soutenant le candidat Peter Obi (Labour Party) en campagne pour la présidentielle, à Lagos le 1er octobre 2022 © AP Photo/Sunday Alamba

    Si l’élection présidentielle au Nigeria est généralement l’occasion de rappeler le fonctionnement clientéliste et néopatrimonial du pays — l’octroi de ressources publiques (emploi ou fonds) étant souvent utilisé par des responsables politiques pour garantir la loyauté d’électeurs — cette élection met également en lumière son caractère gérontocrate. Les deux principaux candidats, totalisant 146 ans à eux deux, n’ont pas l’intention de revoir le fonctionnement d’un système où les aînés font l’objet d’un respect certain  : dans les États yorubas il faut saluer les anciens en s’agenouillant. Si le président actuel est parfois moqué pour son âge – on le surnomme « Baba Go Slow » – tandis que la santé du candidat Tinubu, multipliant les gaffes et ayant des difficultés à se déplacer, est l’objet de polémiques, les débats ne vont pas plus loin  : l’exemple du président états-unien Joe Biden est souvent dégainé comme un joker.

    Au-delà de la question des jeunes, ce sont les enjeux d’avenir structurants, comme le changement climatique, qui semblent délaissés par les candidats, dans une campagne où les meetings s’apparentent davantage à un rassemblement festif et démagogique qu’à une présentation de mesures politiques.

    Au-delà de la question des jeunes, ce sont les enjeux d’avenir structurants, comme le changement climatique, qui semblent délaissés par les candidats, dans une campagne où les meetings s’apparentent davantage à un rassemblement festif et démagogique qu’à une présentation de mesures politiques.

    Enzo fasquelle

    Comment empêcher un rat d’église de manger une hostie empoisonnée ?

    Le Nigeria est pourtant directement touché par les effets des changements climatiques, à plusieurs niveaux. Les littoraux du sud subissent, comme une bonne partie de l’Afrique de l’Ouest, une érosion très forte. L’élévation du niveau de la mer, provoqué notamment par la fonte des glaciers terrestres et des calottes polaires, se fait si rapide que certains résidents voient leurs maisons emportées par les vagues en quelques années. Cela entraîne également des relocalisations au sein du pays, qui ne se passent pas toujours dans la douceur.

    Le Nigeria est pourtant directement touché par les effets des changements climatiques, à plusieurs niveaux. Les littoraux du sud subissent, comme une bonne partie de l’Afrique de l’Ouest, une érosion très forte. L’élévation du niveau de la mer, provoqué notamment par la fonte des glaciers terrestres et des calottes polaires, se fait si rapide que certains résidents voient leurs maisons emportées par les vagues en quelques années. Cela entraîne également des relocalisations au sein du pays, qui ne se passent pas toujours dans la douceur.

    Au Nord-Centre, le Nigeria a connu plusieurs mois d’inondations violentes ayant ravagé les récoltes, entraîné la mort de centaines de personnes et le déplacement forcé de plusieurs millions d’autres. Un rapport du World Weather Attribution estime que l’activité humaine les a rendues 80 fois plus probables. Le Nord, quant à lui, souffre de la désertification à la suite d’une augmentation générale des températures. Cette situation entraîne une raréfaction des terres arables, et une dispute foncière accrue entre éleveurs de bétail et agriculteurs.

    Les fermetures de frontières dans le nord-est du Nigeria, mises en œuvre militairement pour entraver l’expansion de groupes armés terroristes, ont également réduit les possibilités de mobilités des éleveurs, rendant encore plus compliquée toute tentative d’adaptation aux changements climatiques6. Cumulée à une forte croissance démographique, cette situation peut encore s’aggraver, alors que Nigeria Watch estime que depuis 2007 près de 4  % des morts violentes au sein du pays sont liées à des disputes foncières de ce type.

    À Hadeja, après les inondations, en septembre 2022 © AP Photo

    Enfin, la pollution, principalement visible dans les grandes villes, comme Lagos où le ciel n’est que nuances de gris et où l’air est 10 fois plus pollué qu’à Tokyo pour une population comparable, touche l’ensemble du pays, provoquant une explosion des maladies respiratoires chez les urbains. Quatrième émetteur de gaz à effet de serre en Afrique — principalement du méthane lors de l’exploitation du pétrole et du gaz naturel — l’empreinte du Nigeria demeure faible une fois rapportée à sa population  : 0,65 tonne par an et par nigérian, contre 7,5 pour un chinois et 18 pour un états-unien7.

    Dès son discours d’investiture en 2015, le président Buhari mentionnait le changement climatique comme une des priorités de son mandat. Un an après, il s’engageait à réduire les émissions de 45  % d’ici 2030. En 2017, il ratifiait l’accord de Paris, et le Nigeria devenait la même année le premier pays africain à émettre des obligations vertes. Son second mandat a cependant révélé les limites de son administration en matière de lutte contre le changement climatique : la méthode Buhari semblait se limiter à des déclarations d’intention et à la ratification de divers plans d’action, permettant de recueillir la bénédiction des acteurs internationaux : mais les plans n’étaient ensuite que peu suivis d’effet. Au-delà des effets d’annonce, peu d’actions décisives semblent avoir été menées à bien, dans un pays où la croissance économique reste tirée par les hydrocarbures. Le fond de la pensée des leaders nigérians a d’ailleurs peut-être été résumé par le candidat du parti du président sortant Tinubu, qui déclarait il y a quelques mois dans une métaphore animale et religieuse  : « Comment empêcher un rat d’église de manger une hostie empoisonnée ? »8le rat d’église étant le Nigeria, et l’hostie empoisonnée les revenus des hydrocarbures.

    Au-delà des effets d’annonce, peu d’actions décisives semblent avoir été menées à bien, dans un pays où la croissance économique reste tirée par les hydrocarbures.

    enzo fasquelle

    Plus inquiétant encore de la part du candidat favori à l’élection et ancien gouverneur de l’État de Lagos, particulièrement touché par les effets de l’érosion, ce dernier déclarait à l’automne que « si l’Occident ne finance pas, ne travaille pas [avec nous], nous ne conformerons pas à leur changement climatique ». S’agit-il là de la dernière « gaffe » d’un candidat connu en la matière, ou bien l’expression d’un impensé partagé par la classe politique nigériane ? En dehors des discours de Peter Obi — eux-mêmes peu précis — il est difficile de trouver des propositions concrètes, chiffrées et applicables, dans les programmes du PDP comme de l’APC. Le changement climatique ne semble pas être un enjeu électoral pour la majorité de la population.

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    Face à l’urgence économique et au risque sécuritaire, il est probable que le prochain président du Nigeria, quel qu’il soit, ne change pas drastiquement les politiques publiques du pays en matière de politique nataliste et migratoire ou de lutte contre le changement climatique.

    Les défis conjoncturels tels que le coût de la vie ou les différentes strates d’insécurité trouvent pourtant pour partie leurs origines dans des enjeux structurels pour le Nigeria, et décisifs pour la région et la planète. Alors que le pays souffre ces dernières semaines d’un changement de devise mal préparé et d’une nouvelle pénurie d’essence, il reste à espérer que cette élection qui porte déjà peu d’espoir n’apporte pas plus de difficultés.

    Sources
    1. Voir le documentaire sur le site de la BBC
    2. Marc-Antoine Pérouse de Montclos, « Boko Haram au Nigeria : qui tue qui ? Le décombre macabre d’une guerre sale », Le Monde, 22 avril 2020
    3. http://www.nigeriawatch.org/
    4. Liza Fabbian, « Au Nigeria, des jeunes choisissent l’exil en pleine crise économique : « Si je dois partir par la route, je n’hésiterai pas non plus » », Le Monde, 7 novembre 2022 
    5. Samuel Ogundipe, « Buhari criticizes Nigerian youth as lazy, uneducated »,  Premium Times, 19 avril 2018
    6. Alex, Bastien, et Adrien Detges. «  Chapitre 7. Changements climatiques au Sahel. De la problématique sécuritaire au défi global  », Nicolas Regaud éd., La guerre chaude. Enjeux stratégiques du changement climatique. Presses de Sciences Po, 2022, pp. 127-138.
    7. Voir les statistiques détaillées sur le site du ministère de l’économie et des finances : « La politique du Nigeria face au changement climatique », 21 juillet 2021
    8. Olu Fasan, « Tinubu says climate change in the West’s problem, not Nigeria’s : How clever ! », Vanguard, 27 octobre 2022